10. Situations cliniques selon les populations

Chapitre 10. Situations cliniques selon les populations

P. Lana



La personne âgée



« A-t-on l’âge de ses artères, de son cerveau, de son moral ou de son état civil ? Ou bien est-ce le regard des autres qui nous classe un jour parmi les vieux ? » Il n’y a pas un vieillissement mais des vieillissements, secondaires à des évolutions qualitatives génétiquement programmées du soma et de la psyché, mais compliquées par la pathologie (involution cérébrale, déficit sensoriel par exemple). Le passage à la retraite serait « le seul rite de passage contemporain et artificiel ». Ces repères sont actuellement bouleversés en raison des nouvelles données socioéconomiques. Selon Désrouené, le vieillissement réussi se caractérise par « la bonne adaptation du sujet » [4] et concernerait le tiers de ceux-ci.

À défaut de définir un âge d’entrée dans la vieillesse, des critères distinguant les vieillissements réussis et les vieillissements pathologiques s’avèrent très utiles en urgence, il est essentiel de déterminer sur quel terrain préalable les troubles aigus s’installent. Des idées fausses ont longtemps prévalu comme celle qui condamnait toute personne âgée à la rigidification psychique et à l’aigrissement, rendant du même coup vains tous les projets de réaménagement basés sur les techniques psychothérapiques B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing notamment psychanalytiques.

On définit quelques caractéristiques du vieillissement [2, 19] :





– les modifications de la personnalité B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing. On note une forte continuité des traits de personnalité mais la baisse de la composante énergétique pousse bien souvent à la modestie et à l’aménité. Lorsqu’un changement se produit, c’est un symptôme : il signifie, comme à l’âge adulte, que les possibilités d’adaptation ont été débordées ;


– les troubles de l’adaptation. Avec l’âge, l’adaptation au changement est plus lente, sans être pour autant une désadaptation. Si celle-ci apparaît, elle est pathologique ;


– les troubles de la motivation. On distingue les changements d’investissement, plus modestes, plus concrets, de la réelle baisse de motivation qui peut aller jusqu’à l’apathie B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing et la perte d’autonomie ;


– les modifications de l’activité. Elles sont très importantes à apprécier tant elles sont différentes d’un sujet à l’autre. Certains sujets s’installent très vite dans un statut de retraité alors que d’autres gardent une activité d’adulte : toute évaluation passe par la connaissance précise de l’activité antérieure ;


– les changements affectifs. On n’insistera jamais assez sur le rôle et l’importance des pertes à cet âge. Les grands équilibres affectifs évoluent de manière très variable, les conflits conjugaux B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing se radicalisent ou s’apaisent et permettent une véritable redécouverte (ou découverte) du conjoint, les relations évoluent avec les enfants. C’est tout le tissu social qui doit être exploré car de nouveaux liens avec un voisin, un travailleur social, finissent par devenir des points d’appui importants ;


– les facteurs de risques prédisposant, provocant ou aggravant un vieillissement pathologique :




• facteurs biologiques : l’âge tout d’abord pour lequel le bagage génétique joue certainement un rôle majeur ; s’y ajoutent l’HTA, le tabagisme, le surpoids, la sédentarité, les pathologies somatiques B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing diverses comme le diabète, les cardiopathies, l’asthme et les pathologies pulmonaires obstructives chroniques, toutes sources de handicap et de perte d’autonomie. On citera également l’alcoolisme B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing qui peut être d’apparition tardive. Toutes ces pathologies favorisent la dépression « DépressionB9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missinget pathologie somatique s’aggravent réciproquement » [14],


• facteurs psychologiques. Les pertes et les deuils constituent l’un des traumatismes majeurs de la vieillesse, le plus important étant la mort du conjoint qui entraîne un risque accru de morbidité (dépression) et de mortalité. Les femmes résistent mieux que les hommes surtout après 75 ans [19],


• facteurs psychosociaux. Retraite, déménagements, baisse des ressources, isolement, associés aux facteurs cités plus haut, sont à l’origine d’un sentiment de perte de pouvoir, d’atteinte de l’identité sociale. Ils imposent un réaménagement psychique qui dépend entre autres de la personnalité mais n’arrive pas toujours à bout de tels bouleversements. Il en résulte une perte de l’estime de soi et une régression narcissique qui favorisent la survenue de troubles psychiatriques [7].


