Chapitre 2. Les fondamentaux
Ateliers
Artisanat, voilà le mot le plus adapté pour définir le travail minutieux et quotidien de l’infirmier en psychiatrie.
Médiation, médium, média
Médiation est emprunté au latin médiatio, nom correspondant au verbe mediare « être au milieu ». En ancien français, ce mot a le sens de « division ». Il a pris sa valeur moderne « d’entremise destinée à concilier des personnes, des partis » d’abord en religion dans une relation entre l’homme et Dieu puis surtout en droit et en diplomatie. Par extension il s’applique au fait de servir d’intermédiaire dans des emplois didactiques.
La médiation est donc un élément tiers qui met de la distance pour mieux favoriser un futur dialogue.
La médiation nous protège de l’immédiat, elle nous protège d’un contact direct. La médiation permet que l’on passe en quelque sorte de deux (la relation duelle) à trois6. Cette médiation va permettre de modifier la relation intersubjective.
La diversité des médiations proposées peut permettre à chaque participant de choisir le mode d’expression le plus adapté à son système défensif du moment7.
Les constantes de la médiation
René Kaës nous propose dans son article8 sur les médiations des récits desquels il extrait six constantes de la médiation que nous illustrerons ici.
On en retiendra essentiellement que toute médiation :
• interpose et rétablit un lien entre la force et le sens, irruption de la parole et de l’échange symbolique ;
• implique une représentation de l’origine, qui relie le sujet à un espace originaire, où il se situe entre deux termes (entre-euxdeux) ;
• s’inscrit dans une problématique des limites, des frontières et des démarcations, des filtres et des passages ;
• s’oppose à l’immédiat, dans l’espace et dans le temps ;
• suscite un cadre spatio-temporel, générant un espace tiers entre deux ou plusieurs espaces et dans des limites et des passages ;
• s’inscrit dans une oscillation entre créativité et destructivité : de cette oscillation dont témoignent de manière exemplaire les phénomènes transitionnels.
Groupe
Si comme nous l’avons vu, la médiation thérapeutique suppose au minimum une interaction entre deux individus (un soignant et un patient), elle est le plus souvent utilisée dans le cadre de groupes thérapeutiques, un ou plusieurs soignants et un ou plusieurs patients.
Le terme de groupe vient de l’italien gruppo qui signifie « nœud, assemblage ». Il a également une origine germanique signifiant « arrondie ». Le groupe est un ensemble de choses ou de personnes.
C’est un mot assez récent, il semble qu’il fait sa première apparition littéraire dans un poème de Molière sur le Val de Grâce. Au milieu du XVIIe siècle, le mot de groupe désigne toute réunion de personnes vivantes et à partir du XIXe siècle, il va subir une expansion prodigieuse et va s’appliquer à tout ensemble, toute unité partageant un intérêt, un but commun comme le groupe scolaire, le groupe électrogène, le groupe sanguin…
Le psychanalyste Didier Anzieu dans son livre Le groupe et l’inconscient a beaucoup développé les différentes visions du groupe. Il nous dit que c’est « à partir de 1930, (que) se constitue une science des groupes, distincte de la psychologie individuelle et de la sociologie ». Il reprend dans cet ouvrage les différentes évolutions et approches données du groupe. Pour Moreno, fondateur du psychodrame, c’est une mise en commun. Mayo, un des pères de la sociologie du travail, dit qu’il existe une entité autonome au groupe qu’il nomme mentalité commune, avec sa logique propre. Pour Lewin, à l’origine de l’expression « dynamique de groupe », le groupe c’est l’interdépendance tant pour les individus qui le constitue que pour la lecture que l’on peut en faire. Bales, autre spécialiste de la dynamique de groupe, dit que c’est une mise en commun des perceptions, que le groupe est un être vivant qui est connu de part son contenu extérieur et dont les échanges enrichissent l’individu dans sa vie du groupe. Ce sont ces échanges qui différencient le groupe de l’agrégat humain. Le groupe est une enveloppe qui fait tenir ensemble des individus. Tant que cette enveloppe ne s’est pas constituée nous sommes dans l’agrégat et non dans le groupe. La constitution du groupe est un phénomène de maturation9. Le groupe se pose en tiers entre les participants. « La neutralité facilitant la bienveillance contre transférentielle maintient la cohérence du groupe, garant de la fonction de contenance qui apparaît alors comme une valeur à protéger »10.
Plusieurs courants de pensée nous permettent d’analyser ce qui se passe au sein du groupe.
Le premier, autour de la dynamique de groupe, centre son analyse sur l’interprétation du rôle de chacun dans le groupe et sur les interactions qui s’y déroulent, ainsi que sur les mouvements globaux qui animent le groupe. Ce type de méthode facilite la prise de conscience des attitudes relationnelles de chacun et des sentiments qui les soustendent en s’appuyant sur l’image que renvoient au sujet les autres membres du groupe.
Le second courant se réfère à la psychanalyse. Pour Freud, la cohésion d’un groupe provient de l’identification de chacun de ses membres au même « idéal du Moi », dont la représentation du réel est une des fonctions.