Chapitre 12 L’entretien clinique pour parents d’enfants hyperactifs
Après plusieurs années d’expériences, il nous est apparu indispensable de proposer aux parents d’enfants hyperactifs un ou plusieurs entretiens hors de la présence de l’enfant et ceci afin de permettre au thérapeute de s’identifier aux mouvements identificatoires à l’œuvre dans la dynamique familiale. Le thérapeute pouvant alors « se sentir » dans le transfert à la place de l’enfant confronté à la dynamique conflictuelle de l’objet-couple.
Aussi bien pour la clinique de l’hyperactivité que pour celle des dépendances psychiques en général, le mode d’organisation majeur du discours est celui qui s’appuie sur la défense par le clivage.
Il s’agit d’un clivage entre le moi et l’affect, entre la psyché et le corps, entre le passé et le présent, ce qui rend le travail de mise en lien sur le mode associatif quasiment impossible. L’accès au lien de causalité, de ce fait, est rompu. Le simple questionnement du thérapeute orientant l’investigation vers le passé ne trouve pas chez le couple des parents un écho favorisant la découverte d’un lien de causalité. Le clivage qui est à l’œuvre à ce moment-là fait que l’événement est ramené à la chose en soi sans lien envisageable avec l’affect, contrairement à la structure névrotique qui permet au patient, soutenu par le questionnement du thérapeute, d’accéder à l’associativité.
Dans les dépendances psychiques, les modalités clivées du discours font obstacle à l’associativité. Cette organisation défensive requiert un engagement particulier du thérapeute dans la dynamique transféro-contre-transférentielle afin de favoriser l’associativité par la mise en lien et le rassemblement.
Autrement dit, le thérapeute doit intervenir au niveau de certaines articulations, de certaines failles dans le discours, favorisées par le clivage, faute de quoi là où il aurait pu se passer quelque chose de constructif sur le modèle de l’écoute du patient névrosé, il ne se passe rien.
Retournement
La mise en œuvre du transfert par retournement n’exclut pas celle du transfert par déplacement au cours duquel se transfèrent sur le thérapeute des clivages parentaux au sens transgénérationnel.
Cas clinique
Hector ou l’enfant identifié à l’objet couple
L’autre caractéristique, est l’absence totale de mise en lien des événements de vie. Cette absence de mise en lien et de relation causaliste devra être travaillée par le thérapeute pour aider les parents à élaborer la dynamique historico-pulsionnelle. Celle-ci peut être réalisée dans ce cas avec l’accompagnement du thérapeute.
Dans ce cas de figure, la chose est ce qu’elle est sans lien causal. Autrement dit, dans ce cas de figure la thérapeutique passe nécessairement par la transformation des contradictions en paradoxe winnicottien. En effet, les éléments contradictoires présents dans le discours langagier verbal et mimo-gesto-postural représentent les modes défensifs organisés par le clivage.
À ce moment-là, au comble de l’émotion, le père intervient pour stopper l’hémorragie émotionnelle en disant : « En géométrie il est toujours au-dessus de la moyenne. »
Autre élément important dans cet entretien, il s’agit d’étudier le statut de la sensorialité. Outre sa labilité émotionnelle, la mère d’Hector est une personne qui s’appuie sur des ressentis perceptivo-sensoriels comme pour se donner une sensation identitaire. Elle mime avec son corps les attitudes corporelles de son fils pendant qu’elle le décrit. Ainsi dit-elle : « Il a du mal à se concentrer, toujours en mouvement, sa concentration se fait à partir du sensoriel, il a besoin de toucher (en le mimant) des objets, d’être en contact permanent avec des objets. » Elle signale par ailleurs, qu’il est toujours en perte d’équilibre, dans des positions instables, par exemple assis en tailleur sur sa chaise pour manger. Cette recherche permanente d’équilibre instable ayant pour objet de stimuler en permanence la rééquilibration par voie sensorielle.
Le statut de la sensorialité interroge en même temps le statut de l’hallucination.
Dans ces expressions sensorielles, ce sont des équivalents d’affect qui s’expriment, mis en dépôt dans le sensoriel. Ce dépôt dans le sensoriel est constitutif d’un dehors qui est en fait hors de la psyché mais dans le corps.

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