Chapitre 12
Pharmacologie et prescriptions médicamenteuses14
SAVOIRS
Définitions et notions de pharmacologie
Médicaments
La pharmacologie est la science des médicaments.
« On entend par médicament toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l’égard des maladies humaines ou animales, ainsi que tout produit pouvant être administré à l’homme ou à l’animal en vue d’établir un diagnostic médical ou de restaurer, corriger ou modifier leurs fonctions organiques » (extrait de l’article L.511 du Code de la santé publique).
De ce fait, on distingue quatre grands groupes de médicaments :
les médicaments préventifs : ils sont administrés dans le but de prévenir une maladie (vaccin) éventuelle ou de modifier un processus physiologique (contraceptifs oraux) ;
les médicaments curatifs : ils s’attaquent à l’agent causal de la maladie ou étiologie (antibiotiques) ;
les médicaments symptomatiques : ils ne s’attaquent pas à la maladie, mais guérissent les symptômes. Ce sont les plus nombreux ;
les médicaments substitutifs : ils sont administrés pour apporter à l’organisme un constituant absent (vitamine, insuline).
Pharmacologie
La pharmacologie comprend la pharmacodynamie et la pharmacocinétique.
Pharmacodynamie
Étude des effets d’un médicament chez un être vivant ; c’est « ce que le médicament fait sur l’organisme ». Elle dépend de la dose reçue de médicaments. Les objectifs sont d’évaluer la relation concentration-effet et de déterminer l’intervalle thérapeutique entre deux administrations de médicaments.
Pharmacocinétique
Étude descriptive et quantitative du devenir d’un médicament dans l’organisme ; c’est « ce que l’organisme fait d’un médicament ».
Cette étude s’effectue selon les étapes suivantes :
l’absorption-résorption, qui est un processus par lequel le médicament passe dans la circulation générale ;
la distribution, qui est la délivrance du médicament au niveau des différents organes ;
le métabolisme, qui est la transformation du médicament en un composé éliminable par le rein ou la bile (biotransformation) ;
Absorption-résorption
Il s’agit d’un processus par lequel le médicament passe dans la circulation générale ; ce processus est plus ou moins rapide selon la voie d’administration et la forme pharmaceutique.
Il faut savoir que selon la voie d’administration, la totalité du médicament injecté n’atteint pas la circulation générale. Ce phénomène introduit deux notions essentielles que sont l’effet de premier passage et la biodisponibilité.
Il s’agit de la perte du médicament par métabolisation avant son arrivée dans la circulation générale.
C’est la fraction ou le pourcentage d’un médicament en solution qui atteint la circulation générale et la vitesse à laquelle le médicament atteint son site d’action.
Elle est influencée par plusieurs facteurs :
Elle est modifiée par plusieurs facteurs :
La biodisponibilité relative est la quantité de médicament qui, après administration, atteint la circulation générale et la vitesse à laquelle se réalise le processus lorsque le même médicament est administré au même sujet sous deux ou plusieurs formes pharmaceutiques.
Distribution
Elle consiste à répartir le médicament dans les différents organes et les tissus ; elle comprend le transport du médicament dans la circulation générale et sa diffusion tissulaire.
Les médicaments sont transportés vers les organes par le plasma sous deux formes, une forme libre et une forme liée aux protéines plasmatiques :
la forme libre : les molécules sont libres ; c’est la forme la plus efficace car elle est immédiatement disponible ;
la forme liée aux protéines plasmatiques : les molécules sont liées aux protéines et ne participent pas immédiatement à l’action. Leur libération se fait au fur et à mesure de la disparition de la forme libre. La liaison aux protéines augmente la solubilité du médicament donc la rapidité du transport dans l’organisme.
La protéine la plus importante est l’albumine qui va fixer le plus grand nombre de médicaments sans distinction. À des degrés moindres, on note les globulines, l’hémoglobine et la transférine, ces dernières ayant une affinité particulière selon le médicament.
Ces protéines plasmatiques peuvent être saturées lors de l’administration de plusieurs médicaments ; il en résulte une augmentation des fractions libres pouvant entraîner une majoration des effets d’un ou plusieurs des médicaments administrés.
Il est à noter que cette liaison aux protéines n’est pas systématique et que son pourcentage varie selon les médicaments.
Après absorption, les médicaments sont transportés par le plasma et atteignent leur site d’action ; la distribution varie selon leurs propriétés physico-chimiques (hydrosolubilité, liposolubilité), et la perméabilité des membranes cellulaires.
Les médicaments hydrosolubles diffusent de façon homogène dans les compartiments hydriques de l’organisme, l’eau représentant environ 60 % du poids du corps ; tous les médicaments capables de traverser les membranes vont s’y répartir de façon homogène : il s’agit de la phase aqueuse.