MOTIFS DE CONSULTATION



Situation


Il est bien rare que la personne âgée se rende seule aux urgences. L’entourage, sur avis du médecin généraliste B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing, des urgences générales, d’une maison de retraite, des pompiers ou de police-secours l’adresse ou la conduit pour des troubles divers.

Les symptômes aigus ne sont pas les seuls motifs d’arrivée. Un enfant, un conjoint peuvent ne plus être en mesure de prendre en charge la personne au domicile, par épuisement ou parce qu’un événement intercurrent déséquilibre une stabilité familiale très précaire : c’est la défection de la prise en charge habituelle qui fait l’urgence.

La dimension environnementale ou institutionnelle est au cœur de la démarche d’orientation : d’où vient la personne âgée et y retournera-t-elle ? L’arrivée aux urgences signifie-t-elle une inquiétude ou un rejet ? Doit-on privilégier son orientation en institution au risque de rompre les fragiles équilibres actuels ou décider d’un retour au domicile, parfois illusoire compte tenu du handicap et de l’isolement ?

La situation de maltraitance psychologique (règlement de compte intrafamilial) ou physique (brutalités, coups) sera rapidement évoquée. Elle peut concerner le patrimoine ou les revenus, que cela vienne de la famille ou des nombreux escrocs pour lesquels les personnes âgées représentent une proie facile. Quelle que soit leur légitimité, les mesures de protections B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing institutionnelles ou familiales sont vécues par l’âgé comme des persécutions supplémentaires.


Principaux symptômes d’appel


Ce sont : déambulation, errance B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing, agressivité B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing, agitation B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing, dépression B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing, tentative ou propos suicidaires B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing, confusion B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing, troubles de mémoire B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing, repli B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing et isolement, conduites à risque au domicile et perte d’autonomie entraînant des plaintes du voisinage.

Les idées délirantesB9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing de persécution et de préjudice font évoquer l’évolution d’un délire ancien parfois longtemps méconnu ou l’éclosion d’un délire du grand âge dans le cadre d’une démence débutante. On les retrouve de manière plus fugace dans l’angoisse B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing aiguë et dans la confusion B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing.

Les propos sur la mort restent difficiles à apprécier dans leur rapport avec une réelle intention suicidaire.

Les pathologies addictives B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing, dominées par l’alcoolisme fréquent et méconnu parce qu’apparu tardivement, touchent également les deux sexes et constituent un facteur aggravant.


Précautions particulières


Les syndromes psychiatriques ont rarement une présentation clinique classique et leur expression peut être très rapidement évolutive, donnant lieu à des diagnostics par excès d’états dépressifs B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing et de troubles délirants B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing, voire même de « schizophrénies B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing d’apparition tardive ». L’apaisement et la distance critique peuvent faire suite le matin à l’agitation B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing anxieuse, d’allure parfois délirante, de la veille au soir qui a pu être source de diagnostics hâtifs et d’orientations précipitées.

Les affections somatiques B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing associées révèlent ou compliquent un tableau psychiatrique. Ce lien doit être exploré avant toute explication psychologique. Par ailleurs, la personne âgée recourt fréquemment à la plainte somatique B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing pour exprimer sa souffrance psychologique. La plainte hypochondriaque B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing – qu’elle appartienne au registre de la dépression B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing, des divers modes d’expression de l’angoisse B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing, ou de la psychose B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing – joue un rôle majeur.

Les troubles sensoriels, baisse de l’acuité visuelle, hypoacousie ou surdité B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing complète, rendent la compréhension difficile voire impossible, passant pour des troubles intellectuels, générant troubles du caractère et même idées de persécution chez la personne âgée, et dégradant la relation avec un entourage exaspéré et rejetant.








