CHAPITRE 24 Presbytie et qualité de vie
La presbytie induit un handicap visuel en distance rapprochée chez le sujet emmétrope ou emmétropisé; sa compensation est donc indispensable afin de permettre au sujet vieillissant de recouvrer la lecture de près. L’étudier sous l’angle de la qualité de vie permet de mieux comprendre le retentissement de ce trouble acquis inéluctable de la réfraction et d’éviter de le minimiser par excès même si, étant toujours corrigible, il est bénin par rapport aux pathologies liées à l’âge.
Échelles de qualité de vie
DÉFINITIONS: VALIDITÉ, FIABILITÉ, SENSIBILITÉ, STABILITÉ
Une « échelle » de qualité de vie est un outil ou instrument de mesure qui fournit des indices quantitatifs sous forme de scores. Comment transformer une valeur qualitative multifactorielle et subjective en score chiffré ? C’est à partir de questionnaires explorant différentes « dimensions » de qualité de vie qu’on y parvient. Chaque dimension est explorée par plusieurs items. La conception d’un questionnaire est complexe, faisant appel à différents spécialistes parmi lesquels figurent des médecins, des psychologues, des statisticiens et des méthodologistes [2]. Différentes étapes sont nécessaires pour aboutir à la version définitive d’une échelle grâce à des tests permettant de vérifier ses principaux facteurs de pertinence que sont la validité, la fiabilité, la sensibilité et la stabilité.
La fiabilité signifie la capacité de reproduire les mesures dans des situations comparables.
Il existe deux grands types d’échelles: les échelles génériques et les échelles spécifiques. Les échelles dites « génériques » fournissent des scores de qualité de vie quelle que soit la pathologie et peuvent être utilisées dans une grande variété d’indications. Leurs scores peuvent servir en économie de la santé pour calculer des « utilités ». Une utilité est la traduction chiffrée de la qualité de vie selon une gradation qui est comprise entre la valeur « zéro » (0 correspondant à la mort) et la valeur « un » (1 correspondant à une excellente santé). Ces coefficients sont utilisés lors des évaluations médico-économiques pour pondérer les bénéfices de santé individuels des thérapeutiques — un gain d’années de vie aura un retentissement économique différent selon qu’il s’agira d’années de vie en bonne ou en mauvaise santé. À la différence des échelles génériques, les échelles dites « spécifiques » fournissent des mesures ciblées propres à une maladie ou à un groupe particulier d’états pathologiques.
ÉCHELLES DE QUALITÉ DE VIE EN OPHTALMOLOGIE
ÉCHELLES GÉNÉRIQUES EXPLORANT LES CONSÉQUENCES DES ALTÉRATIONS VISUELLES LIÉES AUX PATHOLOGIES OCULAIRES
Le National Eye Institute Visual Function Questionnaire-51 (NEI-VFQ-51) mesure, en cinquante et un items, la qualité de vie des patients atteints de pathologies oculaires chroniques [20], telles que la cataracte, le glaucome, les dégénérescences maculaires liées à l’âge, la rétinopathie diabétique.
Le National Eye Institute Visual Function Questionnaire-25 (NEI-VFQ-25) est une réduction du NEI-VFQ-51 avec vingt-cinq questions relatives à la qualité de vie en lien avec la fonction visuelle. Cette échelle qui s’applique aux maladies oculaires chroniques semble bien adaptée au glaucome [13, 27]. Il en existe une version française [26]. Elle a été utilisée chez les adolescents et adultes jeunes atteints de cataracte congénitale [14], pour les implants intraoculaires pseudophakes asphériques [16] et pour comparer différents types d’implants multifocaux [1] (cf. infra).
Le Visual Function Index-14 (VF-14) explore les limitations fonctionnelles de quatorze activités quotidiennes liées à la vision. Il a été utilisé pour les maladies rétiniennes [17], les candidats à la greffe de cornée [3], la cataracte et sa chirurgie [32, 37].
