16: Caractéristiques structurelles des jeux de hasard et d’argent

Chapitre 16 Caractéristiques structurelles des jeux de hasard et d’argent



Lorsque l’on s’intéresse aux facteurs de risque inhérents aux jeux de hasard et d’argent (JHA), autrement dit les caractéristiques pouvant motiver les individus à jouer, on distingue les caractéristiques situationnelles et structurelles (Griffiths, 2003). Les caractéristiques situationnelles favorisent l’initiation des conduites de jeu. Il s’agit essentiellement de caractéristiques environnementales, l’utilisation de la publicité ou encore la présence de micro-caractéristiques comme l’existence d’un distributeur d’argent à proximité d’un lieu de jeu ou la possibilité de consommer du tabac, de l’alcool ou d’autres toxiques en jouant. Les caractéristiques structurelles sont responsables du maintien des conduites de jeu, et parmi elles, certaines jouent un rôle particulièrement important dans le développement des problèmes de jeu. C’est notamment le cas de la fréquence de l’événement, de l’intervalle de paiement, de l’illusion du contrôle et des « presque gains ».



Fréquence de l’événement et intervalle de paiement


La fréquence de l’événement se définit par le nombre d’opportunités de jouer dans une période de temps donnée. On distingue alors les JHA dans lesquels la fréquence des événements est très élevée (que l’on appelle les jeux continus), par exemple les machines à sous ou le Rapido, des JHA dans lesquels celle-ci sera peu élevée (que l’on nomme les jeux à cycles de pari lents), par exemple le Loto ou l’Euromillion. Dans les jeux à cycles de pari lents, il existe un intervalle important entre le moment où le joueur mise, le moment où il voit les résultats et le moment il encaisse ses gains. Dans le cas des paris hippiques, si les paris sont réalisés sur un hippodrome, le jeu aura plutôt tendance à être classé dans les cycles à pari lents (c’est-à-dire à faible fréquence), alors que s’ils sont réalisés dans un point course, le jeu aura plutôt tendance à être classé dans les jeux continus (c’est-à-dire à fréquence élevée).


Il est aujourd’hui admis que la durée entre chaque événement de jeu est un facteur important dans le développement de problèmes avec certains types de jeu. Ainsi, les activités de jeu qui offrent des résultats toutes les secondes ou minutes causent plus de problèmes que les activités dont les résultats sont plus éloignés dans le temps. Cela sous-tend l’idée que certaines formes de jeu ont un potentiel addictif plus fort que d’autres.


En effet, la fréquence de jeu, quand elle est liée au résultat du jeu (gain ou perte) et à la latence de paiement, sera déterminée par certains principes psychologiques de l’apprentissage, notamment le conditionnement opérant (Skinner, 1953). Cette rapidité dans la fréquence des événements signifie aussi que le joueur peut remiser immédiatement, sans avoir le temps de penser à ses pertes. Certaines études montrent que lorsque le résultat du jeu est quasi-immédiat (2 secondes après la mise), le joueur joue beaucoup plus que lorsque que celui-ci est différé dans le temps (10 secondes) (Chòliz, 2010b).


Ainsi, la fréquence des opportunités de jouer (c’est-à-dire la fréquence de l’événement, ce qui renvoie à la rapidité du résultat et à la rapidité de rejouer) est un facteur majeur contribuant au développement des problèmes de jeu (Griffiths et Wood, 2001). Les addictions concernent d’ailleurs essentiellement la récompense et la rapidité de la récompense (cf. l’immédiateté) (Griffiths, 2003). Plus le potentiel de récompense est important, plus l’activité peut être addictive.


L’immédiateté de la récompense est maximale dans les machines à sous. Elle contribue au maintien dans le jeu, mais aussi à la fréquence de jeu (Chòliz, 2010a). De plus, le taux de retour des machines à sous est généralement très élevé (au minimum 85 %, et pouvant aller jusqu’à plus de 92 % lorsque le joueur mise 3 pièces), générant une récompense intermittente (Harrigan, 2007). Il ne s’agit pas nécessairement de gros, mais de petits gains, qui entretiennent la croyance du joueur et renforcent sa motivation au jeu. Or, le renforcement positif intermittent est plus puissant et maintient plus efficacement un comportement que le renforcement systématique (Skinner, 1953). Le Rapido possède également un potentiel addictif très fort dû à la rapidité du résultat (tirage toutes les deux minutes et demi) et donc de la récompense (Bonnaire et al., 2004), ce que confirme l’étude menée récemment par l’Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies (Costes et al., 2011).


Néanmoins, on ne peut pas définir le niveau de fréquence à partir duquel un individu deviendrait dépendant, car les addictions sont toujours le fruit de plusieurs facteurs combinés, parmi lesquels la fréquence n’est qu’une donnée de l’ensemble de l’équation.


Cela ne signifie pas non plus que les formes de jeux à cycles de pari lents ne sont pas addictifs, mais que leur potentiel addictif est moins important. Par exemple, certaines données de la littérature montrent que le potentiel addictif des jeux de grattage est généralement considéré comme modéré (DeFuentes-Merillas et al., 2003; Bonnaire et al., 2004).

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May 23, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 16: Caractéristiques structurelles des jeux de hasard et d’argent

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