L’identification des pathologies thoraciques permet d’adapter leur prise en charge pour la période périnatale et de préciser le lieu d’accouchement en fonction du risque de détresse cardiorespiratoire précoce. Le diagnostic se fait essentiellement à l’échographie du 2e trimestre, moins souvent au 3e trimestre. Le signe d’appel peut être : un épanchement liquidien pleural, une masse anéchogène, hyperéchogène ou d’échostructure mixte, un déplacement des repères anatomiques (cœur et médiastin). La confrontation de l’analyse topographique, de l’échostructure, de la vascularisation et de la morphologie du diaphragme permet souvent d’orienter le diagnostic (encadrés 11.1 à 11.4). L’ébauche pulmonaire débute son développement vers le 21e jour à partir d’une évagination ventrale de l’intestin antérieur d’origine endodermique, et s’isole d’emblée du reste de tube digestif par la mise en place de la cloison œsotrachéale, de nature mésodermique qui sépare la trachée en avant de l’œsophage en arrière (fig. 11.1). La trachée et les bronches se divisent de façon dichotomique et se ramifient au sein du mésenchyme, faisant intervenir des interactions entre l’épithélium et le mésenchyme. À la 4e semaine, apparaissent les bourgeons bronchiques droit et gauche, puis une semaine après, les bronches lobaires (fig. 11.2). À la 10e semaine, 70 % des ramifications bronchiques sont en place, mais les bronchioles terminales ne se forment qu’à 26 semaines. Le développement pulmonaire comporte un stade embryonnaire (4e–6e semaines), un stade pseudo-glandulaire (6e–16e semaines), un stade canaliculaire (15e–25e semaines), un stade sacculaire (24e–36e semaines), marqué par la formation de la barrière air–sang et la sécrétion du surfactant donnant un poumon fonctionnel mais immature, puis le stade alvéolaire, à partir de la 36e semaine et au cours des dernières semaines de la vie fœtale et dont la maturation se poursuit après la naissance (fig. 11.3). À la naissance le poumon prend, en quelques secondes, le relais du placenta pour assurer l’hématose. Le diaphragme se forme entre les 5e et 7e semaines. Il dérive de quatre structures embryonnaires : le septum transversum qui donne le centre tendineux du diaphragme, les membranes pleuropéritonéales dont la fermeture postérieure est plus tardive à gauche, le mésoblaste para-axial des parois du tronc et le mésenchyme péri-œsophagien. Les cavités pleurales, péricardiques et péritonéales dérivent du cœlome embryonnaire. Entre les 5e et 7e semaines, les membranes pleuropéritonéales ferment les canaux péricardopéritonéaux et séparent les cavités pleurales de la cavité péritonéale (fig. 11.4). La mise en évidence d’un épanchement pleural est en règle facile avec la visualisation d’une lame liquidienne, anéchogène, entre la paroi thoracique et le poumon (fig. 11.5). Sa fréquence est estimée à 1/15 000 grossesses. On apprécie le caractère uni- ou bilatéral de l’épanchement, puis on évalue son abondance : simple décollement du parenchyme pulmonaire, moignon pulmonaire plus ou moins rétracté sur le hile, compression avec déviation médiastinale et risque d’hypoplasie pulmonaire (fig. 11.6 et 11.7). On parlera souvent d’hydrothorax, sans préjuger de l’étiologie ni de la nature du liquide qui peut être transsudatif, inflammatoire, lymphatique ou séro-hématique, car l’examen échographique ne peut préciser la nature de cet épanchement. Devant un hydrothorax, il faut rechercher une cause locale, générale ou une anomalie chromosomique : cause locale : un épanchement pleural peut être le témoin d’une autre pathologie thoracique à l’origine de l’hydrothorax, quelle que soit sa nature : malformation adénomatoïde kystique, séquestration pulmonaire, hernie de coupole diaphragmatique… ; cause générale : on recherchera particulièrement une cardiopathie sous-jacente, un trouble du rythme cardiaque ou une malformation vasculaire. On recherchera aussi un signe évocateur d’une pathologie infectieuse, d’une pathologie placentaire ou des arguments en faveur d’une anémie fœtale (gros placenta homogène, ascite prépondérante, Doppler cérébral) qui peut être d’origine immune (allo-immunisation) ou non immune (parvovirus B19 par exemple). Ces pathologies peuvent se compliquer d’une anasarque fœtale (qui peut être la cause ou la conséquence de l’hydrothorax) avec un hydramnios, un œdème diffus des parties molles ou des épanchements associés (péricardique, ascitique). L’hydrothorax est alors souvent bilatéral ; anomalie chromosomique (voir fig. 16.16b) : la réalisation d’un caryotype fœtal est souvent proposée compte tenu de la fréquence élevée des dyschromosomies associées (trisomie 21, monosomie X…). Les anomalies chromosomiques sont surtout la principale cause des épanchements pleuraux révélés au cours du 1er trimestre. Devant un épanchement pleural isolé on évoquera a priori chylothorax. Celui-ci peut être associé à une pathologie thoracique tumorale ou malformative, ou à une anomalie chromosomique, il peut être isolé en rapport avec une anomalie du canal thoracique (agénésie, atrésie, fistule). Il s’agit alors volontiers d’un épanchement unilatéral, notamment à droite, ou bilatéral à prédominance droite, refoulant et comprimant les structures adjacentes. L’ascite est absente ou minime