12: Colposcopies particulières

Chapitre 12 Colposcopies particulières



Chaque période de la vie modifie les données de la colposcopie. À l’adolescence, la zone de transformation est en plein remaniement et s’expose aux variations hormonales et à l’activité sexuelle. Pendant la grossesse, les ectropions sont exubérants, la décidualisation est fréquente et les transformations atypiques sont souvent visuellement aggravées. Enfin, en ménopause, la zone de jonction s’intériorise, l’atrophie domine, ce qui gêne la réalisation de la colposcopie.



Colposcopie de l’adolescente


Par Ch. Quéreux et J.-P. Bory


Quelques années avant la puberté, l’anatomie de l’utérus se modifie et la jonction s’extériorise mais assez souvent la métaplasie tente de remettre la jonction au plus près de l’orifice externe anatomique. L’importance du phénomène de métaplasie sur cette zone de transformation dépend de plusieurs facteurs : activité hormonale, acidité vaginale et, surtout, activité sexuelle par les microtraumatismes qu’elle engendre.





Anomalies cytologiques cervicales


Les anomalies cytologiques cervicales sont très fréquentes : elles sont souvent dues à HPV dont la fréquence de portage est grande après les premiers rapports sexuels.


Les lésions de bas grade et virose ont une certaine fréquence. Ainsi, selon l’enquête FCRISAP de 1992 chez les 15–19 ans, il a été détecté 2,19 % de lésions condylomateuses pour 0,13 % seulement de CIN.


Dans l’étude d’Edelman (États-Unis, 1999) toutes les anomalies apparaissent fréquentes : 20 % de cas ASC-US contre 9,9 % chez l’adulte, 12,2 % de bas grade contre 2,5 % chez l’adulte et 7,7 % de haut grade contre 0,6 % chez l’adulte. Dans celle de Mount (Angleterre, 1999), il y a 9 % d’ASC-US, et 3,77 % de CIN tous grades confondus chez les 10–19 ans contre 1,29 % chez les plus de 30 ans.


Les anomalies cytologiques cervicales sont régressives : ces anomalies ont une propension élevée à la régression spontanée. Selon Mac Gregor qui a suivi 145 femmes de moins de 20 ans avec des atypies cytologiques, la régression est de 65 % contre 15 % de progression, alors que pour van Oot Marssen, le taux de régression est de 84 % avant 34 ans et de 40 % seulement après 34 ans.


Il y a une médiocre corrélation cytocolposcopique dans la littérature. Sur 207 colposcopies faites chez des moins de 20 ans pour bilan d’atypie cytologique, Walker trouve une fois sur deux une colposcopie normale et dans 49 % des cas où il y a une transformation atypique, au terme de l’histologie, 23 % sont des métaplasies banales et 26 % ont réellement une CIN. Blomfield sur 170 anomalies cytologiques avant 20 ans note qu’elle est suggestive d’une CIN dans 99,3 % des cas et qu’au terme de la colposcopie seules 6,5 % des patientes ont une authentique CIN.




Faut-il commencer les frottis avant 20 ans ?


NON en dépistage de masse pour différentes raisons : il s’agit surtout de lésions de bas grade avec un taux de régression élevé et il n’y a pas de cancer invasif à cet âge, même s’il y a en général un certain rajeunissement de ce cancer ; des arguments économiques et les conséquences possibles des traitements sur le risque ultérieur augmenté de prématurité tant dans la méta-analyse de Kyrgiou [6] que dans la série de 18 000 patientes rapportée par Bruinsma [7] sont autant d’arguments supplémentaires qui plaident contre un dépistage de masse à cet âge.


Les guidelines américaines de l’ACOG [4] conseillaient le premier frottis 3 ans après le premier rapport sexuel et au plus tard à 21 ans, tout en recommandant une modulation sur le début du dépistage en fonction de l’appréciation clinique du risque de la patiente (appréciation très aléatoire). En 2010, les recommandations des guidelines ont été actualisées [8] : le dépistage du cancer du col devrait commencer à l’âge de 21 ans. Si la cytologie a été effectuée avant 21 ans, il est important de savoir que la gestion d’une anomalie diffère de celle de la population adulte.


PEUT-ÊTRE en dépistage individuel. Il est difficile d’empêcher un frottis à cet âge, mais à condition de n’avoir qu’un seul objectif : le haut grade, et deux convictions : ne pas médicaliser les bas grades (pas de colposcopie, banaliser l’HPV, contrôler à 1 an) et être convaincu que dépister est une incitation à une débauche d’examens peu utiles mais sûrement traumatisants et à des traitements souvent inutiles ou discutables. Il n’y a de toute façon aucune urgence au premier frottis après les premiers rapports.


L’avenir est probablement à la vaccination selon les recommandations du comité technique des vaccinations et du Conseil supérieur d’hygiène publique de France (séances du 9 mars 2007) préconisant la vaccination aux jeunes filles de 14 ans avant qu’elles ne soient exposées au risque de l’infection HPV ainsi qu’aux jeunes filles et jeunes femmes de 15 à 23 ans qui n’auraient pas eu de rapports sexuels ou au plus tard, dans l’année suivant le début de la vie sexuelle.



Colposcopie au cours de la grossesse


Par Ch. Quéreux et P. Wahl





Modifications histologiques du col gravide


Ces modifications sont sous la dépendance de l’augmentation considérable des sécrétions hormonales induites par la grossesse.







Aspects colposcopiques du col gravide




Aspects spécifiques du col gravide : la déciduose


La fréquence de la déciduose est probablement sous-estimée car seules sont diagnostiquées celles qui apparaissent au cours des colposcopies pratiquées pour métrorragies ou frottis anormal. La déciduose intéresserait entre 10 et 40 % des cols gravides et se présente sous différents aspects.



Déciduose sous-malpighienne


Les foyers de déciduose sous-malpighienne (figure 12.3) peuvent être uniques mais ils sont le plus souvent nombreux, de taille variable, localisés ou étendus à tout le museau de tanche, parfois très éloignés de l’orifice cervical externe en bordure des culs-de-sac vaginaux. Nés au sein du chorion, ils gagnent la surface, amincissent ou détruisent l’épithélium. Selon leur profondeur, ils donnent des images colposcopiques différentes.



La forme plane ou légèrement surélevée : sans préparation, il s’agit de tâches rouges parfois d’un blanc trouble dont les bords après application d’acide acétique apparaissent cernés d’un liseré blanc intense. Le Lugol est iode négatif à contours flous.


La forme nodulaire (voir figure 12.3) ou tumorale se présente sous des aspects parfois difficiles à identifier (figure 12.4). Leur caractère multiple, bien circonscrit, et surtout leur réaction acidophile intense, givrée, en permet le diagnostic. Le Lugol est iode négatif.



La forme ulcérée saigne facilement, spontanément ou lors des rapports ou du toucher vaginal, mais jamais de façon importante. Les bords de l’ulcération sont irréguliers, le fond est net et l’acide acétique entraîne là encore un aspect givré caractéristique. Elle est iode négatif à bords flous. Les exceptionnelles décidualisations d’une endométriose ou d’une adénose antérieure se manifestent en général sous cet aspect.


Jul 9, 2017 | Posted by in MÉDECINE INTERNE | Comments Off on 12: Colposcopies particulières

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