Chapitre 3 Gastro-entérologie et nutrition
Gastro-entérologie
Les troubles gastro-intestinaux sont un motif fréquent de fréquentation des cliniques de soins primaires et hospitaliers. Dans les pays développés, ils sont souvent une manifestation de maladies intestinales fonctionnelles. Dans les pays en développement, l’infection est un diagnostic plus fréquent.
Symptômes de maladie gastro-intestinale
Dyspepsie et indigestion
La dyspepsie est une plainte fréquente et décrit une série de symptômes se rapportant à la partie supérieure du tractus gastro-intestinal, comme des douleurs ou brûlures épigastriques, des nausées, des sensations de pesanteur et des éructations. Les patients ont tendance à parler d’indigestion à propos de ces symptômes. Ils sont causés par des troubles œsophagiens, gastriques, pancréatiques ou hépatobiliaires, mais la cause la plus commune est la dyspepsie fonctionnelle (abordée plus loin dans ce chapitre). D’autres causes sont notamment l’ulcère gastroduodénal, une pathologie gastro-œsophagienne ou rarement un cancer gastro-œsophagien. Les examens et le traitement de la dyspepsie sont traités plus loin.
Dysphagie
La dysphagie est la difficulté à avaler, et suggère une anomalie dans le transit œsophagien des liquides ou des solides de la cavité orale à l’estomac. Les causes sont répertoriées dans le tableau 3.1 et les examens diagnostiques sont décrits plus loin.
Troubles de la bouche et de la langue | Pression extrinsèque |
Amygdalite | Ganglions médiastinaux |
Troubles neuromusculaires | Goitre |
Troubles pharyngés | Oreillette gauche élargie |
Paralysie bulbaire | |
Myasthénie | Lésion intrinsèque |
Troubles de la motilité œsophagienne | Sténose bénigne |
Sténose maligne | |
Maladie œsophagienne primitive | Membrane ou anneau œsophagien |
Corps étranger | |
Poche pharyngée | |
Maladie systémique |
* Cause de plus en plus évidente de dysphagie (due à un manque de coordination du muscle longitudinal de l’œsophage ?), caractérisée par une infiltration à éosinophiles de l’œsophage ; le diagnostic repose sur des biopsies de la muqueuse.
Vomissement
Les vomissements surviennent à la suite d’une stimulation d’un centre nerveux, dit centre du vomissement, situé dans la formation réticulée du bulbe rachidien. Le déclenchement dépendrait de l’activation de zones chémoréceptrices dans le plancher du quatrième ventricule ou d’afférences vagales de l’intestin. Les nausées et vomissements sont associés à de nombreuses affections gastro-intestinales, mais en l’absence de douleurs abdominales, elles ont souvent une origine autre que gastro-intestinale. Une atteinte du système nerveux central (SNC), par exemple une augmentation de la pression intracrânienne ou une migraine, l’excès d’alcool ou de drogues (en particulier certains agents chimiothérapeutiques), des troubles métaboliques (par exemple urémie et acidocétose diabétique) ainsi que la grossesse peuvent être en cause. Les nausées et vomissements persistants sans aucun autre symptôme ont souvent une origine fonctionnelle (voir plus loin).
Flatulence
La flatulence est due à la production de gaz gastro-intestinaux. Elle se manifeste par des éructations, de la distension abdominale et l’émission anale, volontaire ou involontaire, de ces gaz. Elle est rarement le signe d’une maladie grave.
Diarrhée et constipation
Ces plaintes sont communes et généralement non liées à une maladie grave. La diarrhée implique le passage de quantités accrues de selles molles (poids des selles > 250 g/24 h) (voir plus loin pour plus de détails). Cela doit être distingué de l’élimination fréquente de petites quantités de selles (que les patients considèrent souvent comme de la diarrhée), couramment associée à des troubles fonctionnels intestinaux. Les démarches diagnostiques et thérapeutiques sont décrites plus loin. En raison de variations individuelles considérables, la constipation est difficile à définir, mais ce terme désigne généralement la rareté des défécations (< deux fois par semaine) ou l’expulsion difficile de selles dures.
Stéatorrhée
La stéatorrhée est l’excrétion de selles pâles et volumineuses qui contiennent des matières grasses (> 17 mmol ou 6 g par jour). Elle indique une malabsorption des graisses en raison d’une maladie de l’intestin grêle, du pancréas (déficit en lipase) ou d’un syndrome hépatobiliaire cholestatique (manque de sels biliaires). Les selles sont nauséabondes, flottent souvent en raison de leur contenu en graisses et sont difficiles à évacuer.
Douleurs abdominales
Le tableau 3.2 énumère les causes les plus fréquentes des douleurs abdominales et leurs localisations habituelles. La douleur abdominale se manifestant comme un abdomen aigu est également décrite plus loin dans ce chapitre.