ÉCHELLES SPÉCIFIQUES D’UNE PATHOLOGIE OCULAIRE
Le Visual Symptoms and Quality of Life Questionnaire (VSQ) a été proposé pour la chirurgie de la cataracte du second œil [7]; il a été révisé pour améliorer le mode de calcul des scores par analyse de Rasch [10]. À ce propos, Lundström et Pesudovs [19] ont publié une revue générale très complète des questionnaires ayant été utilisés pour évaluer les résultats de la chirurgie de la cataracte, en analysant leurs propriétés psychométriques.
L’ Adult Strabismus-20 (AS-20) a été utilisé chez les patients traités pour strabisme. Il s’est avéré plus sensible dans cette population que l’échelle NEI-VFQ-25 qui est générique, donc non spécifique [11].
ÉCHELLES DE QUALITÉ DE VIE ET RÉFRACTION
Dans une revue mondiale de la littérature scientifique étudiant les résultats du LASIK, Solomon [36] a sélectionné, pour leur niveau de preuve et leur méthodologie, trois cent neuf articles parus dans des revues à comité de lecture entre 1994 et 2008. Sur trois cent neuf articles, seulement quatorze (soit 4,5 %) étudiaient la satisfaction et la qualité de vie, dont une publication française [33]. C’est dire que ces études sont encore peu nombreuses en chirurgie réfractive et encore moins nombreuses, nous le verrons, pour l’exploration des différents moyens de compensation de la presbytie.
QUELLES SONT LES ÉCHELLES DE QUALITÉ DE VIE CORRÉLÉES À LA RÉFRACTION ?
Citons le questionnaire Refractive Status and Vision Profile (RSVP), qui est un des premiers à avoir été appliqué à la chirurgie réfractive [35].
Le National Eye Institute Refractive Error Quality of Life Instrument (NEI-RQL-42) est une échelle qui explore l’impact de la réfraction sur la qualité de vie en quarante-deux questions explorant treize dimensions de qualité de vie [12, 22]. Les scores sont notés sur la valeur maximale de 100. Plus ils sont élevés, plus ils sont favorables à la qualité de vie. Cette échelle a permis de comparer des populations emmétropes à des populations amétropes corrigées par lunettes ou lentilles de contact [24]. Il a également été utilisé pour la chirurgie réfractive [22, 25]. Une traduction adaptée en langue française a été publiée (tableau 24-I et annexe) avec des arguments de validation [6] et appliquée à une population de patients opérée par LASIK [34]. Elle a permis de préciser les différents scores de qualité de vie postopératoires dans une population de trois cent sept sujets, toutes indications confondues. Nous reviendrons plus en détail sur cette échelle et sur ce qu’elle nous enseigne sur l’impact de la presbytie.
Tableau 24-I Dimensions de qualité de vie explorées par l’échelle NEI-RQL-42, traduite et adaptée en langue française.

Le Quality of Life Impact of Refractive Correction (QIRC) a été développé et validé pour les populations nécessitant la correction d’une erreur réfractive par lunettes, lentilles de contact ou chirurgie [28]. Ce questionnaire de vingt items utilise une méthode psychométrique de mesure des différents scores, avec une pondération de leurs valeurs respectives en fonction du niveau d’importance ou de sévérité accordé à chaque item (analyse de Rasch). D’abord utilisé pour comparer des populations amétropes corrigées par lunettes ou lentilles de contact [9], il a été ensuite appliqué pour comparer les trois types de correction réfractive que sont les lunettes, les lentilles de contact et la chirurgie [30]. Les auteurs ont ainsi pu montrer que les patients opérés par chirurgie réfractive présentent des scores de qualité de vie significativement supérieurs que les porteurs de lunettes ou de lentilles de contact. Il est également utilisé pour évaluer les implants multifocaux [21].
Le Contact Lens Impact on Quality of Life (CLIQ) comporte vingt-huit questions. Cette échelle a été développée et validée pour les porteurs de lentilles de contact [29].
Le Myopia-specific Quality of Life Questionnaire (MQLQ) comporte trente-quatre questions étudiant quatre principales dimensions (fonction visuelle, symptômes visuels, vie sociale, psychologie). Il a été développé pour étudier l’effet du LASIK sur une population myope [15] et a confirmé que la correction de la myopie par la chirurgie réfractive améliore la qualité de vie des myopes.
