3 – Item 35. Anomalies maxillo-faciales et développement buccodentaire

Chapitre 3 – Item 35. Anomalies maxillo-faciales et développement buccodentaire


Plan du chapitre



Dépister les anomalies du développement maxillo-facial




Généralités


Embryologie faciale


Anomalies de fusion des bourgeons faciaux


Anomalies de l’organogenèse branchiale


Dépister les anomalies du développement dentaire




Éruption dentaire


Anomalies de l’éruption dentaire


Anomalies de l’embryologie dentaire


Dépister les anomalies du développement cranio-facial




Ossification cranio-faciale


Croissance crânienne


Anomalies de la voûte


Anomalie de la base


Dépister les anomalies maxillomandibulaires




Croissance faciale


Troubles de l’articulé dentaire d’origine alvéolodentaire


Troubles de l’articulé dentaire d’origine squelettique


Prévenir les maladies buccodentaires fréquentes de l’enfant




Carie dentaire


Prévention de la carie dentaire





Dépister les anomalies du développement maxillo-facial



Généralités


Les anomalies du développement maxillo-facial et cranio-facial peuvent survenir à toutes les périodes de la formation et du développement de l’extrémité céphalique :




• lors de l’histogenèse (jusqu’à la deuxième semaine in utero) : il s’agit d’anomalies cellulaires au niveau du blastème primitif, responsables de dysplasies tissulaires évolutives, regroupées sous le vocable de phacomatoses


• au cours de l’organogenèse (de la deuxième à la huitième semaine in utero) :




– il s’agit d’anomalies provenant du tube neural, lequel est à l’origine de la formation du cerveau et du développement cranio-facial. Plus l’atteinte est précoce, plus elle est grave avec, notamment, une relation directe contenant-contenu (pas de cerveau signifie pas de crâne ; pas d’œil signifie pas d’orbite) : ces anomalies précoces peuvent être regroupées sous le vocable de malformations cérébro-cranio-faciales ;


– durant la fin de l’organogenèse, les bourgeons de la face peuvent ne pas fusionner entre eux et laisser persister des sillons plus ou moins larges sur les parties molles du visage et même sur le squelette osseux sous-jacent : ces anomalies sont regroupées sous le vocable de fentes ;


• lors de la morphogenèse (de la huitième semaine in utero à la naissance) : il s’agit d’anomalies du programme de croissance survenant sur le squelette ostéocartilagineux :




– lorsque les déformations du squelette sont liées à une déficience du tissu osseux, les anomalies sont regroupées sous le vocable de dysostoses : elles peuvent toucher l’orbite, le nez, le maxillaire, la mandibule ;


– l’altération tissulaire peut être limitée à la périphérie de la pièce osseuse, avec fermeture prématurée des sutures crâniennes (synostoses), entraînant un groupe de pathologies regroupées sous le vocable de craniosténoses ;


– certaines formes sont associées également à des faciosténoses, avec un retentissement aussi sur le massif facial, comme par exemple un exorbitisme bilatéral ; c’est par exemple le cas du syndrome polymalformatif d’Apert, associant en plus de la facio-cranio-sténose, des syndactylies.

Au cours du développement embryonnaire, la région céphalique est celle qui présente en premier le plus haut degré d’organisation. La croissance de la face est moins précoce que la croissance crânienne, elle-même sous la dépendance de la poussée cérébrale.





Il faut retenir que le cerveau guide la croissance crânienne et faciale et, ainsi, que beaucoup d’anomalies neurocrâniennes auront des répercussions faciales.


Embryologie faciale


Au début de la quatrième semaine in utero, l’extrémité céphalique d’un embryon est grossièrement arrondie. Puis, peu à peu, des renflements ou bourgeons faciaux se développent autour d’un orifice dénommé stomodéum (bouche primitive).

Ces renflements sont constitués de tissu mésenchymateux recouvert d’un revêtement épiblastique. Ce même tissu mésenchymateux comporte lui-même deux types de cellules :




• des cellules mésodermiques, qui vont donner des artères (arcs aortiques) et des muscles ;


• des cellules des crêtes neurales, qui vont donner de l’os et du cartilage.

À la quatrième semaine in utero, les bourgeons de la face sont au nombre de cinq, séparés initialement par des sillons qui se combleront progressivement du fait de la courbure de la nuque qui survient à cette période et qui a pour effet de tasser les uns contre les autres les bourgeons faciaux. Ils tendent à se fusionner entre eux jusqu’au troisième mois par des phénomènes de confluence nommés mésodermisation du mur épithélial. Ces phénomènes ne sont possibles que sous l’action combinée d’une poussée du mésenchyme par prolifération et d’une nécrose par apoptose des épithéliums.