Épigastrique | Bas de l’abdomen |
Ulcère gastroduodénal | Douleur fonctionnelle |
Dyspepsie fonctionnelle | Diverticulite |
Cancer gastrique | Appendicite |
Pancréatite | Gynécologique : salpingite, kyste/cancer de l’ovaire |
Cancer du pancréas | |
Haut de l’abdomen | Grossesse extra-utérine |
Hépatite | Système rénal et urinaire (voir chap. 9) |
Congestion hépatique | |
Pancréatite | |
Douleur biliaire | Maladie intestinale inflammatoire |
Abcès sous-diaphragmatique | Diffuse ou localisation variée |
Douleur fonctionnelle | Gastro-entérite |
Abcès ou infarctus splénique | Ischémie mésentérique |
Cardiaque (myocardite, ischémie) | Occlusion intestinale |
Pneumonie | Péritonite |
Rupture d’anévrisme aortique | |
Métabolique (ACD, porphyrie) | |
Fièvre méditerranéenne familiale | |
Zona (la douleur précède l’éruption) |
ACD : acidocétose diabétique.
Examens en cas de maladie gastro-intestinale
Outre les tests sanguins, qui comprennent souvent la sérologie cœliaque, l’endoscopie et l’imagerie radiologique sont les examens les plus communs en cas de troubles gastro-intestinaux. Certains centres recherchent des marqueurs fécaux de l’inflammation intestinale et des lésions tissulaires, par exemple la calprotectine fécale. Cela leur permet de distinguer, avec précision, une affection organique d’une maladie fonctionnelle non inflammatoire.
Endoscopie
L’endoscopie digestive est généralement effectuée en ambulatoire. Ces examens exigent un consentement éclairé écrit. Une biopsie de la muqueuse fait souvent partie de l’examen ; si un cancer est soupçonné, il faut prélever des biopsies multiples (8 à 10) afin de réduire le risque d’un résultat faussement négatif dû à des prélèvements hors de la tumeur.
Œsophagogastroduodénoscopie (OGD, gastroscopie)
Un endoscope souple est passé par la bouche dans l’œsophage, l’estomac et le duodénum après pulvérisation d’un anesthésique local dans le pharynx et/ou une légère sédation par du midazolam intraveineux. Les patients doivent rester à jeun durant 6 heures avant l’intervention et ne doivent pas conduire pendant 24 heures après la sédation intraveineuse. L’OGD est pratiquée lors d’une perte de poids, de dyspepsie, de dysphagie et d’anémie ferriprive. Des biopsies duodénales peuvent également servir au diagnostic de maladie cœliaque. Quant aux indications thérapeutiques, elles comprennent l’arrêt d’un saignement gastro-intestinal supérieur, la dilatation d’une sténose œsophagienne, et l’insertion d’une endoprothèse comme traitement palliatif d’un cancer œsophagien.
Sigmoïdoscopie
Un instrument rigide permet l’examen du rectum et du sigmoïde distal, alors que qu’un endoscope souple donne un accès visuel à l’ensemble du côlon gauche. L’intestin est préparé par un ou deux lavements au phosphate ; une sédation est rarement nécessaire.
Coloscopie
Cet examen permet la visualisation de l’ensemble du côlon et de l’iléon terminal. Afin que la visibilité soit assurée, les matières solides de l’intestin seront éliminées par l’ingestion préalable de liquide permettant un lavage colique. Une analgésie intraveineuse (avec la péthidine) et une sédation (avec le midazolam) sont habituellement nécessaires. La coloscopie est indiquée en cas de changements dans les habitudes de défécation, de saignement rectal ou pour le dépistage du cancer colorectal. Elle peut également être thérapeutique, en servant à la résection de polypes (polypectomie) ou à la diathermie de lésions hémorragiques comme une angiodysplasie. Les complications de la coloscopie, avec ou sans polypectomie, sont une perforation intestinale, des saignements et, en raison de la sédation, une dépression respiratoire et de l’hypotension.
Examen de l’intestin grêle
La longueur de l’intestin grêle (6 à 7 mètres) limite le passage des endoscopes habituels en raison des boucles et de l’inconfort pour le patient.
• L’entéroscopie permet la visualisation jusqu’à environ 80 à 100 cm au-delà du duodénum. L’intestin grêle peut être examiné sur toute sa longueur par entéroscopie à double ballon, mais cette technique est limitée à quelques centres spécialisés.
• La capsule vidéo-endoscopique est une technique non invasive d’examen de l’intestin grêle. Après une nuit de jeûne, la capsule est avalée et les images sont enregistrées par des capteurs et un enregistreur porté sur une ceinture abdominale.
Imagerie
Radiographies
Des radiographies simples du thorax et de l’abdomen s’imposent en cas d’abdomen aigu. Elles peuvent montrer une poche d’air formée à la suite d’une perforation viscérale, des boucles intestinales élargies en cas d’occlusion intestinale et une dilatation du côlon chez un patient souffrant de colite ulcéreuse sévère. La calcification du pancréas (juste à gauche de L1) indique une pancréatite chronique ; une accumulation fécale s’observe en cas de constipation.
Ultrasons
L’échographie transabdominale est utile pour la visualisation du foie, de la vésicule biliaire, des voies biliaires et des reins. Elle est couramment pratiquée en cas de tests hépatiques anormaux, d’hépatomégalie et de masse abdominale. Elle convient également pour la détection de l’épaississement de la paroi intestinale et pour déterminer l’étendue des segments impliqués dans la maladie de Crohn, mais n’est pas un moyen de diagnostic spécifique de cette maladie. Elle est également utilisée pour guider l’aiguille lors d’une biopsie hépatique ou d’une masse solide, ainsi que pour le drainage de l’ascite et d’un abcès ou d’un empyème.