Le Vision Quality of Life Index (VisQoL) est une échelle comportant six questions permettant de façon simple et rapide d’apprécier l’effet des traitements ou moyens de correction destinés à améliorer la vision [23]. Utilisant ce questionnaire, Chen [4] a comparé la qualité de vie de trois groupes de populations: soixante-quatre emmétropes, soixante-six myopes corrigés par lunettes ou lentilles de contact, soixante-cinq myopes corrigés par la chirurgie. La qualité de vie était comparable entre les groupes emmétropes et myopes opérés; elle était significativement meilleure dans ces deux populations que dans le groupe myope corrigé par les moyens optiques.
Qualité de vie et presbytie: échelles utilisées et résultats
L’âge supérieur ou égal à quarante-cinq ans permet généralement de définir la population presbyte. La presbytie est un trouble réfractif particulier qui reste encore mal exploré sur le plan de la qualité de vie. Cette dernière peut être abordée de façon très parcellaire sur la seule dimension de la satisfaction liée à la vision et aux moyens de l’améliorer, ce qui est intéressant mais insuffisant. Dans l’échelle NEI-RQL-42, par exemple, la satisfaction de la correction n’est qu’une des dimensions sur les treize explorées par le questionnaire (tableau 24-I).
QUELLES SONT LES PARTICULARITÉS LIÉES À LA PRESBYTIE ?
L’étude de la presbytie implique en premier lieu une bonne acuité visuelle de loin avec ou sans correction. Mais cette condition minimale n’est certainement pas suffisante. La réfraction influence l’impact de la presbytie qui sera ressentie différemment chez les emmétropes, les myopes et les hypermétropes. Par ailleurs, les comparaisons entre une population adulte non presbyte (âge inférieur à quarante-cinq ans) et une population presbyte (âge supérieur ou égal à quarante-cinq ans) peuvent être à l’origine de nombreux biais. En effet, les attentes et besoins de vision dans ces deux types de populations ne sont pas tout à fait comparables, de même que l’état psychologique. Au sein même de la population presbyte, des différences importantes apparaissent à l’évidence en fonction de l’âge. La réserve d’accommodation encore assez bonne avant cinquante ans, assure une bonne vision en distance intermédiaire (1 mètre); elle s’épuise rapidement chez les plus âgés, ce qui n’est pas sans conséquences pratiques sur les besoins visuels de la vie quotidienne (notamment le travail sur écran). Il conviendrait aussi de discerner sur le plan des attentes, les sujets presbytes encore professionnellement actifs des retraités et, de façon plus générale, prendre en compte le mode de vie individuel privilégiant par exemple la lecture (vision de près) ou les activités sportives (vision de loin). Le niveau d’éducation et le niveau socio-économique sont des facteurs potentiellement influençant. Il faudrait, enfin, différencier les sujets presbytes non encore atteints par les pathologies liées à l’âge, en particulier la cataracte, des autres. Au-delà de l’âge de soixante-dix ans, faire une étude de qualité de vie suffisamment discriminante sur un trouble réfractif aussi singulier que la presbytie devient très complexe dans une population de plus en plus affectée par les pathologies liées à l’âge, qu’elles soient ophtalmologiques ou générales.
LA PRESBYTIE A-T-ELLE UN RETENTISSEMENT SUR LA QUALITÉ DE VIE ?
Dans une étude prospective multicentrique utilisant l’échelle NEI-RQL-42, McDonnell [22] a comparé les scores des treize dimensions de trente-huit sujets emmétropes presbytes âgés de quarante-cinq à soixante et onze ans (moyenne: cinquante-quatre ans), à ceux de soixante-quinze sujets emmétropes adultes non presbytes dont l’âge est compris entre dix-neuf et quarante-quatre ans (moyenne: trente-deux ans). Le groupe plus âgé de sujets presbytes présente des scores moyens plus faibles de façon statistiquement significative dans sept des treize dimensions étudiées (100 représente pour chaque score la valeur maximale associée à la meilleure qualité de vie): « netteté de la vision » (86,90 versus 93,32), « attentes » (53,95 versus 90,54), « vision de près » (81,52 versus 95,89), « fluctuations visuelles diurnes » (76,86 versus 87,44), « symptômes » (78,95 versus 86,15), « dépendance à une correction » (59,54 versus 96,11), « satisfaction de la correction » (82,11 versus 93,14). Un seul score augmente de façon statistiquement significative avec l’âge: il s’agit de la « dépendance à une correction ». Les auteurs de l’étude concluent que la presbytie a un impact défavorable sur la qualité de vie.
