Chapitre 18 Dermatologie
Introduction
Les maladies cutanées sont très fréquentes, bien que leur prévalence exacte soit inconnue. Plus de 1000 syndromes différents ont été décrits, mais les deux tiers de tous les cas sont la conséquence de moins de 10 affections. Dans les pays en développement, des maladies infectieuses comme la tuberculose, la lèpre et l’onchocercose sont courantes, alors que dans les pays développés, des inflammations, comme l’acné ou l’eczéma, sont fréquentes. Certaines affections peuvent faire partie du développement normal, par exemple l’acné ; d’autres peuvent être héréditaires, par exemple le syndrome d’Ehlers-Danlos ; d’autres encore font partie d’une maladie systémique, par exemple l’éruption d’un lupus érythémateux disséminé. Ce chapitre se limite à la description des affections de la peau les plus courantes et de celles qui peuvent être fatales, par exemple le mélanome malin ou le pemphigus. La figure 18.1 décrit la structure et les fonctions de la peau.
Figure 18.1 Structure et fonction de la peau.
• Barrière physique contre les forces de frottement et de cisaillement
• Protection contre les infections, les produits chimiques, le rayonnement ultraviolet
• Prévention de la perte excessive d’eau ou de son absorption
• Synthèse de vitamine D induite par les ultraviolets
• Régulation de la température
• Sensation (douleur, toucher, température)
• Présentation d’antigène/réactions immunologiques/cicatrisation.
Infections de la peau et des tissus mous
Les infections de la peau et des tissus mous sous-jacents sont fréquentes. La plupart sont causées par des cocci à Gram positif, Staphylococcus aureus (qui fait partie de la microflore normale de la peau), et Streptococcus pyogenes. Parfois, l’infection est introduite par une morsure d’animal ou par la pénétration d’un corps étranger ; dans ces cas, des germes inhabituels peuvent être trouvés.
Cellulite et érysipèle
Une cellulite implique préférentiellement les extrémités inférieures. Les facteurs de risque comprennent le lymphœdème, le site d’entrée (ulcère de jambe, traumatisme, présence de tinea pedis – « pied d’athlète »), une insuffisance veineuse, un œdème des jambes et l’obésité. Elle est généralement causée par un streptocoque, rarement par un staphylocoque, mais parfois par un SARM (S. aureus résistant à la méticilline) contracté hors de l’hôpital. Érysipèle est le terme utilisé pour désigner une infection plus superficielle, souvent sur le visage. Dans la majorité des cas, elle est causée par des streptocoques β-hémolytiques du groupe A.
Fasciite nécrosante
Cette infection profonde du tissu sous-cutané se complique d’une destruction fulminante et extensive des aponévroses et du tissu adipeux, mais elle peut d’abord épargner la peau. La mortalité est élevée. Un érythème expansif, un crépitement sous-jacent et une toxicité systémique, hors de proportion par rapport aux signes cutanés, font suite à une forte douleur à l’endroit de l’infection. Un type 1 est causé par un mélange de bactéries aérobies et anaérobies et est généralement observé après une opération abdominale ou chez les diabétiques. Le type 2, causé par des streptocoques du groupe A, survient chez des patients auparavant en bonne santé. Le traitement est un débridement chirurgical urgent et une antibiothérapie agressive à large spectre avec la benzylpénicilline et la clindamycine (+ métronidazole dans le type 1).
Gangrène gazeuse
Cette infection des tissus profonds par Clostridium spp., surtout C. perfringens, est une complication de plaie perforante. Les toxines produites par le germe causent une nécrose musculaire avec douleur et gonflement tissulaire, une production de gaz et un sepsis avec évolution rapide vers un choc. Le traitement est un débridement chirurgical urgent et des antibiotiques par voie intraveineuse. Les diverses espèces de Clostridium sont sensibles à une combinaison de benzylpénicilline et de clindamycine. Cependant, il peut être difficile de différencier la gangrène gazeuse d’une fasciite nécrosante, d’où le recours à des antibiotiques à large spectre (voir ci-dessus).
Infections fongiques
Dermatophytes est le nom commun aux trois types de champignons qui causent des infections de la couche externe de la peau, des cheveux et des ongles. Les principaux genres responsables sont Trichophyton, Microsporum et Epidermophyton. Tous sont transmis par contact direct entre humains ou avec des animaux infectés, ou par contact indirect avec des squames de peau ou de cheveux ; les douches communes, les piscines et le partage de serviettes ou de vêtements de sport contribuent à la transmission. Les divers types d’infections à dermatophytes sont les suivants.