Certains médicaments ayant un coefficient huile/eau plus important ont une affinité pour les lipides de l’organisme ; ils vont donc diffuser dans les graisses qui représentent environ 20 % du poids du corps : il s’agit de la phase lipidique.
D’autre part, la pénétration d’un médicament dans l’organisme est soumise à la circulation sanguine dans les capillaires. Le passage des capillaires vers le liquide interstitiel est dépendant de la perméabilité de la paroi capillaire. Les capillaires ne sont pas tous égaux ; on peut citer par exemple les capillaires des glomérules rénaux plus perméables que ceux des muscles.
Les propriétés physico-chimiques des médicaments sont également concernées :
les molécules liposolubles quittent le sang rapidement ;
les molécules hydrosolubles diffusent d’autant plus vite des capillaires vers le milieu interstitiel qu’elles sont de petite taille.
Le système de distribution se répartit selon trois compartiments :
La rapidité de la diffusion dans les organes et les tissus est tributaire du débit cardiaque et des débits sanguins régionaux. L’équilibre entre le plasma et les organes très vascularisés est rapide.
Un médicament est bien distribué s’il a les caractéristiques suivantes :
Métabolisme
Ce sont les biotransformations des médicaments dans l’organisme de façon plus ou moins complète face à l’action de nombreux enzymes.
Le foie est le site préférentiel des biotransformations mais d’autres organes peuvent être concernés (rein, poumon, tube digestif).
La transformation enzymatique des molécules peut aboutir à la production de métabolites inactifs, partiellement actifs ou à l’activation de molécules qui ne l’étaient pas initialement. Les biotransformations sont importantes car elles déterminent :
la voie d’administration : un médicament dégradé par les sucs digestifs ne sera pas administré par voie orale ;
le rythme d’administration : un médicament rapidement transformé en métabolite inactif sera administré plus fréquemment ;
les médicaments inducteurs d’enzymes comme les barbituriques qui accélèrent leur propre dégradation et/ou celle de médicaments associés.
Ces phénomènes sont importants à connaître dans les interactions médicamenteuses.
Élimination
Les médicaments sont éliminés tels quels ou après transformation par différentes voies, dont la plus importante est la voie urinaire. Les autres voies sont pulmonaire, biliaire, digestive, cutanée.
L’élimination rénale est la résultante de plusieurs mécanismes complexes :
Deux notions paraissent essentielles concernant l’élimination d’un médicament :
la demi-vie d’élimination : il s’agit du temps nécessaire à l’élimination de la moitié de la concentration du médicament dans le sang. Elle permet de déterminer la fréquence d’administration d’un médicament ;
la clairance rénale : c’est le volume sanguin ou plasmatique totalement débarrassé de la substance médicamenteuse par unité de temps au niveau du rein.
La réglementation des médicaments
Les differents types de médicaments
Avant d’être commercialisé, un médicament doit bénéficier d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) délivrée par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) ou par l’Agence européenne d’évaluation du médicament (EMEA). En prenant en compte le résumé des caractéristiques du produit (RCP) qui précise la dénomination du médicament, la composition qualitative et quantitative, la forme pharmaceutique, les données cliniques… l’Agence détermine la classification du médicament :
Médicaments sans ordonnance
Également appelés médicaments en accès direct, ils sont soumis aux mêmes exigences que les autres médicaments (qualité de fabrication, bénéfices, risques…) et ne peuvent être délivrés qu’en pharmacie.
Médicaments sur ordonnance
Ces médicaments, pouvant avoir des effets toxiques sur l’homme, sont considérés comme des substances vénéneuses. Ils ne peuvent être délivrés que sur ordonnance par un médecin, un dentiste, une sage-femme (sur une liste restrictive de médicaments) et un vétérinaire (pour les spécialités animales). Il en existe trois catégories.
Liste I – Médicaments dangereux
Ce sont des « substances ou préparations et médicaments présentant des risques élevés pour la santé ».
Ils doivent être délivrés sur une ordonnance simple, datant de moins de 3 mois, et ne sont pas renouvelables, sauf indication contraire du prescripteur sur la durée du traitement ou le nombre de renouvellement. Ce dernier ne peut excéder une durée de traitement de 12 mois.
Les médicaments doivent être rangés dans des armoires fermées à clé qui leur sont spécialement réservées.
Pour être repérées facilement, les boîtes de médicaments portent un cadre rouge.
Liste II – Médicaments potentiellement dangereux
Ce sont des « médicaments ou produits vénéneux présentant pour la santé des risques directs ou indirects ».
La délivrance d’un médicament relevant de la liste II peut être renouvelée, sauf si le prescripteur l’a expressément interdit. La durée maximale de renouvellement est de 12 mois.