L’entourage familial B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing


L’accueillir avec le patient pendant toute la durée de l’observation.

Apprécier le débordement de ses capacités, le degré de souffrance et d’épuisement.

Ne pas oublier la maltraitance intrafamiliale


Les contacts


Rechercher systématiquement selon les cas : médecin généraliste B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing traitant, personnel de la maison de retraite, assistante sociale du secteur B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing d’habitation, aide ménagère, voisinage qui peut avoir un important rôle de soutien.



DÉMARCHE DIAGNOSTIQUE



Première étape : évaluation d’une pathologie organique causale ou associée


A fortiori si le trouble est inaugural et atypique ou s’il existe un syndrome confusionnel, on commence par le recueil des antécédents auprès du patient, de la famille, du médecin généraliste en précisant la date et les résultats des derniers bilans pratiqués.


Étant donné l’importance des facteurs iatrogènes, on recherche systématiquement les traitements en cours, récemment instaurés ou non. De nombreux produits peuvent être mis en cause, notamment les corticoïdes, les antalgiques, les digitaliques, les diurétiques, les antihistaminiques B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing, tous les psychotropes B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing, les anticholinestérasiques, par effet direct ou en raison des perturbations métaboliques qu’ils entraînent.

D’autres pathologies sont à explorer :




– les pathologies infectieuses, pulmonaires, urinaires ;


– les pathologies neurologiques : maladie de Parkinson (contre-indication à l’emploi des neuroleptiques) ;


– les troubles hydro-électrolytiques, les troubles métaboliques ;


– la rétention urinaire ; le fécalome ;


– l’infarctus du myocarde ;


– les processus intracrâniens, l’hématome secondaire à une chute ;


– l’hypoxie, quelle qu’en soit la cause ;


– les complications ostéo-articulaires d’une chute, la fracture engrainée.




PRINCIPAUX TABLEAUX CLINIQUES



Syndrome confusionnel B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing


C’est une urgence organique qui ne deviendra une urgence psychiatrique qu’une fois toutes les causes somatiques, toxiques ou iatrogènes éliminées. Même quand le bilan étiologique a déjà été effectué, il ne faut pas hésiter à répéter examens cliniques et bilans complémentaires à la recherche d’une cause jusque-là occultée. C’est un syndrome très fréquent et sous-évalué, parfois considéré à tort comme la poussée évolutive d’une démence connue alors que les deux peuvent être associés, ou réduit à sa dimension onirique diagnostiquée délireB9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing, ou encore négligé car dominé par l’agressivité B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing ou l’agitation B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing anxieuse qu’il s’agit avant tout de contenir.





– des signes généraux, fièvre ;


– une désorientation temporospatiale ;


– des troubles du sommeil B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing, une inversion du rythme nycthéméral ;


– une obnubilation avec baisse de la vigilance B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing et troubles mnésiques ;


– une perplexité anxieuse ;


– un onirisme.

Le tableau, fluctuant, est constitué en quelques heures. Les signes peuvent être beaucoup moins spécifiques : propos décousus et répétitifs, distractibilité, attitudes d’opposition, agressivité. La modification récente du comportement doit faire évoquer le diagnostic. La confusion est d’autant plus fréquente que les personnes âgées sont particulièrement sensibles à un ensemble de facteurs d’agression qui doivent faire l’objet d’une évaluation systématique. Cette sensibilité augmente quand il existe une détérioration cognitive préalable.


Agressivité B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing ou agitation B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing



Dans d’autres cas, cette agressivité ou agitation est de survenue récente, en rupture avec l’état antérieur, entraînant le désarroi de l’entourage. Elle peut s’inscrire dans un contexte confusionnel B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing aigu ou survenir chez un vieillard dément, jusque-là paisible, faisant surgir la crainte et l’insécurité chez une épouse compassée et maternante.