Dans une étude clinique transversale portant sur une population de cent dix sujets presbytes corrigés par lunettes, Luo [18] a réalisé une analyse d’utilité. Après les nécessaires explications d’usage et un temps suffisant donné à la réflexion, les patients devaient en particulier répondre à deux questions. La première question était: « Combien d’années estimez-vous qu’il vous reste à vivre ? ». La deuxième question théorique était: « En supposant qu’il existe une technique permettant de vous donner une vision normale de près sans lunettes de façon permanente et définitive mais que cette technique réduise votre espérance de vie, quel est le maximum de temps que vous accepteriez de sacrifier sur cette espérance de vie pour obtenir le bénéfice définitif d’une bonne vision de près sans correction ? » La valeur d’utilité individuelle était calculée en retranchant de 1,0 la valeur du rapport Temps accepté d’être sacrifié/Temps estimé restant à vivre. Par exemple, un sujet estimant avoir une espérance de vie de vingt ans acceptant de sacrifier une année de sa vie pour avoir définitivement une bonne vision de près sans correction permet de calculer une valeur d’utilité individuelle de 0,95 (1,0 –1/20 = 0,95). Pour les cent dix sujets presbytes de l’étude, le temps moyen d’espárance de vie estimé était de 23,4 ans [21,3-25,5]. La moyenne de temps que les sujets acceptaient de sacrifier était de 0,46 an. Sur l’ensemble de cette population, 10 % des sujets étaient prêts à accepter de sacrifier au moins 5 % de leur durée estimée d’espérance de vie. Le score moyen d’utilité dans la population presbyte étudiée était de 0,98 ± 0,086 [0,964-0,996]. L’âge, le sexe, le niveau d’éducation, la situation matrimoniale, la réfraction et le degré de sévérité de la presbytie n’avaient pas de corrélation statistiquement significative avec le score. Avec une « utilité presbytie » de 0,98, un retour à une vision de près normale sans correction (correspondant à une utilité de 1,0), n’apporterait donc que 2 % d’amélioration de qualité de vie. Les auteurs concluent que la presbytie corrigée par lunettes est associée à une réduction modérée de la qualité de vie.
Une autre étude nous informe sur l’impact psychologique de la presbytie. Chen [4] a utilisé l’échelle Vision Quality of Life Index (VisQoL), qui comporte six questions, pour comparer deux groupes de sujets myopes: un groupe de quatre-vingt-seize sujets d’âge inférieur ou égal à quarante ans (non presbytes) et un groupe de quatre-vingt-dix-neuf sujets d’âge supérieur à quarante ans (prépresbytes et presbytes). Le groupe myope presbyte répond défavorablement de façon significative à deux des six questions, exprimant davantage d’appréhensions face au risque d’accident et moins de confiance dans la capacité ressentie à réaliser les tâches de la vie quotidienne.