Les médicaments de la liste II sont rangés séparément et ne doivent pas être accessibles au public.
Pour être repérées facilement, les boites de médicaments portent un cadre vert.
Les stupéfiants
Un médicament est classé stupéfiant ou toxicomanogène lorsque son utilisation risque de créer une dépendance. Ce sont, par exemple, les antalgiques de palier III.
Les stupéfiants répondent à des règles très strictes de prescription, de délivrance et d’administration :
la prescription ne peut être effectuée que par un médecin contrairement aux substances des listes I et II qui peuvent être prescrites par les internes ou résidents ayant reçu une délégation du médecin dont ils relèvent ;
la prescription des stupéfiants est effectuée sur des feuilles numérotées extraites d’un carnet à souche de couleur également numéroté. On compte cinq sortes de carnets à souche numérotés et paginés : un rose, un blanc, un jaune, un bleu, un mauve selon la profession et le lieu d’exercice de l’utilisateur (médecin hospitalier, médecin de ville, médecin du travail, vétérinaire, chirurgien-dentiste). Les souches sont gardées trois ans ;
en milieu hospitalier, la prescription est effectuée sur une ordonnance extraite du carnet à souche de couleur rose, réservé exclusivement à la prescription de stupéfiants ;
la prescription doit indiquer en toutes lettres la quantité prescrite : nombre d’unités thérapeutiques s’il s’agit de spécialités, doses ou concentrations de substances et nombre d’unités ou volume s’il s’agit d’une préparation magistrale ;
la prescription est non renouvelable et limitée au maximum à 7 jours pour les formes injectables, à 14 jours pour les formes orales et à 28 jours pour certains produits ;
ils sont rangés dans des armoires fermées à clé spécialement réservées à cette catégorie de médicaments et conçues pour résister aux tentatives de vol ;
les boîtes de médicaments portent l’indication « Respecter les doses prescrites » en caractères noirs sur fond rouge.
Médicaments à prescription restreinte
Les médicaments réservés à l’usage hospitalier exclusif : la prescription, la délivrance et l’administration ne peuvent réalisés qu’à l’hôpital ;
les médicaments à prescription hospitalière : la prescription ne peut être réalisée que par un médecin hospitalier mais la dispensation au public peut se faire en officine de ville ;
les médicaments à prescription initiale hospitalière : la première prescription doit être réalisée à l’hôpital, le renouvellement peut être effectué par un médecin de ville ;
les médicaments à prescription réservée à certains médecins spécialistes : le renouvellement peut être réalisé par un médecin libéral et la délivrance dans une officine de ville ;
les médicaments nécessitant une surveillance particulière pendant le traitement : la prescription est subordonnée à la réalisation par le patient d’examens de contrôle (la nature et la périodicité sont indiquées dans l’autorisation de mise sur le marché).
Les médicaments génériques
Les médicaments sont protégés par des brevets qui assurent aux laboratoires une exclusivité commerciale de 20 ans. À l’issue, la licence de fabrication tombe dans le domaine public et tout laboratoire peut alors commercialiser le médicament, alors appelé générique. L’objectif est d’ouvrir la concurrence entre les laboratoires et permettre une diminution des prix.
Le Code de la santé publique définit la spécialité générique comme « celle qui a la même composition qualitative et quantitative en principes actifs, la même forme pharmaceutique et dont la bioéquivalence avec la spécialité de référence est démontrée par des études de biodisponibilité appropriées » (article L5121-1 du Code de la santé publique). Dans les médicaments génériques, seuls les excipients peuvent être modifiés.
Le médicament générique doit porter le nom de la dénomination commune internationale et est voué à remplacer le médicament original. C’est pourquoi depuis 1999, sauf indication du prescripteur, le pharmacien peut substituer le médicament générique à l’original.
Le processus d’harmonisation des étiquetages
Afin de prévenir les erreurs médicamenteuses, en réduisant les risques de confusion lors de l’administration du médicament, les autorités sanitaires ont établis des recommandations en vue d’harmoniser et d’améliorer la lisibilité de l’étiquetage des petits conditionnements de solutions injectables (10 ou 20 ml).
Il est ainsi recommandé d’inscrire les mentions en caractères noirs sur des étiquettes papier de fond blanc afin d’optimiser le contraste avec la couleur d’impression. Les mentions devant figurer sur l’étiquetage sont :
la dénomination complète : nom du médicament, dosage, forme pharmaceutique ;
la dénomination commune internationale (DCI) ;
la quantité totale de substance active (masse ou unités) ;
la concentration en unité de masse (g, mg, etc.) par ml ;
la mention « Respecter les doses prescrites » pour les médicaments relevant des listes I et II.

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