Elle peut révéler une pathologie psychiatrique sous-jacente :




– un délire chronique B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing de persécution, évoluant à bas bruit depuis l’âge adulte ;


– des idées délirantes B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing de préjudice d’apparition récente, qui s’inscrivent dans l’évolution d’un état démentiel ;


– un trouble de l’humeur B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing; les dépressions dites hostiles [12] majorent l’incompréhension de l’entourage et l’isolement ; l’épisode maniaque B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing survient soit chez des patients qui présentent une pathologie bipolaire connue, soit de façon inaugurale et le bilan somatique et toxique s’impose plus que jamais ;


– des manifestations anxieuses B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing qui peuvent prendre chez les personnes âgées la forme de crises d’agitation anxieuse, souvent nocturnes.


Idées dépressives


On évoque facilement la dépression devant une tentative de suicide qui en constitue le risque majeur avec une très forte létalité [8].

Il en est de même quand la symptomatologie est typique : tristesse, douleur morale, ralentissement B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing psychomoteur, amaigrissement et troubles du sommeil B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing. Des manifestations délirantes B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing peuvent s’y associer : hallucinations B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing auditives avec propos obscènes ou persécutifs, idées délirantes de culpabilité, d’incurabilité, de ruine. Au maximum, un sentiment de damnation, d’immortalité et un délire de négation d’organe réalisent le syndrome de Cotard. Mais l’expression clinique de la dépression est très variable à cet âge et les formes atypiques sont nombreuses. Aux urgences, on recherche les signes dépressifs devant :




– des plaintes somatiques B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing persistantes, diverses, l’hypochondrie B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing est une forme d’expression dépressive fréquente chez la personne âgée ;


– des réactions agressives B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing dans la dépression hostile très fréquente ;


– des manifestations hystériformes. La dépendance affective est souvent connue de longue date, mais les revendications à l’égard de l’entourage s’aggravent, la tyrannie exercée sur les proches ne débouche que sur l’épuisement de ceux-ci et les attitudes de rejet ;


– des manifestations régressives graves entraînant un désinvestissement global et majeur. Ce désinvestissement finit par s’étendre aux comportements vitaux qui ne sont plus assumés, réalisant le syndrome de glissement qui engage, à court terme, le pronostic vital ;


– des alcoolisations B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing répétées ;


– des troubles cognitifs. Désinvestissement intellectuel, troubles de concentration, ralentissement B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing, difficultés d’évocation mnésique peuvent rendre difficile (et inutile en pratique) le diagnostic différentiel entre dépression et démence. Le ralentissement psychique peut être majeur, réalisant un tableau de pseudo-démence. Son début est brutal et d’aggravation rapide. Le patient est hébété, les troubles mnésiques B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing portent autant sur les faits anciens que sur les faits récents, les troubles de l’attention et de la concentration altèrent le jugement et le raisonnement, l’impression générale est celle d’un déficit massif.

À l’inverse, le diagnostic en est parfois hâtif, notamment dans les institutions, mais il est difficile d’apprécier le caractère suicidaire B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing des souhaits exprimés par de nombreuses personnes âgées d’être « délivrées » d’une vie devenue sans intérêt.


Idées délirantes B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing




Un autre tableau, moins typique, est souvent rencontré aux urgences. Ces états aigus associant idées délirantes B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing polymorphes et fugaces, angoisse B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing majeure, note confusionnelle B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing labile, sans cause organique décelable évoluent favorablement en quelques heures. Ils surviennent dans un contexte de stress, à l’occasion, par exemple, d’une courte hospitalisation en milieu général pour une petite intervention ou un examen complémentaire invasif. Enfin, les idées délirantes peuvent révéler un trouble affectif majeur.