L’échographie endoscopique, ou écho-endoscopie, se pratique au moyen d’un endoscope qui se termine par une sonde à ultrasons.
L’échographie endoanale et endorectale implique l’introduction d’un transducteur à ultrasons dans le rectum. Elle est utilisée pour l’évaluation des sphincters anaux, en particulier chez les patients souffrant d’incontinence fécale, et pour la stadification des cancers du rectum.
Tomodensitométrie (TDM)
En cas de maladie gastro-intestinale, on recourt volontiers à la TDM (voir le Glossaire), en particulier pour la stadification d’un cancer intra-abdominal et pour le diagnostic et l’évaluation d’un abdomen aigu, dû soit à une perforation viscérale, soit à une inflammation, par exemple une appendicite. Elle permet aussi de localiser et d’identifier la cause d’une obstruction intestinale et de détecter des calculs rénaux. La colographie par TDM, ou coloscopie virtuelle, offre une vue intraluminale du côlon rempli d’air, simulée par ordinateur. Comme la coloscopie conventionnelle, elle nécessite une préparation intestinale complète (voir en fin de chapitre) et la distension du côlon par de l’air. Les images obtenues peuvent mettre en évidence des polypes (fig. 3.1) et un cancer, mais des biopsies ne peuvent être prélevées, ni les polypes retirés. Elle est principalement utilisée lorsque la coloscopie conventionnelle ne peut être effectuée en raison de l’intolérance du patient ou de difficultés techniques. Une TDM abdominale et pelvienne, sans préparation, s’avère utile pour la détection d’un cancer du côlon chez un patient fragile ou âgé qui ne peut tolérer la préparation de l’intestin requise pour une colographie conventionnelle ou par TDM.
Figure 3.1 Polypes coliques visibles par coloscopie (Ai–iii) et (B) colographie par TDM.
Le cliché Aii a été pris après résection endoscopique des polypes visibles sur Ai.
Imagerie par résonance magnétique (IRM)
L’IRM (voir le Glossaire) est utilisée notamment pour l’évaluation du stade de la maladie de Crohn périanale ou d’un cancer rectal et pour l’examen de l’intestin grêle ou du pancréas, ainsi que dans les cas de maladie hépatobiliaire (cholangiopancréatographie IRM).
Tomographie par émission de positons (TEP)
La TEP (voir le Glossaire) est utilisée avec d’autres techniques d’imagerie comme la TDM dans la recherche d’un cancer éventuel et pour la détection de métastases provenant d’une tumeur connue.
Test de physiologie œsophagienne
L’insertion par le nez d’une sonde jusqu’au bas de l’œsophage permet la mesure continue, durant 24 heures, de l’acidité (pH-métrie) et du volume (mesure d’impédance) du reflux de contenu gastrique. Les données sont saisies sur un appareil porté à la ceinture, et transférées à un ordinateur à la fin de la période de 24 heures. On enregistre ainsi la fréquence et la durée des épisodes de reflux et la corrélation avec les symptômes. Le test est indiqué avant le traitement chirurgical du reflux ou en cas de diagnostic difficile.
Bouche
Les affections buccales sont fréquentes et souvent bénignes, bien qu’elles puissent parfois être la cause de symptômes graves.
Ulcérations buccales
Non infectieuses
• Les aphtes récurrents sont la cause la plus fréquente des ulcérations buccales ; au moins 20 % de la population en souffrent. Dans la plupart des cas, l’étiologie est inconnue. L’affection se caractérise par le développement récurrent d’ulcères douloureux guérissant spontanément. Le palais est en général indemne. Les corticoïdes topiques soulagent les symptômes, mais n’ont aucun effet sur l’histoire naturelle. Dans quelques cas, les ulcères sont associés à un traumatisme ou une maladie gastro-intestinale et systémique, par exemple une anémie, une maladie inflammatoire de l’intestin, la maladie cœliaque, la maladie de Behçet, le syndrome de Reiter, le lupus érythémateux disséminé, le pemphigus, la pemphigoïde bulleuse ou la prise de certains médicaments.
• Le carcinome spinocellulaire se présente comme un ulcère indolent, généralement sur les bords latéraux de la langue ou du plancher de la bouche. Les facteurs étiologiques sont le tabac (fumé ou mastiqué) et l’alcool. Le traitement est la chirurgie, la radiothérapie ou une combinaison des deux.
Taches blanches buccales
Les taches blanches buccales sont associées au tabagisme, aux infections à Candida, au lichen plan, à un traumatisme et à la syphilis. On utilise le terme de leucoplasie lorsqu’ aucune cause locale ne peut être trouvée pour expliquer les taches ou plaques blanches (diagnostic d’exclusion). Une leucoplasie est parfois une lésion précancéreuse ; aussi, afin d’exclure une tumeur maligne, il faut biopsier ces taches blanches. Une leucoplasie velue est une tache blanche due au virus d’Epstein-Barr ; elle se forme sur le côté de la langue et est quasi pathognomonique de l’infection par le VIH ; elle n’est pas précancéreuse.
