Chapitre 12 Système digestif
L’appellation système digestif désigne collectivement le canal alimentaire, ses organes annexes et divers processus digestifs se produisant à des niveaux différents du canal pour préparer l’absorption des aliments ingérés. Le canal (ou conduit) alimentaire débute par la bouche, traverse le thorax, l’abdomen et le pelvis, et se termine à l’anus (Fig. 12.1). Il a une structure générale, modifiée à différents niveaux pour permettre les processus survenant à chacun d’eux (Fig. 12.2). Les processus digestifs décomposent progressivement les aliments ingérés jusqu’à ce que leurs produits puissent être absorbés. Par exemple, la viande, même cuite, est chimiquement trop complexe pour être absorbée dans le canal alimentaire. La digestion libère ses constituants : acides aminés, sels minéraux, graisses et vitamines. Les enzymes digestives (p. 25) qui effectuent ces changements sont sécrétées dans le canal par des glandes spécialisées dont certaines siègent dans la paroi du canal, et d’autres en dehors de celui-ci mais qui ont des conduits les conduisant au canal.
Après absorption, les nutriments sont utilisés pour la synthèse des constituants corporels. Ils fournissent les matériaux bruts pour la production de nouvelles cellules, d’hormones et d’enzymes, ainsi que l’énergie nécessaire à ces processus et à d’autres, et aussi à l’élimination des déchets.
Les activités du système digestif peuvent être regroupées sous cinq principales rubriques.
Organes du système digestif (Fig. 12.1)
Organes annexes
Diverses sécrétions sont déversées dans le tractus alimentaire, certaines par les glandes de la muqueuse de ces organes, par exemple le suc gastrique sécrété par les glandes de la muqueuse bordant l’estomac, et d’autres par des glandes situées en dehors du tractus. Ces dernières sont les glandes annexes de la digestion, et leur sécrétion passe par des canaux pour entrer dans le tractus. Il s’agit :
Structure de base du canal alimentaire (Fig. 12.2)
Les parois du tractus alimentaire sont formées par quatre couches tissulaires :
Adventice ou séreuse
C’est la couche la plus superficielle. Dans le thorax, elle est faite de tissu fibreux lâche; dans l’abdomen, les organes sont recouverts par une membrane séreuse appelée péritoine.
Péritoine
C’est la plus grande séreuse de l’organisme (Fig. 12.3A). Il s’agit d’un sac fermé contenant une petite quantité de liquide séreux, situé dans la cavité abdominale. Il est richement vascularisé par des vaisseaux sanguins et des vaisseaux lymphatiques, et il contient de nombreux nœuds lymphatiques. Il fournit une barrière physique à l’extension de l’infection, et il peut isoler un foyer infectieux tel qu’une appendicite, empêchant l’atteinte d’autres structures abdominales. Il a deux feuillets :
Le péritoine pariétal borde la paroi abdominale antérieure.
Les deux feuillets du péritoine sont en contact, et le frottement entre eux est évité par la présence de liquide séreux sécrété par les cellules péritonéales; de ce fait, la cavité péritonéale n’est qu’une cavité potentielle. Une disposition semblable s’observe au niveau de la plèvre (p. 259), membrane entourant chaque poumon. Chez l’homme, la cavité est entièrement close; chez la femme, les trompes utérines s’ouvrent dans la cavité, et les ovaires sont les seules structures à l’intérieur d’elle (Ch. 18).
Couche musculaire
Sauf exception, cette couche est faite de deux couches de muscle lisse (non soumis à la volonté). Les fibres musculaires de la couche externe sont disposées longitudinalement, celles de la couche interne sont circulaires. Entre ces deux couches musculaires se situent des vaisseaux sanguins, des vaisseaux lymphatiques et un plexus (réseau) de nerfs sympathiques et parasympathiques appelé plexus myentérique (d’Auerbach, Fig. 12.2). Ces nerfs sont destinés au muscle lisse et aux vaisseaux sanguins adjacents.
