21: Place des facteurs génétiques dans la vulnérabilité au jeu pathologique

Chapitre 21 Place des facteurs génétiques dans la vulnérabilité au jeu pathologique



Le jeu pathologique est une trouble du comportement impliquant des facteurs de vulnérabilité divers, socioculturels, psychologiques, familiaux et physiologiques. Parmi ces nombreux facteurs, plusieurs études mettent en évidence des facteurs génétiques de susceptibilité.



Études d’agrégation familiale et études de jumeaux – Estimation de l’héritabilité


Les études d’agrégation familiale consistent à observer si la maladie est plus fréquente chez les apparentés d’un sujet atteint, par rapport aux apparentés d’un sujet non atteint (Gorwood et al., 1999). Elles montrent que le fait d’avoir un apparenté au premier degré atteint de jeu pathologique augmente de 3 à 5 fois le risque de devenir joueur pathologique (Gambino et al., 1993 ; Black et al., 2006 ; Versini et al., 2012). Les études de jumeaux apportent des informations supplémentaires, en permettant d’estimer le poids des facteurs environnementaux et génétiques dans la maladie. Un excès de concordance chez les jumeaux monozygotes (MZ) par rapport aux dizygotes (DZ) est en faveur de l’implication de facteurs génétiques dans la maladie. Une étude, portant sur une large cohorte de jumeaux masculins, montre que les facteurs génétiques expliquent entre 35 % et 54 % de la vulnérabilité pour 5 des symptômes du comportement de jeu pathologique pris individuellement (Eisen et al., 1998). Le reste de la variance est attribuable à l’environnement spécifique de l’individu (non familial). Une étude récente confirme ce résultat, avec une héritabilité autour de 49 %. Là encore, les 51 % restants de la variance sont attribuables aux facteurs environnementaux uniques (Slutske et al., 2010). Cette étude montre également qu’il n’y a pas de différence significative entre l’héritabilité du jeu pathologique chez les hommes et chez les femmes.



Études d’association de gènes candidats


L’identification des gènes impliqués dans le jeu pathologique n’en est qu’à ses débuts. À ce jour, seules huit études d’association cas-témoins et une étude familiale chez les joueurs pathologiques ont été publiées (tableau 21.1). Les gènes impliqués dans le système dopaminergique sont les plus étudiés (Gorwood et al., 2012). En effet, la dopamine est le neurotransmetteur majoritairement impliqué dans la perception cérébrale de l’effet de la récompense et pourrait avoir un rôle clé dans les addictions (Goodman, 2008). Une étude d’association cas-témoins et une étude familiale montrent que le gène DRD1 du récepteur de la dopamine D1 est associé au jeu pathologique (Comings et al., 1997 ; da Silva Lobo et al., 2007). Une étude coréenne ne confirme néanmoins pas ce résultat (Lim et al., 2011), soulignant l’importance de prendre en compte l’origine ethnique des populations étudiées. Une association entre le jeu pathologique et l’allèle Taq-A1 a été publiée, indiquant que le polymorphisme est situé dans le gène ANKK1 dont nous avons montré qu’il codait pour la protéine X-Kinase (Dubertret et al., 2004). Ce gène est contigu au gène DRD2 (Comings et al., 1996). Néanmoins, d’autres travaux ne confirment pas cette association chez les joueurs pathologiques (da Silva Lobo et al., 2007; Lim et al., 2011). L’allèle 7 répétitions du gène DRD4 du récepteur de la dopamine D4, localisé dans l’exon III du gène, est un polymorphisme fonctionnel conduisant à une plus faible affinité pour la dopamine. Il a été observé plus fréquemment chez les joueurs pathologiques que chez des joueurs contrôles (Perez de Castro et al., 1997; Comings et al., 1999), mais pas toujours (da Silva Lobo et al., 2007; Lim et al., 2011). À l’heure actuelle, les études n’ont pas mis en évidence d’association entre le jeu pathologique et les gènes DRD3, DRD5 et DAT1 (da Silva Lobo et al., 2007; Lim et al., 2011).



D’autres travaux ont montré un déficit du contrôle de l’impulsivité chez les joueurs pathologiques, suggérant l’implication du système sérotoninergique (Leeman et Potenza, 2012). Il semble que l’allèle court du polymorphisme 5HTTLPR du gène codant pour le transporteur de la sérotonine soit significativement plus fréquent chez les joueurs pathologiques masculins que chez les contrôles (Perez de Castro et al., 1999). Des études ont montré que les joueurs pathologiques avaient des anomalies cognitives, notamment pour la prise de décision en situation émotionnelle, évaluée par l’Iowa Gambling Task (Goudriaan et al., 2005; Linnet et al., 2011). Les performances à cette tâche ont été associées à l’allèle court dans le promoteur du gène du transporteur de la sérotonine (He et al., 2010 ; Stoltenberg et Vandever, 2010) mais ces résultats restent néanmoins controversés (Juhasz et al., 2010).


Enfin, deux études ont mis en évidence une association entre des polymophismes du gène MAOA, dans les formes sévères de jeu pathologique chez les hommes (Ibanez et al., 2000; Perez de Castro et al., 2002).

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May 23, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 21: Place des facteurs génétiques dans la vulnérabilité au jeu pathologique

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