17. L’angoisse

ses sources et ses manifestations chez le soignant



◗ Les diverses origines de l’angoisse du soignant


La difficulté accrue du travail de l’infirmier vient également du fait qu’il doit répondre de plus en plus à des demandes d’origines diverses : celles du malade (c’est le fondement du travail infirmier) mais aussi celles des familles qui sont de plus en plus mises à contribution et présentes sur les lieux de soins ; enfin, celles de l’équipe.

Le soignant aussi est soumis à l’angoisse. Cette dernière peut avoir plusieurs sources :


– l’angoisse devant la souffrance du patient ;


– l’angoisse de mal faire ou de ne pas savoir faire ;


– celle liée aux relations avec la famille du patient ;


– le mal être institutionnel dans les liens d’équipe ou dans l’impossibilité de s’extraire du faire pour élaborer, par la parole et l’analyse de sa pratique, ses ressentis ;


– l’angoisse due à la position de stagiaire pour les infirmiers débutants qui se voient souvent confier les tâches que ne veulent pas faire les autres…

Il est normal que l’élève infirmier puisse se retrouver complètement décontenancé, sur le terrain, dans la clinique donc, parce qu’il aura à faire face à des situations violentes auxquelles les cours ne peuvent préparer.


L’angoisse d’une étudiante en soins infirmiers dans un service de rééducation


Une jeune étudiante raconte la chose suivante :

« B978229470192450017X/u17-01-9782294701924.jpg is missing‘ai dû prendre en charge, dans un service de rééducation, une personne sourde et muette qui ne savait ni lire ni écrire et avec laquelle je ne pouvais pas communiquer. La personne, pour me faire comprendre sa souffrance et sa désapprobation, se jetait violemment par terre, ce que je ressentais comme très violent pour moi aussi à chaque fois. Personne ne connaissait le langage des signes. Le patient, en agissant ainsi, a aggravé son état par des fractures diverses. Je me sentais nulle. »




Personne n’avait dit à la jeune stagiaire d’essayer d’écouter la personne dans ce qu’elle montrait par son regard, par ses gestes, ce qui entraînait ce patient à user de stratagèmes extrêmes qui l’ont conduit à aggraver son problème physique. Et là, seule une adaptation à la situation, à la personne, la recherche d’une trouvaille faute d’apprentissage du langage des signes (à inclure dans la formation, pour les volontaires ?) pouvait permettre d’inventer et de mettre en place une situation de communication spécifique, nécessaire aux soins et à l’acceptation des soins par le patient. En outre, l’impuissance de l’étudiante à comprendre le patient lui faisait ressentir son intervention comme insatisfaisante alors qu’en fait l’absence de dispositifs institutionnels adaptés participait à cette violence.

Et puis, il y a ceux qui découvrent ce qu’implique de souffrir et prennent peur : souvent, lorsque les élèves infirmiers font leur premier stage auprès des personnes âgées, ils sont bouleversés car ce qu’ils voient les renvoie à leur propre vieillissement, à leur crainte de la déchéance physique ou à celle de leurs proches. Parfois, un profond dégoût naît du spectacle qui s’offre à eux dans la crudité et la cruauté de ce qu’il peut arriver dans l’existence d’un de leur semblable. C’est tout à fait humain que ces sensations de tristesse, de détresse même, de recul devant la lourdeur de la tâche et la répulsion qu’elle peut inspirer surviennent chez l’élève infirmier et même par la suite, chez des professionnels plus avertis.

La question, déjà soulevée dans la première partie du livre, est de pouvoir transformer ces ressentis, parfois angoissants, en motivations pour poursuivre ce métier. Les formateurs des IFSI ont un rôle d’encadrement des études et des stages à jouer en ce sens.

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May 9, 2017 | Posted by in MÉDECINE INTERNE | Comments Off on 17. L’angoisse

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