Glossite atrophique
Des patients carencés en fer, vitamine B12 ou folate peuvent avoir une langue lisse, douloureuse, avec perte des papilles filiformes.
Langue géographique
La glossite exfoliatrice marginée affecte 1 à 2 % de la population et se manifeste par des zones discrètes de dépapillation sur le dos de la langue. Celles-ci peuvent être asymptomatiques ou douloureuses. L’étiologie est inconnue et il n’existe aucun traitement spécifique.
Maladies parodontales
Les saignements gingivaux sont le plus souvent causés par une gingivite, une maladie inflammatoire liée à la plaque dentaire. Le saignement peut également être dû à des affections générales comme des troubles de coagulation ou une leucémie. La gingivite aiguë ulcéreuse (angine de Vincent) est caractérisée par des ulcères en forme de cratères et des saignements qui touchent les papilles interdentaires ; les lésions se propagent latéralement le long du rebord gingival. On pense qu’il s’agirait d’une infection à spirochètes favorisée par la malnutrition ou une immunodépression. Le traitement est le métronidazole oral et une bonne hygiène buccodentaire.
Troubles des glandes salivaires
La xérostomie (sécheresse buccale) peut être causée par l’anxiété, des médicaments tels que les antidépresseurs tricycliques, le syndrome de Sjögren et la déshydratation. Le virus des oreillons est responsable de parotidite et des staphylocoques ou streptocoques peuvent également infecter les glandes salivaires. Une lithiase peut se former, habituellement dans le canal de la glande sous-maxillaire, et provoquer un gonflement douloureux de la glande, avant ou pendant la mastication. Parmi les glandes salivaires, c’est dans la parotide que les tumeurs se développent le plus fréquemment, mais elles sont généralement bénignes (par exemple adénome pléomorphe. Le traitement consiste en une résection chirurgicale. Si le nerf crânien VII est impliqué, il faut suspecter la nature maligne de la tumeur.
Œsophage
Les symptômes œsophagiens sont la dysphagie, les brûlures d’estomac, les régurgitations et les douleurs à la déglutition.
• La dysphagie (déglutition difficile) a des causes mécaniques et neuromusculaires (tableau 3.1). Une brève histoire de dysphagie progressive d’abord pour les solides puis pour les liquides est évocatrice d’une sténose mécanique. Une gastroscopie s’impose d’urgence (voir plus haut), notamment pour rechercher une sténose œsophagienne maligne. Une gorgée barytée est l’examen de première ligne le plus indiqué quand les antécédents révèlent que la dysphagie pour les solides et liquides est apparue lentement, et suggèrent de la sorte un trouble de la motilité comme l’achalasie. Une manométrie œsophagienne peut ensuite être nécessaire.
• On parle de brûlure d’estomac lorsque la douleur est rétrosternale ou épigastrique ; elle est produite par le reflux d’acide gastrique dans l’œsophage. Elle peut irradier vers la gorge et être confondue avec une douleur thoracique d’origine cardiaque (voir chap. 10). Elle est souvent aggravée par la flexion ou la position couchée ; elle est soulagée par des antiacides.
• La régurgitation est le reflux spontané du contenu œsophagien dans la bouche et le pharynx. Elle survient en cas de reflux gastro-œsophagien ou de sténose œsophagienne.
• L’odynophagie est une douleur durant la déglutition notamment d’alcool et d’un liquide chaud. Elle suggère une inflammation œsophagienne (œsophagite) en raison d’un reflux gastro-œsophagien, d’une infection œsophagienne, par exemple par le virus herpès simplex ou Candida, ou de médicaments tels que le potassium à libération lente ou les bisphosphonates.
Reflux gastro-œsophagien (RGO)
Le reflux du contenu gastrique dans l’œsophage est un événement normal. Les symptômes ne se manifestent que lorsque le contact du contenu gastrique avec la muqueuse œsophagienne est prolongé.
Examens
La gastroscopie peut montrer une œsophagite (érythème muqueux, érosions et ulcérations), une hernie hiatale ou l’œsophage de Barrett. La muqueuse œsophagienne peut être normale chez les patients souffrant de reflux.
Soins
• Les antiacides à base d’alginate sont habituellement les traitements de première ligne ; ils empêchent le reflux en couvrant de mousse le contenu gastrique.
• Les antagonistes des récepteurs H2 (ranitidine par exemple) améliorent les symptômes des brûlures d’estomac.
• Les agents prokinétiques tels que le métoclopramide et la dompéridone sont parfois utiles.
• Les IPP (par exemple oméprazole, ésoméprazole, lansoprazole, pantoprazole) inhibent l’hydrogène–potassium ATPase gastrique et bloquent la sécrétion d’acide. Ce sont de puissants agents bloquants de la production d’acide et des médicaments de choix pour tous les cas, sauf les plus bénins. Étant donné la propension à la rechute des symptômes de reflux, maintenir un traitement anti-acide est souvent nécessaire. Dans ce cas, l’objectif est d’atteindre la dose minimale nécessaire pour contrôler les symptômes (step-down ou démarche descendante).
