Chapitre 21. Chirurgie pédiatrique
Chirurgie pédiatriqueMalgré les progrès considérables de la chirurgie pédiatrique des dernières décennies, en termes de technicité, de durée d’hospitalisation, d’accompagnement de l’enfant et de sa famille en pré- et postopératoire, l’épreuve de séparation (du fait de l’hospitalisation, mais également de l’anesthésie) ainsi que celle de l’effraction du corps restent incontournables.
Après quelques brefs rappels sur l’organisation d’un service de chirurgie, nous nous intéressons à la nature des demandes adressées à l’équipe de pédopsychiatrie de liaison ainsi qu’aux modalités de réponse apportées à ces demandes.
Spécificités du lieu et de l’organisation
Les séjours en milieu chirurgical pédiatriques sont en général de courte durée (chirurgie ambulatoire, hospitalisation de jour…), et les interventions y sont le plus souvent ponctuelles et à visée curative. Les enfants n’y séjournent donc en général qu’une fois. Plus rarement, l’intervention s’inscrit dans une prise en charge plus globale : dans le cadre d’une maladie chronique ou d’une malformationMalformation complexe (digestive, urogénitale, orthopédique), ou encore d’une chirurgie réparatrice dans un contexte accidentel, nécessitant des séjours parfois plus longs et surtout répétés.
Il existe dans la plupart des services de chirurgie infantile la possibilité d’un accompagnement parental de nuit, afin d’éviter aux enfants les plus jeunes ou les plus fragiles de se trouver confrontés à un excès de séparation.
Les services de chirurgie pédiatrique sont par ailleurs actuellement pour la plupart adossés à un service de pédiatrie avec lequel ils entretiennent des liens étroits, au point parfois d’en partager les lits d’hospitalisation ainsi que l’organisation des soins. Ce lien spécifique entre chirurgie pédiatrique et pédiatrie générale permet de proposer, en particulier aux plus jeunes enfants, un environnement contenant, susceptible de rétablir une continuité dans un contexte d’intervention chirurgicale parfois pénible et douloureuse, en termes de durée, de contraintes ou de problèmes somatiques particuliers.
La spécificité de l’organisation des soins chirurgicaux fait :
• une place particulière au chirurgien, qui partage son temps de travail entre :
– une activité consultative externe,
– une activité chirurgicale,
– et de courts passages dans le service (visite, contre-visite);
• une place également particulière aux puéricultrices, qui partagent leur temps entre :
– des soins pré- et post-chirurgicaux spécifiques (préparation à l’acte chirurgical, antalgie, pansements, drains, perfusions…),
– et des soins plus informels consistant en particulier à :
– relayer la parole du chirurgien de manière lisible et rassurante auprès de l’enfant et de ses parents,
– et relayer les manifestations physiques, comportementales ou verbales de l’enfant et de ses parents auprès du chirurgien.
L’équipe infirmière, en milieu chirurgical pédiatrique, se situe donc à l’interface entre :
• le «corps chirurgical», cible d’une intervention spécifique en général reproductible;
• et le «corps support» de manifestations singulières sous-tendues par la subjectivité de chaque enfant et de chaque famille.
Spécificités de la demande
Du côté de l’enfant et de sa famille
DemandeL’acte chirurgical mobilise souvent les enfants et leur famille sur le plan émotionnel.
Cette mobilisation est notamment fonction de la nature de la chirurgie (accident, malformationMalformation, problème aigu ou chronique, affection grave ou bénigne, lésion affectant telle partie du corps ou telle autre plus ou moins fantasmatiquement investie…), des modalités de l’acte (isolé ou répété, réparateur ou délabrant), des séquelles ou des bénéfices attendus, du caractère plus ou moins douloureux de l’acte ou de ses conséquences, de son caractère plus ou moins contraignant (contention ou immobilisation prolongée, séjour en réanimation postopératoire, etc.) mais aussi du niveau de maturation psychoaffective de l’enfant ainsi que de l’histoire et des représentations familiales et culturelles de la maladie et de ce qu’elle génère au plan conscient mais également fantasmatique inconscient.
Dans ce contexte, la demande peut prendre des formes variées, dont les plus fréquentes ont trait à des phénomènes de la lignée anxieuse, et parfois dépressive :
• anxiété de séparationAngoissede séparation en lien avec l’hospitalisation doublée de l’anesthésie générale;
• angoisses de mort en rapport avec l’anesthésie;
• anticipation anxieuse d’une chirurgie douloureuse ou délabrante;
• angoisse de perte de l’intégrité corporelle, la chirurgie (même légère) revêtant souvent alors la valeur fantasmatique d’une castration;
• effondrement dépressif, souvent en lien avec une blessure narcissique non élaborable.
Par ailleurs, la particularité de la symptomatologie par laquelle ces angoisses ou phénomènes dépressifs se manifestent réside dans le fait que cette symptomatologie est ici essentiellement comportementale, sous forme de crises de larmes inconsolables, d’attitudes de refus, voire d’agressivité ou d’hostilité à l’égard des soins et des soignants, ou au contraire sous la forme beaucoup plus silencieuse, mais non moins préoccupante, de régressions intenses ou de retrait complet.
Du côté des équipes soignantes
C’est donc le plus souvent l’équipe chirurgicale qui, devant telle ou telle symptomatologie, en particulier anxieuse, va relayer la demande auprès de l’équipe de liaison pédopsychiatrique, dont l’intervention se déroule après un temps d’observation pédiatrique susceptible de différencier une anxiété «banale» d’une manifestation plus préoccupante.

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