Syndrome démentiel


Le dément est adressé aux urgences pour des motifs variés. Les troubles psychiatriques peuvent être invoqués : délire d’apparition tardive, syndrome dépressif B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing. D’autres fois, ce sont les troubles du comportement et le risque vital qui provoquent l’envoi : agressivité B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing, agitation B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing, fugues et errances B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing, incurie totale et nuisances pour le voisinage, crainte d’un accident domestique (gaz). L’environnement habituel est débordé : la maison de retraite ne contient plus l’agressivité ; la famille, alertée par le voisinage, s’alarme devant l’incurie ou les propos persécutifs. Le diagnostic n’est pas toujours aisé en raison des troubles intriqués. Cependant, il est nécessaire de préciser le type de démence suspectée car cela aura une conséquence directe sur les soins prodigués.

Le syndrome démentiel proprement dit se caractérise par un affaiblissement progressif des fonctions cognitives. Le déficit de mémoire B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing est le trouble le plus significatif, il est nécessaire d’en préciser l’importance et le retentissement. La désorientation temporospatiale est également rapide, la désorientation temporelle précédant la désorientation spatiale. En l’absence de certitudes histologiques, des arguments cliniques complètent ou précèdent ce tableau et nous permettent de formuler des hypothèses diagnostiques.





– présence d’une plainte présentée par le patient ou un membre de sa famille ;


– absence de démence, modification du fonctionnement normal ;


– déclin dans un des domaines du fonctionnement cognitif ;


– fonctionnement global préservé avec possibilité d’augmentation des difficultés à accomplir les activités de la vie quotidienne.

L’existence d’un trouble cognitif léger constituerait un fort risque d’évolution démentielle, notamment vers la maladie d’Alzheimer (dans 80 % des cas pour certains auteurs). Dans tous les cas l’analyse étiologique s’impose.


QUATRE ÉTIOLOGIES SE PARTAGENT LA MAJORITÉ DES CAUSES DE DÉMENCE:






– la maladie d’Alzheimer est la plus fréquente. En début d’évolution, le patient est amené à consulter pour des motifs divers [9] :




• une plainte portant sur la mémoire B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing, un trouble du langage,


• un état dépressif B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing atypique, des manifestations anxieuses B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing,


• un syndrome confusionnel B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing, à l’occasion d’une affection intercurrente,


• mais aussi une perte de poids inexpliquée.

Progressivement, s’installe la triade classique de la phase d’état : aphasie, apraxie, agnosie ;


– la démence frontotemporale est la seconde cause de déclin cognitif mais elle est souvent méconnue en raison de l’installation plus lente du déficit [10]. Les troubles praxiques et gnosiques sont rares, l’orientation temporelle est perturbée mais pas l’orientation spatiale. En revanche, la consultation psychiatrique de première intention est fréquente en raison de l’importance des troubles affectifs et comportementaux. L’entourage témoigne de la survenue progressive de négligence physique, perte des convenances sociales, hyperoralité B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing, déshinibition, impulsivité, qui peuvent être à l’origine de réactions violentes imprévisibles, conduites stéréotypées. Les troubles affectifs sont variables, ils dépendent de la localisation prédominante des lésions dégénératives allant de l’indifférence, insouciance, apathie B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing, à l’euphorie avec déshinibition, mais la dépression B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing, l’anxiété B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing et la sentimentalité excessive sont fréquentes ;


– la démence à corps de Lewy est moins fréquente mais elle représente une contre-indication à l’emploi des neuroleptiques B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing. Il existe maintenant des critères cliniques précis :




• déficit cognitif fluctuant avec des résultats au MMSE pouvant varier significativement au cours d’une même journée,


• hallucinations B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing dès le début de la maladie, visuelles, pouvant être décrites avec précision, partiellement critiquées, persistantes, faites d’animaux ou de personnages inconnus, pouvant s’accompagner d’hallucinations auditives,


• troubles parkinsoniens moins constants, rigidité et bradykinésie, tremblement de repos beaucoup plus rare,


• intolérance aux neuroleptiques B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing avec risque élevé de syndrome malin ;


– la démence vasculaire recouvre un ensemble de pathologies associant démence et pathologie vasculaire cérébrale. La difficulté vient de son association fréquente avec la maladie d’Alzheimer et de la coexistence des processus dégénératif et vasculaire. Au-delà de l’urgence, c’est l’argument évolutif qui fait la différence, la démence vasculaire pouvant rester stable pendant des mois.