La contraction et le relâchement de ces couches musculaires se produisent par vagues, qui poussent plus avant le contenu du tractus. Ce type de contraction du muscle lisse est appelé péristaltisme (Fig. 12.4) et il est sous l’influence des nerfs sympathiques et parasympathiques. La contraction musculaire mélange aussi les aliments et les sucs digestifs. Le mouvement plus avant du contenu du tractus est contrôlé à divers endroits par des sphincters, qui sont d’épais anneaux musculaires circulaires. La contraction des sphincters régule le mouvement vers l’avant. Ils agissent aussi comme valves, empêchant le retour en arrière du contenu du tractus. Ce contrôle donne à la digestion et à l’absorption le temps nécessaire à leur production.
Sous-muqueuse
Cette couche consiste en du tissu conjonctif aréolaire contenant du collagène et un certain nombre de fibres élastiques; celui-ci relie la couche musculaire à la muqueuse. Des plexus de vaisseaux sanguins et de nerfs, des vaisseaux lymphatiques et une quantité variable de tissu lymphoïde sont situés dans cette couche. Les vaisseaux sanguins sont des artérioles, des veinules et des capillaires. Les plexus nerveux sont les plexus sous-muqueux (de Meissner, Fig. 12.2), faits de fibres sympathiques et parasympathiques allant à la bordure muqueuse.
Muqueuse
La muqueuse comporte trois couches tissulaires :
Membrane muqueuse
Dans les parties du tractus sujettes à une grande usure naturelle ou à des lésions mécaniques, cette couche consiste en un épithélium pavimenteux stratifié avec des glandes à mucus juste au-dessous de la surface. Dans les régions où les aliments sont déjà mous et humides et où la sécrétion des sucs digestifs ainsi que l’absorption se produisent, la membrane muqueuse est faite de cellules épithéliales cylindriques entremêlées de cellules caliciformes sécrétant du mucus (Fig. 12.5). Le mucus lubrifie les parois du tractus et les protège des effets nuisibles des enzymes digestives. Au-dessous de la surface des régions bordées par un épithélium cylindrique, il y a des groupements de cellules spécialisées, ou glandes, qui déversent leur sécrétion dans la lumière du tractus. Les sécrétions comprennent :
Il s’agit de sucs digestifs, contenant des enzymes qui rompent chimiquement les aliments. Une quantité variable de tissu lymphoïde est située sous la bordure épithéliale; celui-ci protège contre les microbes ingérés.
Innervation
Le canal alimentaire et ses organes accessoires reçoivent des nerfs des deux parties du système nerveux autonome, c’est-à-dire sympathique et parasympathique (Fig. 12.6). Leurs actions sont antagonistes, et l’un peut avoir à un moment donné une plus grande influence que l’autre, suivant les besoins corporels. Pour ce qui est de la digestion, il s’agit normalement d’une activité accrue du système nerveux parasympathique.
Innervation parasympathique
Cette innervation de la plus grande partie du canal alimentaire et de ses organes accessoires est fournie par une paire de nerfs crâniens, les nerfs vagues. La partie la plus distale du tractus est innervée par les nerfs sacraux. Les effets de la stimulation parasympathique incluent :
Bouche (Fig. 12.7)
La bouche, ou cavité orale, est limitée par des muscles et des os.
En avant | – par les lèvres. |
En arrière | – elle est en continuité avec l’oropharynx. |
Latéralement | – par les muscles des joues. |
En haut | – par le palais dur osseux et le palais mou musculaire. |
En bas | – par la langue et les tissus mous du plancher de la bouche. |
La cavité orale est bordée par une membrane muqueuse faite d’un épithélium pavimenteux stratifié contenant de petites glandes sécrétant du mucus.
La partie de la bouche entre les gencives et les joues est le vestibule, le reste de la cavité est la cavité orale propre. La membrane muqueuse bordant les joues et les lèvres se réfléchit sur les gencives, ou rebords alvéolaires, et elle est en continuité avec la peau de la face.