QUALITÉ DE VIE DES PRESBYTES CORRIGÉS
PRESBYTIE ET MONOVISION
La monovision a été étudiée sur le plan de la qualité de vie chez les sujets phakes. McDonnell [22], utilisant l’échelle NEI-RQL-42, a d’abord comparé les scores moyens des treize dimensions de qualité de vie étudiées par ce questionnaire dans deux groupes de sujets presbytes: un groupe de trente-huit sujets corrigés par monovision (lentilles de contact ou chirurgie) et un groupe de quatre cent quatre-vingt-six sujets amétropes isocorrigés. Les scores moyens étaient plus élevés de façon statistiquement significative (meilleure qualité de vie) dans le groupe monovision pour les trois dimensions: « attentes » (51,97 versus 37,86), « dépendance à une correction » (47,37 versus 25,57), « apparence » (87,98 versus 79,15). Les auteurs ont ensuite, dans la même étude, comparé les scores moyens des treize dimensions dans le même groupe de sujets presbytes corrigés par monovision (n = 38) et dans un groupe de sujets emmétropes non presbytes (âge inférieur à quarante-cinq ans) (n = 75). Des différences statistiquement significatives sont apparues dans onze des treize dimensions, mais sept d’entre elles présentaient des écarts importants avec des scores inférieurs (signifiant une moins bonne qualité de vie) dans le groupe monovision: « netteté de la vue » (77,41 versus 93,32), « attentes » (51,97 versus 90,54), « vision de près » (80,48 versus 95,89), « fluctuations diurnes » (66,34 versus 87,44), « brouillard ou halos » (67,76 versus 91,22), « dépendance à une correction » (47,37 versus 96,11), « satisfaction » (76,32 versus 93,14). Les auteurs concluent que la monovision améliore certaines dimensions de qualité de vie chez les sujets presbytes, sans pouvoir prétendre apporter la même qualité de vie que chez les sujets non presbytes.
Les effets de la monovision sur la qualité de vie ont aussi été étudiés chez les patients opérés de cataracte. Finkelman, dans une étude prospective [8], a étudié la satisfaction de vingt-six sujets (cinquante-deux yeux) opéré de cataracte avec implant pseudophake monofocal pour un objectif réfractif de monovision (myopie comprise entre –1,00 D et –1,50 D de l’œil non dominant). Sur une échelle allant de 0 à 10 (valeur maximale), le score moyen de satisfaction était de 9,54 [8-10]; 69 % des patients ont noté leur satisfaction à la valeur maximale de 10; aucun patient n’a noté sa satisfaction en dessous de la valeur 8. Dans cette population, le score moyen de dépendance à une correction était de 2,77 sur une échelle allant de 0 (« totalement indépendant à une correction ») à 10 (« totalement dépendant d’une correction »); le score moyen était de 2,73 pour les besoins de vision de près et de 1,62 pour les besoins de vision de loin; 27 % des patients ont signalé être totalement indépendants d’une correction.
PRESBYTIE ET MULTIFOCALITÉ
La multifocalité est utilisée de façon prédominante chez les hypermétropes.
Presbytie et multifocalité des lentilles de contact
La mise à jour du rapport de la SFOALC publiée par Peyre en 2002 [31] a présenté les résultats d’une large enquête de satisfaction et d’activités menée par questionnaire chez deux cent soixante-trois sujets presbytes corrigés par lentilles de contact multifocales, dont l’âge était majoritairement compris entre quarante-cinq et soixante ans. Le questionnaire explorait les activités diurnes faisant intervenir la vision de loin (conduite, sports, relations sociales, apparence physique …), la vision de près et la vision intermédiaire (lecture, bricolage, ordinateurs, jeux de société, cuisine …), et les activités nocturnes (conduite en ville et sur route, mais aussi théâtre et cinéma). D’autres questions portaient sur les éventuelles difficultés rencontrées dans l’adaptation ou la tolérance des lentilles de contact. Un questionnaire adaptateur a aussi été complété, pour chaque patient interrogé, par les douze ophtalmologistes ayant participé à l’étude. Ce dernier questionnaire a permis de préciser que la multifocalité était très souvent associée à une bascule pour obtenir un effet monovision d’optimisation en vision de près et intermédiaire (64 % de bascules et 30 % d’additions différentes). Chaque question d’activité devait être notée sur une échelle de 1 à 10 (10 correspondant à la satisfaction maximale). Quelles étaient les activités présentant les meilleurs scores de satisfaction chez les porteurs de lentilles de contact multifocales ? Pour les activités sollicitant la vision de loin, il faut citer la conduite automobile de jour et l’apparence physique, mais aussi le théâtre et le cinéma pour les activités nocturnes. Pour les activités sollicitant la vision en distance intermédiaire, il faut citer le travail sur écran, la cuisine et les activités ménagères. Les scores sont bons également pour les activités sollicitant la vision de près de jour, mais aussi pour la broderie. Les scores de satisfaction sont plus dispersés, donc moins favorables pour la conduite automobile nocturne. La satisfaction globale est forte, puisque 94 % des sujets souhaitent continuer à porter des lentilles de contact.