mais on peut parfois noter un œdème sous-cutané supérieur « en pèlerine » et un hydramnios, en cas d’épanchement compressif. La conduite à tenir en cas d’hydrothorax isolé primitif est fonction du terme de découverte et de la tolérance fœtale. Un épanchement isolé peut se stabiliser voire spontanément régresser (10 à 20 % des cas). Toutefois, en cas de signes de compression cardiomédiastinale (apparition d’ascite, hydramnios s’aggravant), la réalisation d’une thoracocentèse parfois bilatérale peut être indiquée en urgence. Outre son rôle thérapeutique, celle-ci a un intérêt étiologique en objectivant une hyperlymphocytose (supérieure ou égale à 60 %) en faveur d’un chylothorax, mais ce signe reste aléatoire. Une récidive rapide de l’épanchement après ponction doit faire envisager un drainage ou dérivation thoraco-amniotique (fig. 11.8) permettant de limiter le retentissement cardiovasculaire et d’éviter une hypoplasie pulmonaire. Les anomalies de développement de la coupole diaphragmatique, par défaut de développement du septum transversum, sont essentiellement représentées (75 % des cas) par la hernie diaphragmatique congénitale dite hernie de Bochdalek. Cette malformation relativement fréquente (1/2000 à 1/5000 naissances) est souvent isolée et sporadique mais peut s’intégrer dans le cadre d’une dyschromosomie ou dans un contexte polymalformatif syndromique avec risque de récurrence. Elle est le plus souvent unilatérale gauche (neuf fois sur dix), et dans le reste des cas unilatérale droite ou bilatérale (5 %). Beaucoup moins souvent, il s’agit d’une hernie antérieure parasternale (hernie du foramen de Morgani) ou d’une hypoplasie ou éventration diaphragmatique par défaut de colonisation myoblastique. Le diagnostic d’une hernie de coupole diaphragmatique gauche repose sur : des signes directs (fig. 11.9a, b et g2), parfois difficiles à objectiver : en particulier l’absence de visualisation de l’ensemble de la coupole diaphragmatique, qui doit être systématiquement recherchée en coupe sagittale (voir fig. 6.79b), paramédiane ou frontale, la visualisation directe de structures digestives ascensionnées à travers le defect diaphragmatique, notamment la présence d’une image liquidienne correspondant à l’estomac en situation anormale intrathoracique (voir fig. 13.20a) ; des signes indirects sur un balayage transversal, qui attirent habituellement l’attention (fig. 11.9c, d et g1) : la déviation droite du cœur, qui peut être comprimé selon le volume hernié. Celui-ci refoule le poumon droit qui se présente sous la forme d’une structure échogène rétrocardiaque, homogène, vaguement triangulaire dont les dimensions peuvent être évaluées (voir plus loin), l’aspect « déshabité » de l’abdomen avec une biométrie abdominale anormalement faible et la non-visualisation de l’estomac en situation normale sur un balayage transversal de l’abdomen, l’échogénicité inhabituelle de l’hémi-thorax gauche avec la présence de l’estomac, anéchogène le plus souvent au contact du bord postérolatéral du cœur, de structures digestives intrathoraciques en lieu et place du poumon gauche, sous la forme d’images hétérogènes, souvent échogènes, parfois liquidiennes, animées d’un péristaltisme. Ces anomalies de l’échostructure hémi-thoracique ne doivent pas être confondues avec une pathologie intrinsèque pulmonaire ou médiastinale (malformation adénomatoïde kystique, atrésie bronchique, séquestration, kyste bronchogénique, tératome médiastinal, kyste neuro-entérique…), parfois l’ascension d’une partie du lobe gauche du foie échogène et homogène de volume variable dont l’évaluation est importante, dans cet hémi-thorax inhomogène, le poumon est rarement individualisable. En cas de hernie de coupole diaphragmatique droite, la séméiologie est voisine, mais le diagnostic est souvent plus difficile en raison de la faible différence d’échogénicité entre poumon et foie : sur une coupe sagittale droite, la régularité de la coupole diaphragmatique (habituellement bien visible : voir fig. 6.74 et 6.79a) est interrompue laissant passer une partie du foie, échogène et homogène dans l’hémi- thorax droit. La capsule supérieure du foie, dont les contours sont réguliers est souvent bien reconnue (fig. 11.10a à d, et voir fig. 6.73) ; la position du cœur dévié à gauche attire moins l’attention ; le foie et la vésicule biliaire occupent une position inhabituellement haute (fig. 11.10e et f), allant parfois jusqu’à remplir la quasi-totalité de l’hémi-thorax jusqu’à l’apex et l’étude Doppler couleur de la vascularisation hépato-porto-systémique retrouve une désaxation vers le haut (fig. 11.10g) ; le volume d’anses digestives herniées est souvent moins important et mal individualisable ; l’estomac reste abdominal mais il est plus médian et horizontalisé (fig. 11.10h et i, et voir fig. 13.20b) ; le poumon du côté de la hernie est difficile à retrouver car son échogénicité est proche de celle du foie ; en revanche, son étude est plus aisée du côté opposé à la hernie.
Pathologie thoracique
(cœur excepté)
Rappel embryologique14
Épanchement pleural
Diagnostic
Bilan étiologique (encadré 11.5)
Conduite à tenir
Anomalies du diaphragme
Hernie de coupole diaphragmatique
Diagnostic
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