Le palais forme le toit de la bouche; il est divisé en palais dur en avant et palais mou en arrière (voir Fig. 12.1). Les os formant le palais dur sont les os maxillaire et palatin. Le palais mou (ou voile du palais) est musculaire; il s’incurve en arrière depuis l’extrémité postérieure du palais dur, et il s’unit latéralement aux parois du pharynx.
L’uvule (ou luette) est un repli musculaire incurvé recouvert d’une membrane muqueuse, pendant du milieu du bord libre du palais mou. Quatre replis de membrane muqueuse naissent de l’extrémité supérieure de l’uvule; deux se dirigent en bas pour former de chaque côté des arcs membraneux. Le repli postérieur de chaque côté constitue l’arc palato-pharyngien, le repli antérieur forme de chaque côté l’arc palato-glosse. Un amas de tissu lymphoïde appelé amygdale (tonsille) palatine est situé de chaque côté entre ces deux arcs (NdT : appelés ainsi piliers de l’amygdale).
Langue
La langue est une structure musculaire striée occupant le plancher de la bouche. Elle est attachée par sa base à l’os hyoïde (voir Fig. 10.4, p. 252), et un repli de la membrane muqueuse recouvrant sa face inférieure, appelé frein de la langue, la rattache au plancher de la bouche (Fig. 12.8). Sa surface supérieure consiste en un épithélium pavimenteux stratifié, avec de nombreuses papilles (petites projections). Beaucoup d’entre elles contiennent les récepteurs sensitifs (terminaisons nerveuses spécialisées) pour le sens du goût, dans les bourgeons du goût (voir Fig. 8.25, p. 216). Il existe plusieurs types de papilles; cependant, aucune relation évidente n’a été retrouvée entre elles et la discrimination des différents goûts.
Vascularisation
L’artère linguale amène de chaque côté la plus grande partie du sang artériel de la langue. Le drainage veineux se fait de chaque côté par la veine linguale, qui rejoint la veine jugulaire interne homolatérale.
Innervation
Les nerfs impliqués sont, de chaque côté :
Dents
Les dents sont enchâssées dans les alvéoles des rebords alvéolaires de la mandibule et du maxillaire (Fig. 12.9). Chaque personne naît avec deux jeux, ou dentition, les dents temporaires ou déciduales (ou dents de lait), et les dents permanentes (Fig. 12.10). Les dents des deux jeux sont présentes à la naissance, sous forme immature, dans la mandibule et le maxillaire.
Figure 12.10 Le toit de la bouche.
A. Les dents déciduales – vue par en dessous. B. Les dents permanentes – vue par en dessous.
Il y a 20 dents temporaires, 10 par mâchoire. Elles commencent à sortir (« éruption dentaire ») vers l’âge de 6 mois, et elles sont toutes présentes après l’âge de 24 mois (Tableau 12.1).
Fonctions des dents
Suivant leurs fonctions, les dents ont des formes différentes. Les incisives et les canines sont les dents qui coupent, utilisées pour mordre les aliments, alors que les prémolaires et les molaires, qui ont une large surface plate, sont utilisées pour broyer ou mâcher les aliments (Fig. 12.11).
Structure d’une dent (Fig. 12.12)
Bien que les dents aient des formes distinctes, leur structure est identique, comportant :
La cavité pulpaire, au centre de la dent, contient des vaisseaux sanguins, des vaisseaux lymphatiques et des nerfs; elle est entourée par une substance dure semblable à de l’ivoire appelée dentine. L’émail est une mince couche de substance très dure à l’extérieur de la dentine de la couronne. La racine de la dent est par ailleurs recouverte d’une substance semblable à de l’os appelée cément, qui fixe la dent dans son alvéole. Les vaisseaux sanguins et les nerfs passent dans la dent par un petit orifice situé à l’apex de chaque racine.
Vascularisation
La plus grande partie de l’apport de sang aux dents se fait par des branches de l’artère maxillaire de chaque côté. Le drainage veineux est assuré par des veines se déversant dans les veines jugulaires internes.