Chapitre 18. Non-dits sur la sexualité en psychothérapie
Ne seront pas évoquée ici toute une série de causes organiques de difficultés sexuelles : le diabète, les atteintes vasculaires périphériques, la sclérose en plaques, la chirurgie de la prostate, les traumatismes rachidiens, les suites immédiates d’une hystérectomie. Ces anomalies doivent faire l’objet du même interrogatoire et s’inscrivent dans des défaillances pathologiques demandant des traitements spécifiques. Il existe de fait toute une série de résistances pour évoquer avec un patient la sexualité. Certaines résistances relèvent de l’absence de connaissances sur les problèmes sexuels, d’autres tiennent à la pudeur, à l’embarras, à la gêne. Dans bien des cas, des différences manifestes d’âge, de culture ou de contexte vont faire qu’une jeune thérapeute aura quelques réserves à interroger un patient plus âgé sur sa virilité et sur son fonctionnement sexuel. Ce déficit d’interrogatoire peut relever de la crainte de choquer ou bien de raviver des épisodes traumatiques. Il est déjà assez difficile pour une patiente d’évoquer une séquence où elle a pu être victime d’abus sexuels ou de viols ; souvent cet aveu apparaît pénible, soulève des émotions, s’effectue dans la gêne. Or, de cet événement traumatique découlent des difficultés de sexualité dont la personne a eu d’autant plus de mal à parler qu’elles relevaient d’un événement traumatique antérieur. De façon analogue, toute une série de médicaments cardiologiques ou psychotropes induisent des baisses ou des suppressions de la sexualité ; pour les antidépresseurs et les antipsychotiques, il peut arriver que cela devienne une gêne, un obstacle à leur prise régulière tant les patients ramènent à ces médicaments leurs difficultés en matière de relation sexuelle.
Cependant, à côté des difficultés d’une sexualité réelle, la sexualité peut se manifester de manière fantasmatique ou imaginaire dans un grand nombre de rêves ou d’imagerie visuelle suscités par des circonstances aussi différentes que des crises existentielles, des difficultés familiales ou des rencontres inopinées.
Qu’en est-il de la sexualité réelle ?
La fréquence des relations sexuelles, le lien entre activité sexuelle et santé psychologique, à l’inverse la fréquence des difficultés sexuelles lors des troubles anxieux ou de la dépression, sont des éléments invitant à poser quelques questions sur la sexualité. Au détour d’une évocation du couple ou bien en approfondissant les conséquences d’une plainte se pose la première question.
« Qu’en est-il du retentissement sur votre intimité ou sur vos relations sexuelles ? »
Les femmes mentionnent les difficultés de désir ou d’excitation sexuelle du fait de rapports trop brefs, dénués de préliminaires, de caresses, d’exploration du corps de leur partenaire, d’alternance de moments d’activité et de passivité. Dans bien des cas, le désir sexuel apparaît moins important que le désir d’émotions intimes assorties d’une certaine complicité provoquée par des caresses alternées accompagnées d’un dialogue. Vis-à-vis de cette baisse de plaisir ou de désir, il est parfois utile d’interroger sur l’image du corps, la capacité de montrer son corps à son partenaire, la possibilité de se dévêtir devant lui, le besoin d’obscurité ou la possibilité de lumière.
Certains rapports sont-ils désagréables ou douloureux ?
Les difficultés des rapports sexuels relèvent soit de douleurs lors des rapports, les dyspareunies, soit de spasmes involontaires des muscles entourant la partie externe du vagin, source d’un vaginisme. Ces problématiques relèvent parfois de causes infectieuses, peuvent être liées à des problèmes de cycles menstruels ou proviennent d’une difficulté de lubrification. Ces difficultés peuvent être primaires, ayant rendu toute pénétration impossible, ou peuvent être acquises, à la suite de perturbations dans la relation amoureuse, dans l’imaginaire ou dans le couple. Les difficultés d’orgasme peuvent être initiales chez plus de 5 % des femmes dans un contexte de mauvaise connaissance de leur corps, de leur sexualité ou prises dans des interdits moraux éducatifs. Plusieurs de ces difficultés d’orgasme s’améliorent par la réassurance et par l’implication du partenaire, qu’elle soit obtenue directement en entretien ou indirectement par les conseils ou les propositions que lui transmet la patiente. Lorsque l’on rencontre une situation de difficultés sexuelles, il faut toujours interroger sur les aspects en négatif. Soigner le vaginisme d’une consultante sans prendre en considération l’attitude ou les difficultés de son mari − vivacité dans les rapports, éjaculation précoce, absence de paroles durant les relations sexuelles… − peut expliquer la durée du problème.
Difficultés masculines