• La chirurgie peut être nécessaire pour les quelques patients qui continuent à souffrir malgré un traitement médical complet, ou chez les patients jeunes chez qui les symptômes reviennent rapidement à l’arrêt du traitement. Par laparoscopie, on suture le fundus de l’estomac autour de l’œsophage inférieur afin de produire une valve antireflux (fundoplicature de Nissen). Les complications propres à cette intervention sont la dysphagie et les ballonnements.
Complications
Formation d’une sténose œsophagienne
La sténose se manifeste par une aggravation progressive de la dysphagie. Elle est traitée par dilatation endoscopique et par la prise d’un IPP en permanence. Un RGO chronique peut également favoriser le développement d’un anneau de Schatzki (sténose localisée à la jonction gastro-œsophagienne), qui se manifeste aussi par de la dysphagie.
Œsophage de Barrett
L’œsophage de Barrett est défini par le remplacement de l’épithélium pavimenteux stratifié qui tapisse normalement l’œsophage distal par un épithélium cylindrique anormal (métaplasie cylindrique intestinale). Il se développe en réaction à un reflux acide de longue date, et est irréversible. Le diagnostic est fondé sur les aspects endoscopiques et des biopsies de l’épithélium cylindrique ; l’épithélium, de pâle et brillant qu’il était à l’état normal, est devenu rougeâtre. L’œsophage de Barrett peut dégénérer en adénocarcinome. Les patients atteints de cette maladie sont traités par un IPP et font l’objet d’une surveillance endoscopique tous les 2 ans, avec de multiples biopsies qui permettent de suivre la dysplasie et l’éventuel développement d’un carcinome. La détection et le traitement de l’œsophage de Barrett sont des matières controversées et mouvantes. Le dépistage endoscopique de l’œsophage de Barrett est généralement recommandé chez les patients qui souffrent de brûlures d’estomac depuis plus de 10 ans. Une dysplasie de haut grade (confirmée par deux pathologistes) qui apparaît au cours du suivi endoscopique constitue un risque significatif de cancer ; dans ce cas, les options thérapeutiques comprennent une œsophagectomie (pour un patient jeune et solide), une résection endoscopique des muqueuses (pour une zone localisée de haute dysplasie) ou une ablation endoscopique des tissus dysplasiques (thérapie photodynamique ou par radiofréquence). Les patients atteints de dysplasie de bas grade sont soumis à une surveillance endoscopique plus intensive, tous les 6 à 12 mois.
Achalasie
Cette affection, d’étiologie inconnue, se manifeste par une altération du transit œsophagien liée à un trouble du péristaltisme et un manque de relaxation du sphincter œsophagien inférieur.
Examens
• Le premier examen à demander est la gorgée barytée ; elle montre un œsophage dilaté avec une extrémité progressivement effilée (difformité en bec). Le péristaltisme est absent, mais parfois surviennent des contractions du corps œsophagien asynchrones et sans but.
• La manométrie œsophagienne confirme le diagnostic. elle démontre l’absence de péristaltisme et de relâchement du sphincter inférieur à la déglutition.
• Une gastroscopie peut être nécessaire afin d’exclure un cancer de l’œsophage, qui peut produire des symptômes similaires et une pseudoachalasie aux rayons X.
• La radiographie thoracique n’est pas nécessaire pour le diagnostic. Elle peut montrer un œsophage dilaté avec un niveau liquide derrière le cœur. L’ombre gazeuse du fundus est absente.
Sclérodermie systémique
Chez la plupart des patients atteints de sclérodermie systémique, l’œsophage est atteint. La couche musculaire lisse est remplacée par du tissu fibreux et le tonus du sphincter œsophagien inférieur est réduit, ce qui entraîne un RGO. Les symptômes sont dus à une motilité moindre et au reflux, qui conduit à une œsophagite et à des sténoses. Aussi, le traitement est celui du reflux et de la prévention de sténose.
Autres troubles de la motilité œsophagienne
La manométrie œsophagienne permet d’en distinguer trois : le spasme œsophagien diffus (contractions simultanées dans l’œsophage distal), l’œsophage casse-noisettes (ondes péristaltiques de grande amplitude) et le sphincter œsophagien inférieur hypertendu (élévation de la pression au repos). Les patients se plaignent de douleurs thoraciques et de dysphagie ; des anomalies peuvent être détectées par la gorgée barytée (aspect en tire-bouchon dans le spasme œsophagien diffus) et par manométrie. Les nitrates et les inhibiteurs calciques, par exemple la nifédipine orale, atténuent parfois les symptômes. Le traitement du RGO peut aider.
Hernie hiatale
Une partie de l’estomac passe à travers le hiatus œsophagien du diaphragme.
• La hernie par glissement représente plus de 95 % des cas. La jonction gastro-œsophagienne glisse à travers le hiatus et reste au-dessus du diaphragme. Une hernie hiatale par glissement ne cause aucun symptôme, sauf si elle est associée à un reflux.
