2: Le cadre d’une psychothérapie de soutien

Chapitre 2 Le cadre d’une psychothérapie de soutien



L. Schmitt


Toute psychothérapie comporte un cadre et un processus. Ces deux aspects sont distincts mais participent à la réussite de l’ensemble. Il est facile d’illustrer cadre et processus par deux métaphores. L’une concerne un match de boxe : le ring, les cordes, le tapis, la place des boxeurs, la durée des rounds et le gong appartiennent au cadre. Le match en lui-même, avec l’utilisation des différents coups, la stratégie et la prise en compte de la fatigue de l’adversaire appartiennent au processus. Il en est de même des meubles à monter soi-même : les écrous, les boulons et les tournevis définissent une série de pièces indispensables et appartiennent au cadre, tandis que la manière de monter le meuble relève du processus.


Le cadre comprend l’ensemble du contexte dans lequel se déroule la psychothérapie, les circonstances de l’adressage, la mécanique des rendez-vous, leur temporalité, les lieux où ils se déroulent. Le processus est composé des dimensions techniques, de l’appréciation d’une demande, de l’établissement d’une alliance, du repérage des résistances ou des mécanismes de défense, et des aspects d’étayage et de soutien.


La plupart des références sur la psychothérapie de soutien restent désespérément muettes concernant le cadre dans laquelle elle intervient, ou définissent ce cadre par la négative en comparaison des cadres des psychothérapies analytiques ou cognitives. Or, on ne peut approfondir la psychothérapie de soutien qu’en détaillant avec précision ces écrous et ces boulons qui permettent de structurer les entretiens. Tous ces aspects semblent aspécifiques, on croit qu’ils appartiennent au registre de l’anodin ou du banal, mais ils ne se révèlent jamais neutres. Dans ce cadre définissant des entretiens de soutien demandent à être précisés les contextes du premier rendez-vous, les dimensions d’espace et de temporalité, les aspects d’horlogerie ou de mécanique sur l’enchaînement des entretiens.



Le contexte des rendez-vous


Quelques contextes sont fréquents.


Le coup de fil ou l’appel d’un confrère médecin, exposant brièvement une situation problématique et les conséquences pour le patient, exprime une modalité fréquente. Il est habituel que le médecin remette au patient une courte lettre expliquant le problème, les difficultés exprimées et le retentissement d’une affection. Il est encore plus habituel qu’un coup de téléphone explicatif, souvent en présence du patient, permette de définir le premier rendez-vous.


Une autre modalité fréquente intervient quand le patient prend directement rendez-vous sans passer par son médecin de famille ; il peut à ce moment-là donner des informations sur un caractère d’urgence ou de souffrance, justifiant ainsi son appel et le souhait d’un rendez-vous rapproché.


Enfin, certaines psychothérapies de soutien débutent lors de situations de crise. Elles ont conduit un patient aux urgences ou bien dans un service hospitalier. Dans ce dernier cas, il n’est pas rare que le soutien soit rendu nécessaire par l’annonce d’un diagnostic, l’angoisse d’une maladie grave, l’inquiétude face à une multiplication d’examens ou d’investigations paracliniques : IRM, biopsie, ponction, etc.


Ces différents contextes jouent sur le thérapeute. Il est parfois obligé de rajouter une première consultation, un peu en urgence, comme on pousse les murs, à la suite d’autres consultations quotidiennes. Il ne peut, s’il est directement sollicité, donner un rendez-vous trop éloigné car la notion même de soutien deviendrait obsolète si le rendez-vous est proposé dans un mois ou plus. Il ne faut pas hésiter, pour faciliter ce premier entretien, à fournir quelques informations sur l’adresse, la manière de s’y rendre, la possibilité de se garer, voire un petit repère : « l’immeuble blanc à côté d’une boulangerie… ». Ce contexte du premier rendez-vous est largement dominé par la détresse du patient, ses difficultés à exprimer son vécu, sa crainte de parler à un psychiatre ou à un psychologue, mais aussi des attentes ou une espérance parfois démesurées. Le caractère impérieux de ces situations obligera, dans certains cas, à instaurer un rythme plus serré et à rapprocher les rendez-vous d’une semaine sur l’autre.


Le nombre d’entretiens nécessaires lors d’une psychothérapie de soutien varie selon deux contextes. Lorsqu’il s’agit d’une situation aiguë, critique, définie par une circonstance comme un deuil ou un accident, on considère que quatre à huit entretiens permettent de la faire évoluer et de restaurer le patient ; les deux premiers entretiens sont consacrés à la compréhension du problème et au repérage de certaines défenses, et les entretiens ultérieurs permettront une clarification, des mises en perspective, des retours sur le passé et des associations d’idées. Il en va différemment des soutiens au long cours dont le principe repose sur des entretiens espacés, réguliers. Ils fonctionnent par le mécanisme de l’échange, par des phénomènes de rappel ou d’encouragement qui, même espacés, donnent au patient un sentiment de continuité et de support.



La géographie et l’espace du soutien


La plupart des psychothérapies de soutien ont lieu dans un cabinet médical ou dans celui d’un psychothérapeute ; d’autres se déroulent dans des services hospitaliers : bureaux de consultation ou d’hôpital de jour ; d’autres enfin peuvent s’effectuer à domicile.



Le cabinet du thérapeute


Une petite affiche indiquant la nécessité d’éteindre son téléphone portable durant la consultation n’est pas inutile. Cette demande implique une réciprocité de la part du médecin ou du thérapeute : si ce dernier risque d’être dérangé car étant d’astreinte ou dans l’attente d’un coup de fil important, il doit le signaler. La décoration d’un cabinet doit inciter au confort du patient, et exprime la personnalité du thérapeute. Elle évite de fournir trop de renseignements sur sa vie privée comme les photos d’épouse, d’enfants ou des souvenirs de vacances… En effet, des éléments trop personnels vont servir de surface de projection pour le patient.


Une psychothérapie de soutien est facilitée par une disposition de type salon avec des fauteuils, un canapé ou bien des chaises de part et d’autre d’une table basse. Parmi les petites attentions facilitant le soutien, on peut mentionner l’existence d’un portemanteau ou d’un porte-parapluies, des boîtes de mouchoirs, des petits gâteaux, parfois la possibilité de servir un thé ou un café. Quand une pendule existe, le patient et le thérapeute doivent pouvoir la consulter du regard facilement ; sinon, elle sera disposée dans le dos du patient pour ne pas blesser ce dernier par des coups d’œil répétés sur une montre ou vers la pendule. La présence d’un cendrier autorise le patient à fumer ; si tel n’est pas le cas, une affiche dans la salle d’attente doit l’expliquer. L’éclairage ne peut être cru ou violent, la température doit être régulée. Le travail psychothérapeutique ne saurait être mené en période de canicule ou par un froid glacial. Tous ces éléments participent à un aspect du support, du réconfort que l’on peut apporter à un patient.


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Apr 23, 2017 | Posted by in MÉDECINE COMPLÉMENTAIRE ET PROFESSIONNELLE | Comments Off on 2: Le cadre d’une psychothérapie de soutien

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