Des mécanismes extrêmement complexes entrent en jeu pour réguler cette mésodermisation. Ils interviennent dans une chronologie précise et génétiquement déterminée. Cette complexité explique leur possible défaillance, à l’origine d’anomalies morphologiques telles que les fentes faciales.






• le bourgeon frontal, ou nasofrontal : impair et médian, il est le plus volumineux ; il est constitué par la saillie du télencéphale et forme le plafond du stomodéum ;


• les deux bourgeons maxillaires (issus du premier arc branchial) : ils forment les berges latérales du stomodéum et sont à l’origine des portions latérales des lèvres supérieures ;


• les deux bourgeons mandibulaires (issus du premier arc branchial) : ils confluent rapidement (dès la quatrième semaine) sur la ligne médiane pour former le plancher du stomodéum, à savoir la lèvre inférieure.

Au cours de la quatrième semaine in utero, les bourgeons faciaux (excepté le bourgeon frontal) s’organisent en un système dit « branchial » — ainsi dénommé car il forme les branchies chez les poissons. Chez l’Homme, il contribue à la formation des étages moyen (maxillaire) et inférieur (mandibulaire) de la face et de la partie ventrale du cou.


Évolution des bourgeons faciaux



Zone labionarinaire, palais primaire


À la fin de la quatrième semaine, apparaissent sur le bourgeon frontal deux épaississements épiblastiques (ou ectodermiques) dénommés les placodes olfactives ou nasales (fig. 3.1b).

Vers la cinquième à sixième semaine, ces placodes s’invaginent dans le mésoderme sous-jacent pour former des gouttières, ou cupules olfactives, qui s’orientent dans un sens antéropostérieur au niveau du plafond du stomodéum. Ces gouttières délimitent des bourgeons nasaux médians et latéraux (fig. 3.1c).

Vers la sixième à septième semaine, les deux bourgeons maxillaires poussent en direction médiane, ce qui entraîne la fusion sur la ligne médiane des deux bourgeons nasaux médians, aboutissant à la formation du segment intermaxillaire, qui comprendra (fig. 3.1d) :




• le philtrum de la lèvre supérieure ;


• les quatre incisives supérieures ;


• le palais primaire (partie du palais située en avant du foramen incisif).

Ce segment intermaxillaire fusionne par mésodermisation (fig. 3.1e) :




• avec les bourgeons maxillaires supérieurs pour former la lèvre supérieure : la cicatrice de mésodermisation sera la crête philtrale ;


• avec les bourgeons nasaux latéraux pour former l’orifice narinaire.



Palais secondaire, septum nasal




La jonction entre le palais primaire antérieur et le palais secondaire postérieur reste marquée chez l’adulte par le canal palatin antérieur, ou canal nasopalatin, qui s’abouche au foramen incisif. L’ensemble palais primaire et palais secondaire forme le palais osseux définitif et permet la séparation du stomodéum en des fosses nasales au-dessus et une cavité buccale au-dessous. La langue, qui initialement occupe tout le stomodéum, se retrouve refoulée dans la cavité buccale.

Simultanément à ce processus de cloisonnement horizontal du stomodéum, se produit un processus de cloisonnement vertical par une lame mésenchymateuse issue des bourgeons nasaux médiaux : le septum nasal embryonnaire (fig. 3.2).

Le voile du palais et la luette sont des formations complémentaires d’apparition plus tardive ; ils forment le palais membraneux.


Évolution du système branchial


Lors de la quatrième semaine in utero, le système branchial est constitué de cinq paires d’arcs branchiaux numérotés de I à VI (l’arc V ne se développant pas chez les vertébrés terrestres). Entre ces arcs, il existe des sillons plus ou moins marqués : les poches ectoblastiques à l’extérieur et les poches endoblastiques à l’intérieur. Ces poches sont numérotées de 1 à 4 (fig. 3.3).








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Figure 3.3



Devenir des arcs branchiaux






• L’arc I (arc mandibulaire) donne à sa partie supérieure les deux bourgeons maxillaires et, dans son centre, les deux bourgeons mandibulaires. L’épiblaste qui recouvre cet arc donne l’émail dentaire, les glandes salivaires, la muqueuse buccale et une partie du pavillon de l’oreille.


• L’arc II (arc hyoïdien) se développe considérablement jusqu’à recouvrir les arcs III et IV et donne la région hyoïdienne.


• Les arcs III, IV et VI involuent.


Devenir des poches ectoblastiques






• Sur les quatre poches ectoblastiques, seule la première persiste et donne le conduit auditif (fig. 3.4).



• Les deuxième, troisième et quatrième poches ectoblastiques forment une poche commune (le sinus cervical), puis disparaissent.


Devenir des poches endoblastiques






• La première poche endoblastique donne le récessus tubo-tympanique et la trompe auditive (d’Eustache).


• La deuxième poche endoblastique donne l’amygdale palatine.


• La troisième poche endoblastique donne les parathyroïdes inférieures et le thymus.


