Chapitre 3. Les particularités de l’accompagnement d’une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer
Accompagner au quotidien une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer est un véritable défi pour les soignants travaillant à domicile ou en institution. Les particularités de cet accompagnement résident, en partie, dans la singularité de la maladie, longue et irréversible, de ses conséquences liées aux modifications importantes de la personnalité, du comportement, de la communication de la personne malade qui altèrent sa relation aux autres et au monde.
1. Une approche globale
Quelle que soit la nature de l’intervention, l’approche globale a pour fondement une relation humaine qui place la personne au cœur des soins, avec son histoire, ses angoisses, ses souffrances, ses réactions et qui le considère dans sa totalité, en lien avec son entourage et son environnement. Le terme accompagner signifie « prendre comme compagnon, aller avec ». Accompagner, c’est prendre soin du malade dans sa globalité, s’adapter à sa singularité et le respecter en tenant compte de ses dimensions physiques, psychologiques, sociales, culturelles et spirituelles.
La personne atteinte de la maladie d’Alzheimer doit être considérée d’abord et avant tout comme un être humain à part entière, sans la réduire à sa maladie, ses déficiences et ses handicaps. La personne malade n’est pas un « objet de soin » mais un « sujet » digne d’intérêt et de respect. Ces personnes gardent encore en elles, malgré la maladie, de belles richesses et une certaine aptitude à faire face, à s’adapter, à choisir, à risquer et même à apprendre, en bref à vivre.
Sophie, aide-soignante en EHPAD depuis 9 ans : « J’ai toujours été surprise de la manière dont on parle ou on se représente les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, comme si c’était d’abord une maladie avant d’être une personne. Or, ce sont d’abord des hommes et des femmes avec leurs histoires, leurs goûts, leur caractère aussi, parfois même un sacré caractère, à respecter en tant qu’être humain, surtout qu’ils ne peuvent pas imposer ce respect par eux-mêmes. »
● Placer la personne au cœur de l’accompagnement et des soins.
● Prendre soin d’un être humain malade et non pas uniquement de sa maladie.
● Regarder ces malades comme des personnes à part entière, qui peuvent conserver aussi longtemps que possible, leurs capacités physiques, affectives, sociales et spirituelles.
● Considérer ces personnes comme des êtres uniques dont les réactions à la maladie changent de l’un à l’autre et au fil de l’évolution de la maladie.
● S’adapter à la singularité de chacun et la respecter.
Martine, fille de Mme B. atteinte de la maladie d’Alzheimer depuis 6 ans : « Quand ma mère est entrée dans cette institution, elle était dans un état catastrophique après sa chute : elle ne mangeait plus, ne marchait plus. Grâce aux soins et à la qualité relationnelle des soignantes, elle va beaucoup mieux aujourd’hui. Même si sa maladie progresse, elle mange, participe à des animations et marche à nouveau un petit peu ».
2. Une approche particulière
Accompagner au quotidien une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer nécessite une approche particulière. La bonne volonté ne suffira pas !
Cet accompagnement est exigeant et engageant. Il nécessite des conditions et des qualités humaines pour le mener au quotidien. Il s’agit des cinq « C » : la compétence, la compassion, la congruence, la constance et le climat.
LES CINQ « C »
● Être Compétent : c’est acquérir des connaissances sur la maladie d’Alzheimer et les méthodes d’intervention spécifiques pour promouvoir un accompagnement de qualité.
● Faire preuve de Compassion : c’est comprendre ce que vit la personne malade, cerner ses difficultés, anticiper ses besoins et manifester de l’empathie pour adapter son aide.
● Être Congruent : c’est l’authenticité, la sincérité, une volonté d’aider qui crée la confiance.
● Faire preuve de Constance : c’est la permanence, la stabilité du milieu et des conditions de vie, des attitudes et réactions du personnel, de l’organisation des soins et des activités, la présence des proches.
● Offrir un Climat serein : c’est l’ambiance du milieu de vie caractérisée par la douceur, la chaleur humaine, le calme, la disponibilité, la joie de vivre, les relations humaines rassurantes, l’esthétique des lieux…
Jean-Pierre, aide-soignant en EHPAD : « Je fais très attention au ton de ma voix, à ma manière d’être, à ne pas brusquer les personnes malades, à prendre sur moi. J’ai appris à rester zen auprès d’elles, ça se passe mieux pour tout le monde. Elles ont besoin d’être rassurées par un geste, un regard, d’être écoutées, d’être respectées. Les formations que j’ai suivies m’ont aidé à être moins stressé ».
3. La prise en compte des capacités restantes
Face à la chronicité et l’irréversibilité de la maladie d’Alzheimer et parfois face à la régression, le fatalisme est à proscrire. Il convient de ne pas céder au pessimisme parce que la maladie est aujourd’hui incurable ! Les personnes vivent des années avec leur maladie chronique. Leur assurer une qualité de vie est une mission essentielle, tout comme, préserver et mobiliser leurs capacités restantes, anticiper les complications, chercher à prévenir ou retarder la maladie, qui sont des objectifs réalistes et louables.