• Les hernies para-œsophagiennes sont rares. Le fundus gastrique s’enroule à travers le hiatus aux côtés de l’œsophage, la jonction gastro-œsophagienne restant en dessous du diaphragme. Il existe un risque sérieux de complications, notamment de volvulus gastrique (rotation avec étranglement de l’estomac), de saignement et de troubles respiratoires. Elles doivent être traitées chirurgicalement.
Sténoses œsophagiennes bénignes
Les causes varient géographiquement ; dans les pays développés, la sténose peptique bénigne secondaire à un RGO de longue date est la cause la plus fréquente. D’autres causes sont les séquelles de l’ingestion de produits corrosifs, de la radiothérapie, d’un traitement endoscopique des varices œsophagiennes ou d’un maintien prolongé d’une sonde nasogastrique. La dysphagie est le principal symptôme ; le traitement est une dilatation endoscopique, la prise d’un IPP et, parfois, la chirurgie.
Perforation de l’œsophage
Une perforation iatrogène survient après dilatation endoscopique d’une sténose œsophagienne (généralement maligne) ou comme traitement de l’achalasie, plus rarement après placement d’une sonde nasogastrique.
Tumeurs malignes œsophagiennes
Épidémiologie et facteurs étiologiques
L’incidence de l’épithélioma spinocellulaire est de 5 à 10 pour 100 000 au Royaume-Uni, mais à l’échelle mondiale, elle varie grandement, étant particulièrement élevée en Chine et dans certaines régions d’Afrique et d’Iran. Ce cancer est plus fréquent dans le groupe d’âge de 60 à 70 ans. Les principaux facteurs de risque sont le tabagisme et la consommation excessive d’alcool. D’autres facteurs de risque sont importants dans certaines régions, en liaison notamment avec une forte consommation de poisson salé et de légumes marinés et l’ingestion d’aliments et de boissons très chaudes. Une maladie œsophagienne préexistante (achalasie et sténoses caustiques) et une maladie cœliaque augmentent également le risque.
L’adénocarcinome fait suite à la métaplasie de Barrett (voir plus haut). Le tabagisme et l’obésité sont des facteurs de risque.
Examens
• Le diagnostic repose sur la gastroscopie et la biopsie tumorale. Une gorgée barytée montrera la zone rétrécie, mais ne permet pas le prélèvement de biopsie.
• La stadification s’effectue d’abord par TDM thoracique et abdominale à la recherche de métastases à distance. Les patients sans évidence de maladie métastatique et qui sont potentiellement curables subissent alors une échographie endoscopique qui permet la stadification locale de la tumeur par évaluation de l’invasion pariétale et de l’extension ganglionnaire. La tomographie par émission de positons est plus sensible que la TDM pour détecter les métastases à distance. Une laparoscopie peut être indiquée pour la détection d’une maladie péritonéale occulte.
Estomac et duodénum
Les principales fonctions de l’estomac sont les suivantes :
• émulsifier les graisses et fragmenter mécaniquement la nourriture ;
• servir de réservoir alimentaire ;
• sécréter le facteur intrinsèque, nécessaire à l’absorption de la vitamine B12, (voir chap. 5) et l’acide gastrique par les cellules pariétales du fundus. L’acide gastrique déclenche le processus de digestion protéique et exerce un rôle protecteur en détruisant les bactéries. La sécrétion d’acide est amplifiée par stimulation du nerf vague, par l’histamine et la gastrine. Elle est inhibée par la somatostatine provenant des cellules D antrales ;
• la sécrétion de mucus et de pepsinogène par les cellules principales du fundus ; l’acide gastrique convertit le pepsinogène en pepsine, qui digère les protéines.
Infection à Helicobacter pylori
H. pylori est une bactérie à Gram négatif, de forme spiralée, productrice d’uréase, trouvée principalement dans l’antre gastrique et dans les zones de métaplasie gastrique dans le duodénum. Elle est étroitement associée à une gastrite chronique active, aux ulcères gastrique et duodénal, au cancer gastrique et au lymphome gastrique à cellules B (voir plus loin). La plupart des patients infectés sont toutefois asymptomatiques.
Diagnostic de l’infection
Les examens peuvent être invasifs ou non (tableau 3.3). Certains patients devront subir une endoscopie avec des biopsies antrales.
Ulcère gastroduodénal
Un ulcère est dit peptique lorsqu’il affecte une muqueuse exposée à une agression acide. C’est dans l’estomac et le duodénum proximal que la plupart se développent.
Étiologie
H. pylori et les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ainsi que l’aspirine sont la cause de la plupart des cas. L’administration simultanée de corticoïdes et d’AINS augmente le risque d’ulcère. Le tableau 3.4 reprend les mécanismes potentiels expliquant l’induction d’ulcère par H. pylori. On pense que la réduction de la résistance de la muqueuse gastrique est la cause principale d’ulcère gastrique puisque, contrairement à ce qui prédispose à l’ulcère duodénal, la sécrétion d’acide gastrique est réduite. L’aspirine et les AINS causent des ulcères, au moins en partie, par réduction de la production de prostaglandines (par inhibition de la cyclooxygénase-1) qui assurent la protection des muqueuses du tractus gastro-intestinal supérieur. Des causes moins fréquentes d’ulcère gastroduodénal sont l’hyperparathyroïdie, le syndrome de Zollinger-Ellison (voir le tableau 4.15), une insuffisance vasculaire, la sarcoïdose et la maladie de Crohn.
