Chapitre 2 Arthroscopie du genou
Généralités
L’arthroscopie exige une capacité à se repérer dans l’espace qui doit s’acquérir le plus tôt possible dans l’apprentissage chirurgical. Un peu comme le conducteur automobile qui apprendrait la conduite tardivement, la technique arthroscopique n’est véritablement assimilée que si elle est acquise tôt. Elle devient alors totalement naturelle. L’objet de ce chapitre n’est pas de faire l’inventaire des options techniques ou des situations rencontrées, mais bien de donner quelques astuces qui rendent simple cette technique chirurgicale.
Préparation et installation
Il est demandé au patient de mettre, la veille (ou le matin) avant toute prémédication, un bracelet au membre qui sera opéré (fig. 2.1). Ce geste donne plus de responsabilité au patient, en le faisant participer à son traitement. De ce fait, toute l’équipe est sûre du côté à opérer. La situation inacceptable d’opérer le mauvais côté a toujours été, à ce jour, évitée. Le bracelet est coupé par la personne qui prépare le membre opéré.
L’installation du patient est faite sur une table ordinaire en décubitus dorsal. Une cale est placée au niveau du tiers supérieur de la cuisse pour permettre les manœuvres en valgus. Une autre cale est placée sur la table, pour maintenir le genou fléchi à 90°. Cette installation a des avantages par rapport au leg holder ou à une table dont le tablier distal est abattu, parce que tous les mouvements de la hanche et du genou sont permis. Lorsque le talon repose sur la cale, le genou est fléchi à 90°. Pour placer le genou à 110°, il suffit de placer les orteils en butée sur la cale. De plus, l’installation est la même lorsqu’il s’agit de combiner chirurgie arthroscopique et chirurgie ouverte (par exemple, arthroscopie et chirurgie rotulienne ou ostéotomie). Le garrot pneumatique est placé à la racine de la cuisse (fig 2.2 et 2.3).
L’antisepsie du membre se fait jusqu’au garrot, avec de la bétadine, voire de la chlorhexidine en cas d’allergie. Le pied dont on a fait l’antisepsie est placé dans un gant chirurgical sans latex taille 9. Le membre opéré est placé dans un jersey et des champs imperméables sont mis en place. Le membre est surélevé quelques secondes afin qu’il soit exsangue au moment du gonflement du garrot. La pression du garrot doit être de 200 mmHg au-dessus de la pression diastolique ou bien de 300 mmHg en valeur absolue. La durée du garrot ne doit pas dépasser 120 minutes.
Matériel
Le matériel est primordial en arthroscopie et des instruments spécifiques sont nécessaires.
Pour l’irrigation, l’arthropompe est systématiquement utilisée. Nous utilisons toujours la colonne dans sa globalité lorsqu’une arthroscopie est réalisée. Nous n’avons pas d’utilisation à géométrie variable en fonction des indications. Nous disposons de trois colonnes complètes pour deux salles d’opération et du jeu d’arthroscopes et de caméras en nombre suffisant. Le sérum physiologique est le liquide d’infusion choisi. Il faut avoir une pression d’infusion de 50 mmHg afin d’obtenir une distension satisfaisante de l’articulation.
Matériel chirurgical
La liste s’allonge tous les jours, avec l’augmentation des indications de l’arthroscopie. Certains instruments sont indispensables et font partie de la « boîte de base » ; le palpateur, les pinces baskets et les ciseaux, ainsi que les pinces à préhension et la canule d’aspiration (fig. 2.4).
La pince Basket, indispensable pour réaliser les méniscectomies, est droite, dite « courbe sur le plat ». Cette pince peut être « glissée » sous le condyle fémoral (fig. 2.5).
Voies d’abord
La triangulation est la technique d’arthroscopie la plus efficace. Elle nécessite deux voies d’abord. Elle permet d’abord les gestes les plus fréquents, comme la méniscectomie et l’ablation de corps étrangers :
• deux voies antéro-internes ;
• voie parapatellaire externe de Patel ;
• voies postéro-médiale et postéro-latérale de Philippe Beaufils.
La voie antéro-externe et les deux antéro-internes sont les plus utilisées. Ces trois voies d’abords permettent dans notre pratique de réaliser 95 % des gestes arthroscopiques, les autres voies sont considérées comme accessoires (fig. 2.6). Le choix de la voie interne repose sur l’indication retenue en fonction des constatations arthroscopiques. Il ne faut jamais hésiter à réaliser un troisième point d’entrée lorsque cela est nécessaire. Hésiter, c’est déjà se tromper. De même, il faut savoir jouer de l’inversion des optiques et instruments sans tergiverser.
Voie antéro-externe
C’est la voie d’introduction de l’optique. Elle permet une bonne visualisation de l’articulation. Les repères cutanés sont représentés par le tendon rotulien sur la ligne médiane, prolongé en haut par le bord latéral de la rotule, en bas par le rebord du plateau tibial externe, en haut et latéralement par l’arrondi du condyle externe. Le point d’entrée est fait au ras de la rotule, à mi-distance entre la pointe et le bord latéral. La lame de 11 est introduite tranchant vers le haut, verticalement, tandis que la pulpe du pouce de l’opérateur est positionnée dans la dépression antéro-externe située entre plateau et condyles externes.
Deux voies antéro-internes
Voie antéro-interne basse
Cette voie conduit à l’espace antéro-interne situé au bord supérieur du ménisque interne. Pour ne pas léser celui-ci, des règles strictes doivent être respectées.
Le genou est fléchi à 90°, le pied repose sur la cale. Une perpendiculaire au tendon rotulien passant par le bord inférieur de l’incision antéro-externe est matérialisée. Le bord supérieur de l’incision antéro-interne est ainsi déterminé. Soulignons que l’incision antéro-interne « basse » est plus proche de l’interligne fémoro-tibial que ne l’est l’incision antéro-externe. Elle est aussi plus à distance du tendon rotulien, plus médiale. Cette zone est aussi matérialisée par la transillumination qu’autorise la lumière froide de l’optique.