• Tinea corporis – la teigne du corps se présente habituellement comme des plaques asymétriques, légèrement prurigineuses, qui montrent une fausse apparence de guérison centrale ; les bords, en extension continue, sont surélevés et squameux.
• Tinea faciei – la teigne du visage se développe souvent après l’utilisation de corticoïdes topiques. Elle tend à être plus érythémateuse et moins squameuse que les lésions du tronc.
• Tinea cruris – la teigne de l’aine forme des plaques rouges bien délimitées avec un bord en forme d’arc s’étendant sur la face interne de la cuisse.
• Tinea pedis – les lésions du pied d’athlète sont soit confinées aux espaces entre les orteils où la peau est blanche, macérée et fissurée, soit plus diffuses, causant un érythème squameux de la plante s’étendant sur les côtés du pied.
• Tinea manuum – la teigne des mains se manifeste par un érythème palmaire, squameux et diffus, la peau étant épaissie en certains endroits et exfoliée à d’autres.
• Tinea capitis – la teigne du cuir chevelu est plus fréquente chez les enfants. Les lésions vont d’une desquamation diffuse et modérée sans perte de cheveux à des plaques circulaires, squameuses, alopéciques et hérissées de cheveux cassés.
• Tinea unguium – la teigne des ongles (ou onychomycose à dermatophytes) provoque une décoloration asymétrique d’un ou de plusieurs ongles. L’aspect peut être blanchâtre ou jaune-noir avec épaississement de la lame unguéale et accumulation de matière blanche friable sous l’ongle.
Candidose
Candida albicans est une levure qui fait partie parfois de la flore de l’organisme, en particulier dans le tractus gastro-intestinal. Il colonise la peau là où elle offre un environnement chaud et humide, comme dans l’aine, les espaces entre les orteils et autour des ongles. L’infection peut imiter la teigne, mais dans l’aine, de petites zones circulaires érythémateuses se forment en avant du bord de la lésion principale (lésions satellites). L’infection localisée est traitée par une crème antifongique. En cas d’infection unguéale, il faut prescrire un antifongique oral (itraconazole, 100 g par jour pendant 3 à 6 mois). Candida peut également infecter les muqueuses de la bouche et des voies génitales, en particulier chez les patients prenant des antibiotiques (en raison de la suppression de la flore bactérienne protectrice) ou chez les patients immunodéprimés, chez qui l’infection peut se généraliser et mettre la vie en danger.
Affections cutanées courantes
Acné vulgaire
Il s’agit d’une affection fréquente qui survient à l’adolescence, mais qui peut persister jusqu’au début, et même jusqu’au milieu, de la vie adulte.
Soins
• Traitement de première ligne. Pour une affection bénigne, on utilise des agents topiques : des kératolytiques (peroxyde de benzoyle), des rétinoïdes topiques (trétinoïne ou isotrétinoïne) ou des agents de type rétinoïde (adapalène) et, contre l’acné inflammatoire, des antibiotiques (érythromycine, clindamycine).
• Traitement de deuxième ligne. Une faible dose d’antibiotique par voie orale, par exemple l’oxytétracycline, la minocycline, l’érythromycine ou la triméthoprime, peut souvent aider, mais la cure doit durer 3 à 4 mois. En l’absence de contre-indication à la contraception orale, un traitement hormonal avec l’acétate de cyprotérone 2 mg/éthinylestradiol 35 μg (co-cyprindol) est utile chez les femmes.
• Traitement de troisième ligne. Si les mesures recommandées ci-dessus échouent, un rétinoïde oral (isotrétinoïne ou acitrétine) est prescrit. On peut également y recourir en cas d’acné nodulokystique qui laisse des cicatrices ou si l’affection cause des perturbations psychologiques. Les rétinoïdes sont des analogues synthétiques de la vitamine A qui modifient la croissance et la différenciation cellulaire. Il sont efficaces, mais hautement tératogènes, et donc absolument contre-indiqués pendant la grossesse. Toutes les femmes en âge de procréer doivent passer un test de grossesse et recourir à la contraception avant le traitement, les tests de grossesse étant répétés mensuellement durant la cure de 4 mois. Plus de 90 % des patients répondent au traitement et 65 % obtiendront une « guérison » de longue durée.
Psoriasis
Le psoriasis est une prolifération cutanée excessive, chronique, commune et caractérisée par la présence de plaques squameuses rouges bien délimitées, en général dans le cuir chevelu et à la face d’extension des articulations comme les coudes et les genoux. L’incidence est la même dans les deux sexes ; l’âge du début des symptômes comprend deux pics : 16 à 22 ans et 55 à 60 ans.