Sécrétion accrue d’acide gastrique due à: – une sécrétion accrue de gastrine – une augmentation des cellules pariétales – une gastrite antrale diminuant la production de somatostatine
|
Examens
Les patients de moins de 55 ans avec des symptômes de type ulcère devraient subir des tests non invasifs pour infection à H. pylori (tableau 3.3) ; une endoscopie digestive haute n’est généralement pas nécessaire (voir traitement de la dyspepsie plus loin). Chez les patients qui subissent une endoscopie et se trouvent avoir un ulcère gastrique, plusieurs biopsies doivent être prélevées à partir du centre et du bord de l’ulcère, car il est souvent impossible de distinguer à l’œil nu un ulcère bénin d’un malin. Un repas baryté est utile si une obstruction gastrique est suspectée.
Soins
Ulcères associés à H. pylori
Les schémas thérapeutiques (voir plus haut) qui ont éliminé H. pylori entraînent des taux de cicatrisation de plus de 90 % et préviennent les récidives. Il n’est généralement pas nécessaire de poursuivre le traitement antisécrétoire (avec un IPP ou un antagoniste des récepteurs H2), à moins qu’une hémorragie ou une perforation ne complique l’ulcère. Cette stratégie thérapeutique est indiquée chez tous les patients atteints d’une maladie peptique associée à H. pylori. L’éradication est confirmée par un test respiratoire à l’urée ou le dépistage de l’antigène fécal chez les patients qui demeurent symptomatiques ou qui ont eu une complication ulcéreuse.
Ulcères gastroduodénaux sans H. pylori
Ces ulcères sont habituellement liés à la prise d’aspirine ou d’AINS. Un IPP avec, si possible, arrêt de l’aspirine ou de l’AINS, est un traitement efficace. Après cicatrisation de l’ulcère, la prise d’AINS ne peut être poursuivie qu’avec un IPP prophylactique, ou l’AINS doit être remplacé par un inhibiteur sélectif de la cyclo-oxygénase-2.
Complications
Perforation
Une perforation est rare. L’ulcère duodénal perfore plus fréquemment que l’ulcère gastrique, généralement dans la cavité péritonéale. Le traitement est la fermeture chirurgicale de la perforation et le drainage de l’abdomen. H. pylori devrait ensuite être éradiqué. Un traitement conservateur avec perfusion intraveineuse et antibiotique peut être indiqué chez les patients âgés ou très malades.
Obstruction gastrique
L’obstruction gastrique due à un ulcère est devenue rare, le carcinome étant la cause la plus fréquente. L’obstruction survient en raison d’un œdème ou de cicatrices développées lors de la guérison. Des vomissements en jet et copieux constituent le principal symptôme ; un clapotis peut être détectable cliniquement. En raison de la perte d’acide, une alcalose métabolique peut se développer. En cas d’ulcère gastroduodénal, le traitement conservateur, c’est-à-dire un IPP associé à l’aspiration nasogastrique et au remplacement des liquides et des électrolytes, suffira généralement à résorber l’œdème. La chirurgie est rarement nécessaire.
Traitement de la dyspepsie
Chez la plupart des jeunes souffrant de dyspepsie, il est rare de trouver une pathologie gastro-intestinale grave. Aussi, vu l’étroite association d’H. pylori à la maladie ulcéreuse et la capacité de détecter H. pylori par des méthodes non invasives, l’endoscopie est inutile chez la plupart des patients. La figure 3.2 décrit le traitement de la dyspepsie.
Gastropathie et gastrite
Gastropathie est le terme qui désigne une altération de la muqueuse gastrique consistant en lésions épithéliales avec troubles de la régénération cellulaire, la réaction inflammatoire étant faible ou absente. La gastrite est une inflammation de la muqueuse gastrique. Cette distinction a causé beaucoup de confusion, puisque « gastrite » est le terme souvent utilisé pour décrire les caractéristiques endoscopiques ou radiologiques de la muqueuse gastrique plutôt que des aspects histologiques spécifiques.
Gastropathie
La cause la plus fréquente de gastropathie est la prise d’aspirine ou d’autres AINS. Ces médicaments épuisent les prostaglandines de la muqueuse, en inhibant la voie de la cyclo-oxygénase, ce qui conduit aux dommages tissulaires. D’autres causes sont des infections, par exemple par le cytomégalovirus ou le virus herpès simplex, ainsi que l’alcool en forte concentration. Des érosions gastriques peuvent également survenir après un stress grave (ulcère de stress), des brûlures (ulcère de Curling) et une maladie rénale ou hépatique. Les symptômes comprennent une indigestion, des vomissements et des hémorragies, mais la relation avec les observations endoscopiques et pathologiques est faible. Des érosions (excoriations superficielles de la muqueuse < 3 mm) et des hémorragies sous-épithéliales sont fréquemment constatées à l’endoscopie. Pour le traitement, un IPP est associé, si possible, à la suppression de la cause. Pour prévenir de nouvelles lésions chez les patients qui continuent à prendre de l’aspirine ou un AINS, un traitement prophylactique s’impose.
