15 Bloc sus-claviculaire échoguidé
L’approche sus-claviculaire fut la première technique décrite pour l’obtention de l’anesthésie du plexus brachial [1]. Cette technique était réalisée sous contrôle direct de la vue [1]. Elle est particulièrement utile, car toutes les chirurgies localisées sous l’épaule peuvent être réalisées. Les indications incluent la chirurgie du coude, de l’avant-bras et de la main. Les indications non chirurgicales incluent les syndromes douloureux régionaux complexes, les douleurs postamputations, les maladies et lésions vasculaires et les douleurs cancéreuses. En raison du risque de pneumothorax [2], cette technique est moins fréquemment réalisée que les autres techniques de blocage du plexus brachial telles que le bloc interscalénique ou axillaire. Les techniques échoguidées permettent la visualisation de la plèvre et diminuent probablement le risque de pneumothorax lors des blocs supraclaviculaires.
Anatomie échographique
Le triangle postérieur du cou a des limites bien décrites qui correspondent à la clavicule au niveau de la base, au bord postérieur du muscle sterno-cléido-mastoïdien en avant et au muscle trapèze en arrière, formant à eux trois la fosse sus-claviculaire. La fosse sus-claviculaire est recouverte par la peau, les tissus sous-cutanés et les branches cutanées sus-claviculaires du plexus cervical superficiel. Le muscle scalène antérieur prend son origine au niveau des tubercules antérieurs des processus transverses des quatrième, cinquième et sixième vertèbres cervicales et s’insère à la face antérieure de la première côte. Au niveau de son insertion, le muscle scalène sépare deux structures vasculaires importantes, l’artère et la veine sous-clavière, respectivement situées en arrière et en avant du muscle. En arrière et au-dessus de l’artère se trouve le plexus brachial, reposant sur la face antérieure du muscle scalène moyen. Le muscle scalène moyen prend son origine au niveau des tubercules postérieurs des processus transverses des quatre à cinq premières vertèbres cervicales et s’insère sur la face externe de la première et de la deuxième côte. Des rapports anatomiques vasculaires importants sont retrouvés au niveau de cette région. L’artère sous-clavière émerge à droite du tronc brachiocéphalique et à gauche de l’arche aortique. L’artère sous-clavière constitue un repère de base lors de la réalisation du bloc du plexus brachial échoguidé. L’artère sous-clavière donne naissance à l’artère vertébrale qui pénètre le foramen intertransversaire (de la sixième vertèbre cervicale) et qui est situé en avant du trajet des nerfs spinaux. L’artère vertébrale représente un point d’intérêt lors de la réalisation de techniques d’anesthésie interscaléniques.
Les techniques sus-claviculaires se focalisent sur la fosse sus-claviculaire où les troncs primaires antérieurs, moyens et inférieurs se divisent en leurs branches antérieures et postérieures. À ce niveau, le plexus est superficiel et de ce fait, il est nécessaire d’utiliser des sondes haute fréquence (10 MHz) afin de pouvoir identifier les structures. Des difficultés techniques sont rencontrées lors de l’étude de la région sus-claviculaire en raison de la dépression sus-claviculaire qui complique à la fois la manipulation de la sonde et la ponction à l’aiguille. Enfin, bien que les troncs primaires du plexus soient facilement identifiés entre les muscles scalènes dans l’espace interscalénique, au niveau de la zone sus-claviculaire, le plexus est plus difficile à localiser. Bien que le Doppler couleur ne soit pas nécessaire pour identifier l’artère sous-clavière, son utilisation facilite grandement l’identification du plexus brachial en permettant de différencier les nerfs (hypo-échogène et absence d’effet Doppler) des branches artérielles ou veineuses retrouvées dans la zone (hypo-échogène avec effet Doppler). L’anatomie échographique de la région sus-claviculaire est représentée sur la figure 15.1. La plèvre est identifiée comme une fine ligne hyperéchogène recouvrant le tissu pulmonaire anéchogène.
Technique
Un accès intraveineux ainsi qu’un monitorage par électrocardiographie, oxymétrie de pouls et pression artérielle non invasive sont mis en place. L’optimisation du confort du patient et de l’opérateur est une étape importante de la procédure. Pour la réalisation d’un bloc sus-claviculaire échoguidé, le patient est positionné en décubitus dorsal avec la tête tournée du côté opposé au côté bloqué. L’écran de l’appareil, la sonde et l’aiguille doivent être dans le champ visuel de l’opérateur. Pour le bloc sus-claviculaire, l’écran de l’échographe est placé sous l’épaule du côté à bloquer (figure 15.2). Les scialytiques du bloc opératoire peuvent être utilisés pour maintenir un fond lumineux. Il est demandé au patient de lever la tête afin de permettre au praticien d’identifier le sillon interscalénique. Les pulsations de l’artère sous-clavière sont palpées au-dessus de la clavicule. La sonde d’échographie doit être tenue entre le pouce, l’index et l’annulaire de la main non dominante. Le fait de laisser reposer le petit doigt et le bord ulnaire de la main sur le patient permet de stabiliser la sonde d’échographie. L’application d’une pression ferme et égale sur toute la surface avec la sonde procure habituellement les meilleures images. La sonde d’échographie linéaire, haute fréquence, de 38 mm (MicroMaxx™, SonoSite, Bothell, États-Unis) est orientée au-dessus de la clavicule dans un axe coronal oblique par rapport au cou (figure 15.3). Cela permet d’obtenir une orientation échographique transverse. Cette visualisation transverse facilite l’identification des nerfs et des structures annexes. Elle permet aussi la vérification de la diffusion circonférentielle de l’anesthésique local autour des nerfs. Une sonde échographique convexe peut aussi être utilisée pour ce bloc. L’orientation de l’écran de l’échographe doit correspondre à l’orientation du champ échographique, c’est-à-dire que la droite de l’écran doit correspondre à la droite de la sonde. Il convient d’optimiser les réglages de l’échographe : profondeur et gain. Le développement et le maintien d’une technique de balayage échographique prédéterminée constituent une aide précieuse à l’amélioration du succès et de la confiance en soi de l’opérateur. Le balayage échographique doit se faire du haut vers le bas. La trachée, l’artère carotide commune, la veine jugulaire interne et le muscle sterno-cléido-mastoïdien sont identifiés. La sonde est déplacée latéralement afin d’identifier le bord latéral du muscle sterno-cléido-mastoïdien. Sous le bord de ce muscle reposent les muscles scalènes antérieurs et moyens avec les racines du plexus brachial entre ceux-ci. Il peut être demandé au patient de renifler afin de permettre à l’opérateur d’identifier les muscles scalènes. La mobilisation de la sonde dans cette position, en descendant le long du cou, facilite l’identification des racines du plexus brachial. Les racines du plexus brachial apparaissent comme de larges structures hypo-échogènes. Les racines du plexus brachial peuvent être échographiées juste au-dessus de la clavicule. À ce niveau, le plexus brachial est un amas de nodules hypo-échogènes latéral à l’artère sous-clavière qui repose sur la première côte (hyperéchogène). La plèvre est identifiée comme étant une fine ligne hyperéchogène entourant le tissu pulmonaire anéchogène.