Il existe bien d’autres formes de démences, secondaires, qui concernent moins les personnes âgées et dont les causes de survenue sont le plus souvent connues : démence post-traumatique, post-AVC. Certaines sont de diagnostic particulièrement difficile en début d’évolution en imposant longtemps pour une psychose B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing. C’est le cas de la maladie de Huntington mais il est rare que les signes apparaissent après l’âge adulte. On devra en revanche penser aux détériorations d’origine toxique B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing, à l’alcoolisme.



Associations de pathologies, diagnostics méconnus


Le classique débat diagnostique entre dépression B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing et démence n’a plus vraiment lieu d’être grâce à l’introduction de la neuropsychologie, de l’évaluation comportementale et de l’imagerie cérébrale. En urgence cependant, il faut toujours penser aux associations :




– démence et dépression ;


– plainte cognitive liée à un trouble anxieux B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing ;


– démence et confusion B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing ;


– troubles psychiques et organicité.



CONDUITE À TENIR



Principes de mise en œuvre du traitement


Le traitement est prescrit après investigation complète, plus tôt s’il est nécessaire à la poursuite des examens. Il vise en urgence à prévenir le risque auto ou hétéroagressif et à apaiser l’angoisse.

Les proches jouent un rôle considérable. Un traitement ne peut être efficace que s’il est bien compris par l’entourage et le mieux possible par le patient. Avant toute prescription on éliminera tous les produits susceptibles de créer de l’angoisse B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing ou de l’agitation B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing s’ils ne sont pas strictement nécessaires. On citera le cas des anticholinestérasiques que l’on pourra interrompre jusqu’au retour au calme.

L’orientation est le résultat d’une concertation entre psychiatre, somaticien, services sociaux B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing et entourage.


Hospitalisation ou prise en charge ambulatoire ?



BUTS DE L’HOSPITALISATION


Dans tous les cas, l’hospitalisation B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing d’urgence ne peut pas constituer une réponse adaptée aux nécessités de placement B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing. Elle répond à :




– l’évolution d’une pathologie psychiatrique ancienne ;


– la nécessité de séparer du milieu (avec signature d’un engagement de reprise pour éviter un placement) ;


– la mise en danger du patient.



CHIMIOTHÉRAPIE


La chimiothérapie vient en appoint du travail de crise B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing effectué aux urgences qui résout à lui seul bon nombre de situations, notamment d’agressivité aiguë réactionnelle. Apprécier en urgence l’effet d’un traitement suppose que l’on ait un minimum de recul (consultations prolongées) B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing tant les effets retardés ou paradoxaux sont fréquents.

Chez le sujet âgé, les effets secondaires sont majorés :




– hypotension orthostatique ;


– hypoventilation ;


– syndrome extrapyramidal ;


– rétention urinaire ;


– constipation ;


– troubles de mémoire B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing ;


– confusion B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing.

On débute le traitement à la posologie la plus faible possible (adaptée à l’état somatique du patient), on évite les associations, on préfère fractionner les doses. Certains psychotropes sont déconseillés :


Par ailleurs, hypnotiques B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing et antihistaminiques B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing (risque de sédation et de chute), carbamates (toxicité cardiaque en cas de surdosage) sont à utiliser avec prudence.

Le choix de la molécule se porte donc sur les psychotropes bien tolérés :


Les situations qui imposent un traitement médicamenteux sont :




– l’agitation B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing, l’instabilité, l’agressivité B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing dans le cadre d’une démence, d’un délire, d’un trouble affectif B9782294054761500102/u10-01-9782294054761.jpg is missing majeur ;


– l’onirisme, les idées délirantes B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing ;


– l’angoisse B9782294054761500102/u10-02-9782294054761.jpg is missing ;

Jun 8, 2017 | Posted by in MÉDECINE INTERNE | Comments Off on 10. Situations cliniques selon les populations

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