Gastrite
La cause la plus fréquente d’une gastrite est l’infection à H. pylori. D’autres causes sont la gastrite auto-immune (la cause de l’anémie pernicieuse associée à des anticorps dirigés contre les cellules pariétales gastriques et contre le facteur intrinsèque), les virus et le reflux duodénogastrique. La gastrite est un diagnostic histologique ; elle est généralement découverte fortuitement lors d’une biopsie de la muqueuse gastrique prélevée par endoscopie à des fins histologiques. Elle est classée comme aiguë ou chronique. L’inflammation aiguë est associée à une infiltration de neutrophiles, tandis que l’inflammation chronique est caractérisée par des cellules mononucléées, principalement des lymphocytes, des plasmocytes et des macrophages. La gastrite est généralement asymptomatique ; la question de savoir si la gastrite à H. pylori produit elle-même une dyspepsie fonctionnelle est controversée (voir plus loin). À l’endoscopie, la muqueuse peut paraître rouge ou normale. Aucun traitement spécifique n’est requis, bien que l’éradication de H. pylori soit souvent entreprise.
Cancer gastrique
Épidémiologie
Le cancer gastrique est le quatrième cancer le plus courant dans le monde entier et la deuxième cause de mortalité liée au cancer. L’incidence augmente avec l’âge et les hommes sont plus fréquemment atteints. La fréquence varie à travers le monde, étant plus grande au Japon et au Chili, et relativement moindre aux états-Unis. Bien que l’incidence décroisse globalement dans le monde entier, la fréquence des cancers gastriques proximaux augmente dans les pays occidentaux.
Étiologie
L’étiologie n’est pas connue ; l’infection à H. pylori est impliquée, en provoquant une gastrite chronique qui, chez certains individus, conduit à une gastrite atrophique et à une métaplasie intestinale précancéreuse. Les autres facteurs de risque relèvent du style de vie : tabagisme, alimentation pauvre en fruits et légumes ou riche en aliments fumés, conservés et salés. L’anémie pernicieuse, des antécédents familiaux de cancer gastrique et les suites d’une gastrectomie partielle sont d’autres facteurs.
Caractéristiques cliniques
Une douleur semblable à celle de l’ulcère gastroduodénal est le symptôme le plus commun. Lorsque la maladie est plus avancée, les nausées, l’anorexie et la perte de poids sont fréquentes. Les tumeurs situées près du pylore obstruent le transit, alors que celles du cardia causent des vomissements et de la dysphagie. Près de 50 % des patients ont une masse palpable épigastrique, et un ganglion lymphatique est parfois détecté dans le creux susclaviculaire (nœud de Virchow). Des métastases hépatiques et péritonéales causent de l’ascite et une hépatomégalie. Les manifestations cutanées associées à un cancer, telles que la dermatomyosite (voir chap. 7) et l’acanthosis nigricans (voir chap. 18), sont parfois associées.
Autres tumeurs gastriques
• Les tumeurs stromales gastro-intestinales (TSGI) constituent le type le plus commun des tumeurs stromales ou mésenchymateuses de l’appareil digestif. Elles surviennent le plus souvent dans l’estomac et l’intestin grêle proximal. Auparavant, elles étaient considérées comme bénignes, mais à long terme, la plupart ont un potentiel malin. Elles sont généralement asymptomatiques et découvertes fortuitement lors d’une endoscopie digestive haute pour dyspepsie. Elles peuvent s’ulcérer et saigner. Le traitement est la résection chirurgicale ou, en cas de tumeur avancée, l’utilisation du médicament imatinib (voir chap. 6).
• Le lymphome gastrique dérive du tissu lymphoïde associé aux muqueuses et est appelé MALTome (pour mucosa associated lymphoid tissue tumour). Le lymphome gastrique se manifeste de la même façon que le carcinome gastrique. La plupart sont associés à l’infection à H. pylori et certains peuvent être traités par la simple éradication de la bactérie. D’autres patients sont traités par la chirurgie ou la chimiothérapie avec ou sans radiothérapie.
• Les polypes gastriques sont peu fréquents et peuvent généralement se régénérer. Les polypes adénomateux sont rares.
Saignements gastro-intestinaux
Saignements gastro-intestinaux supérieurs aigus
Il s’agit d’une urgence fréquente avec un taux global de mortalité de 5 à 12 %. Une hématémèse est le vomissement de sang. Le terme méléna désigne des selles noirâtres (la coloration est due au sang altéré), ce qui, en général, est la conséquence d’un saignement dans un site proximal du jéjunum. Une hémorragie gastro-intestinale supérieure aiguë et massive peut se manifester par la présence de sang frais dans les selles, presque toujours en association avec un choc.
Étiologie
Un ulcère gastroduodénal est la cause la plus fréquente, l’hémorragie étant déclenchée souvent par l’ingestion d’aspirine ou d’AINS (fig. 3.3). L’incidence relative varie en fonction de la population de patients. Les anticoagulants ne causent pas eux-mêmes de saignements, mais ils les aggravent.