• La quatrième poche endoblastique (et la cinquième poche, qui en est un simple diverticule) donne une partie de la thyroïde et les parathyroïdes supérieures.


Champ mésobranchial


Sur la face ventrale de l’intestin pharyngien, à la partie médiane, il existe une région lisse : le champ mésobranchial, à partir duquel se développent la langue, une partie de la thyroïde et le canal thyréoglosse (entre la thyroïde et la langue) qui involue.

Aux environs du troisième mois (douzième semaine), la face du fœtus est pratiquement constituée définitivement.


Anomalies de fusion des bourgeons faciaux



Kystes et fistules de la face


Les kystes et les fistules de la face résultent d’un trouble de coalescence touchant un ou plusieurs bourgeons faciaux et d’inclusions ectodermiques à la jonction de ces structures.


Fistules faciales


Elles sont rares et se voient surtout à la lèvre inférieure, accompagnant parfois une fente labiopalatine, dont elles signent le caractère familial (syndrome de Van der Woude, fig. 3.5).



Kystes faciaux embryonnaires


Ils sont plus fréquents. Ce sont des inclusions ectodermiques qui persistent lors de la fusion des bourgeons, responsables de kystes dermoïdes ou épidermoïdes. Le kyste de la queue du sourcil, situé à la jonction du bourgeon frontal et du bourgeon maxillaire, est le plus banal (fig. 3.6). Ceux du plancher buccal peuvent être d’expression endobuccale (kystes adgéniens) ou cervicale (kystes adhyoïdiens). Les kystes et fistules médians du dos du nez procèdent d’un défaut de fermeture du neuropore antérieur (vingt-septième jour) et peuvent avoir une extension endocrânienne. Leur traitement est chirurgical et nécessite une exérèse complète du kyste ou de la fistule, afin d’éviter toute récidive.



Fentes faciales



Généralités


Les fentes faciales résultent d’un défaut d’accolement, avec ou sans hypoplasie, d’un ou plusieurs bourgeons faciaux. Elles affectent gravement non seulement la morphologie faciale mais aussi la fonction orofaciale, ce qui aggrave le retentissement social et psychologique de la malformation.

Certaines fentes faciales sont rares, comme le colobome (fente entre le bourgeon maxillaire supérieur et le bourgeon nasal externe), la macrostomie (fente entre le bourgeon maxillaire supérieur et le bourgeon maxillaire inférieur). D’autres sont plus fréquentes : ce sont les fentes labiopalatines.


Fentes labiopalatines


La présence des fentes labiopalatines (en fait, labio-maxillo-palatines), par l’anomalie de formation du palais primaire et/ou du palais secondaire, a une double conséquence :




• morphologique : possibilité de déformation faciale du nez, de la lèvre supérieure, de l’arcade alvéolaire et du palais, se modifiant avec la croissance ;


• fonctionnelle : interruption des sangles musculaires des lèvres, du voile du palais et de l’oropharynx.

Ainsi, selon les formes cliniques, il existe des troubles de la respiration, de la phonation, de la déglutition, de l’audition et de l’éruption dentaire.

Il existe des formes plus ou moins complètes, plus ou moins symétriques, uni- ou bilatérales (fig. 3.7 et 3.8). On les classe en fentes du palais primaire en avant du canal nasopalatin et fentes du palais secondaire en arrière du canal nasopalatin.




Fente du palais primaire, ou fente labiomaxillaire

Elle relève d’un défaut d’accolement des bourgeons nasaux et du bourgeon maxillaire. La forme unilatérale complète associe une ouverture du seuil narinaire, de la lèvre supérieure et de l’arcade alvéolaire (dans la région de l’incisive latérale) jusqu’au canal nasopalatin (canal incisif) (région du prémaxillaire). Les berges de la fente sont plus ou moins décalées en fonction des tractions musculaires et du degré d’hypoplasie des bourgeons. La forme bilatérale isole un bourgeon médian (ou prémaxillaire) porté en avant par le vomer ; il est constitué du tubercule labial médian et du secteur alvéolaire correspondant aux incisives centrales et latérales. Ce bourgeon médian est souvent décalé en avant par rapport aux deux berges externes de la fente.


Fente du palais secondaire, ou division palatine

Dans ce cas, la fente est médiane, allant du canal nasopalatin (canal incisif) à la luette et faisant communiquer largement la cavité buccale avec les fosses nasales par défaut d’accolement des deux lames palatines. Il existe des formes partielles suspectées en cas de luettes bifides : ce sont les fentes du voile (fentes vélaires ou fentes sous-muqueuses) ; il est important de les dépister dès la naissance, car elles peuvent entraîner des troubles fonctionnels.

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May 4, 2017 | Posted by in CHIRURGIE | Comments Off on 3 – Item 35. Anomalies maxillo-faciales et développement buccodentaire

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