Presbytie et implants pseudophakes multifocaux
La chirurgie de la presbytie par échange de cristallin concerne une population sensiblement plus âgée (majoritairement au-delà de soixante ans), puisqu’elle est essentiellement indiquée en présence d’une cataracte. À l’exception des cataractes congénitales ou traumatiques qui atteignent des patients jeunes ayant encore une fonction d’accommodation, la chirurgie du cristallin est principalement réalisée pour des cataractes liées à l’âge chez des patients qui étaient déjà devenus presbytes. La mise en place d’un implant pseudophake étant systématique pour corriger l’aphakie, on comprend l’intérêt de rechercher dans tous les types d’indications une correction par l’implant pouvant apporter la meilleure vision possible à toutes distances, idéalement en restaurant la fonction d’accommodation. L’évolution de cette chirurgie favorise cette orientation avec l’amélioration des formules de calcul d’implants qui assure une bonne précision de correction réfractive, mais aussi le bon contrôle de l’astigmatisme, préopératoire grâce aux implants toriques et postopératoire grâce aux microincisions. La compensation de la presbytie dans cette chirurgie est essentiellement réalisée actuellement par le concept optique de la monovision avec les implants à optique monofocale, ou par le concept de bifo-calité avec essentiellement les implants à optiques diffractives. Les implants à optiques biréfractives, plus récents, commencent à être étudiés sous l’angle de la qualité de vie [21]. Les implants accommodatifs font encore l’objet d’une évaluation sur le maintien de leur efficacité à moyen et à long terme. Les implants multifocaux ont fait la preuve de leur capacité pour améliorer à la fois la vision de loin et de près (cf. chapitre 7). Cependant, cette propriété est acquise au prix d’effets indésirables chez certains patients avec, dans ces cas, un retentissement défavorable sur leur satisfaction et leur qualité de vie [5, 38]. Ces implants sont donc toujours l’objet d’évolutions techniques dans le but d’améliorer leurs performances optiques, notamment la qualité de vision nocturne qu’ils procurent. Il faut constater que très peu d’études de qualité de vie ont jusqu’à présent été publiées au sujet des implants bifocaux à optiques diffractives. Il faut donc interpréter les résultats disponibles en termes de tendance, en attendant d’autres études qui pourront apporter des éléments de confirmation. Les études comparatives qui permettraient de différencier les propriétés de qualité de vie de chaque type d’implant sont très difficiles à réaliser. Les explications sont diverses: variété des caractéristiques optiques et géométriques, différences de coûts financiers entre les nombreux implants disponibles, absence de randomisation, biais de recrutement, biais d’interprétation des résultats, conflits d’intérêts …
La multifocalité est-elle supérieure à la monovision pour compenser la presbytie ?
Zhang [39] a publié une étude comparant la fonction visuelle et la qualité de vie de deux groupes de patients opérés consécutivement. Un groupe de vingt-deux patients était corrigé en monovision avec des implants acryliques hydrophobes asphériques à optique monofocale, l’autre groupe, qui comportait vingt et un patients, était corrigé avec des implants acryliques hydrophobes à optiques diffractives. Des incisions limbiques relaxantes étaient réalisées en cas d’astigmatisme préopératoire à corriger. Les auteurs ont utilisé l’échelle de qualité de vie NEI-VFQ-25 à laquelle ils ont ajouté un questionnaire de satisfaction. Les patients corrigés par implant multifocal devaient supporter un coût financier supplémentaire, ce qui rendait impossible une randomisation des deux groupes. Les moyennes d’acuités visuelles binoculaires sans correction de loin et de près, qui étaient légèrement meilleures dans le groupe multifocal, ne présentaient pas de différence statistiquement significative entre les deux groupes (nombre de patients probablement trop faibles). Soulignons cependant que:

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