Chapitre 16. Gestion de la famille, grands problèmes familiaux
Il existe des thérapies familiales spécifiques ; certaines obéissent au modèle systémique où des enjeux de communication, de rôle, font l’objet d’une investigation. D’autres thérapies familiales concernent une approche psychanalytique ; les enjeux se situent au niveau de fantasmes familiaux, de secrets, de malédictions ou de mythes. Il est cependant fréquent que l’on sente le rôle de la famille, au niveau de la prise de rendez-vous, dans de possibles interventions pour abréger la psychothérapie, voire dans un désir de changement de psychothérapeute. Dès lors, la question concernant les familles doit faire l’objet d’une réflexion assise, pondérée.
« Gestion des familles »
Un œil neuf pour le patient
Dans les consultations initiales, dans la salle d’attente, peuvent se présenter des groupes familiaux : conjoint, parents, frères ou sœurs. Le fait qu’ils accompagnent un patient n’est jamais neutre. La règle générale veut que l’on salue, en se présentant, l’ensemble des membres venus, qu’on propose de rencontrer le patient et de réserver un temps d’entretien à la fin de la consultation en présence du patient pour discuter avec les personnes accompagnantes. Il est important de garder toutes les impressions et les vécus que suscite un patient seul pour y réfléchir et les analyser. Mais cette règle de garder l’œil neuf pour le patient peut connaître deux difficultés. D’une part, les patients, venus à contrecœur, manifesteront leur réticence en limitant au maximum les échanges et en taisant bon nombre de leurs problèmes. D’autre part, dans le cas de familles qui se lèvent d’un bloc, on a l’impression que tout le monde veut rentrer dans le bureau : ceci introduit l’idée d’une problématique familiale à élucider. Garder l’œil neuf pour le patient demeure la règle, il est toujours nécessaire de lui demander, quand on le voit seul à seul, s’il est d’accord pour qu’on reçoive les membres de la famille qui l’ont accompagné. On reçoit toujours les accompagnants en présence du patient même s’ils ont fait la demande de voir le thérapeute en aparté. En effet, voir patient et famille séparément accentue des clivages potentiels, peut être source de mystère et surtout peut amener le patient à s’interroger sur sa place réelle dans la thérapie.
Informations latérales
Il est habituel que, sous le sceau du secret, des familles envoient des lettres, des courriels ou téléphonent pour donner des informations « que le patient ne vous dira pas » ou « qu’il est important que vous sachiez ». Certains thérapeutes refusent d’en prendre connaissance pour ne pas interférer avec la thérapie. D’autres tiennent compte des informations et glisseront dans une consultation ultérieure qu’ils ont reçu des informations de la part de la famille concernant tel point ou tel autre. Ces informations sont d’autant plus difficiles à gérer que les lettres ou les courriels relevant du dossier du patient lui appartiennent et pourraient lui être communiqués. Dans un nombre de cas non négligeables, ces lettres s’accompagnent d’une mention : « Je vous transmets ces informations bien sûr sous le sceau du secret, et mon mari, ou ma fille… ne sont pas au courant de ce que je vous dis. ». Si l’on veut maintenir un niveau d’alliance honorable, l’information de ce type de courrier sera délivrée au patient.
Retour d’information aux proches
Il arrive que le psychothérapeute connaisse personnellement un membre de la famille ou un conjoint. Lorsque cette connaissance est trop rapprochée, répétitive, il évitera de prendre le patient en psychothérapie, n’ayant plus la neutralité nécessaire. Il pourra cependant rencontrer à une ou deux reprises un patient avant de l’aiguiller vers une autre thérapeutique.
Il faut demander au patient ce que l’on peut transmettre à un proche si celui-ci interroge sur un diagnostic, ou l’évolution d’une thérapie. Ceci concerne tout particulièrement les jeunes patients ou les adolescents, à qui il faudra systématiquement demander : « Si ton père ou ta mère m’interroge, que puis-je leur transmettre ou que puis-je leur dire ?… ».
Événements graves en cours de psychothérapie
Il arrive qu’une famille signale après quelques séances qu’un patient se drogue, a une consommation très importante d’alcool ou présente des conduites à risque sévères. Elle peut également informer qu’il a arrêté complètement tout traitement ou qu’il fait semblant de prendre un traitement sans le suivre régulièrement. Le caractère délicat de ces informations tient au fait qu’elles sont délivrées à l’insu du patient. Si on peut demander à la famille de prévenir le patient qu’elle communique ces informations, ceci simplifie la relation ; sinon, on peut interroger le patient de manière détournée sur la réalité d’une information ou d’une autre. S’il confirme les informations, le contexte se simplifie. S’il n’en fait pas mention, elles resteront pratiquement inutilisables.