10: Nerfs du rachis lombal

Chapitre 10


Nerfs du rachis lombal



Le rachis lombal est connecté à différents nerfs dont les nerfs spinaux sont les principaux. Ceux-ci reposent dans le foramen intervertébral et sont connectés à la moelle spinale par l’intermédiaire des racines des nerfs spinaux qui occupent le canal vertébral. En périphérie, c’est-à-dire à l’extérieur de la colonne vertébrale, les nerfs spinaux se divisent en une branche ventrale et en un rameau dorsal. Les troncs sympathiques lombaux courent le long des faces antérolatérales de la colonne vertébrale et communiquent avec les rameaux ventraux des nerfs spinaux lombaux.



NERFS SPINAUX LOMBAUX


Les nerfs spinaux lombaux reposent dans les foramens intervertébraux et sont numérotés selon les vertèbres au-dessous desquelles ils reposent. Par conséquent, le nerf spinal L1 est situé sous la vertèbre L1 dans le foramen intervertébral de L1–L2 ; le nerf spinal de L2 est situé sous la vertèbre L2 et ainsi de suite. Au centre, chaque nerf spinal est relié à la moelle spinale par l’intermédiaire d’une racine ventrale et d’une racine dorsale. En périphérie, chaque nerf spinal se divise en un plus grand rameau ventral et un plus petit rameau dorsal. Les racines nerveuses spinales rejoignent le nerf spinal dans le foramen intervertébral ; les rameaux ventraux et dorsaux sont formés juste à l’extérieur du foramen. Par conséquent, les nerfs spinaux sont assez courts. Chacun d’entre eux ne dépasse pas la largeur du foramen intervertébral dans lequel il repose (figure 10.1).



L’extrémité médiane (ou centrale) du nerf spinal peut être difficile à définir, car elle dépend de l’endroit exact où les racines dorsales et ventrales du nerf convergent pour former un tronc unique. Le nerf spinal est parfois très court (moins de 1 mm) et, dans ce cas, les fibres des racines sont directement distribuées aux rameaux dorsaux et ventraux sans vraiment former un nerf spinal. Sinon, les racines forment généralement un petit tronc d’une longueur de quelques millimètres à partir du point de jonction des racines nerveuses jusqu’au point de division des rameaux ventraux et dorsaux.



RACINES NERVEUSES LOMBALES


La racine dorsale de chaque nerf spinal transmet les fibres sensitives du nerf spinal à la moelle spinale. La racine ventrale transmet en grande partie les fibres motrices de la moelle spinale au nerf spinal, mais peut aussi transporter quelques fibres sensitives. Les racines ventrales des nerfs spinaux de L1 et L2 transportent en outre les fibres efférentes préganglionnaires et sympathiques.


La moelle spinale se termine dans le canal vertébral face au disque intervertébral L1–L2, bien qu’elle puisse se terminer au niveau de T12–L1 ou de L2–L3 [1]. Par conséquent, pour atteindre la moelle spinale, les racines nerveuses des dernières lombales (et sacrées) doivent courir à l’intérieur du canal vertébral où elles sont en grande partie recouvertes par le sac dural (figure 10.2). À l’intérieur du sac dural, les racines nerveuses lombales courent librement, mélangées aux racines nerveuses sacrées et coccygiennes pour former la queue de cheval, et chaque racine est recouverte par son propre fourreau de pie-mère, continue avec la pie-mère de la moelle spinale. Toutes les racines de la queue de cheval trempent dans le liquide cérébrospinal qui se propage dans l’espace sous-arachnoïdien du sac dural.



Dans la plus grande partie de leur trajet, les fibres nerveuses se trouvant à l’intérieur de chaque racine nerveuse sont réunies en un tronc unique, mais sont divisées à proximité de la moelle spinale en petits faisceaux appelés radicules qui s’insèrent pour finir à la moelle spinale. La taille et le nombre de radicules de chaque racine nerveuse sont variables, mais leur diamètre est en général de 0,5 à 1 mm, et leur nombre de 2 à 12 pour chaque racine [2]. Les radicules de chaque racine ventrale s’insèrent sur la face ventrolatérale de la moelle spinale, alors que celles des racines dorsales s’insèrent sur la gouttière dorsolatérale de la moelle spinale et forment une série d’insertions ininterrompues le long des surfaces ventrales et dorsales de celle-ci (figure 10.3).



La paire de racines nerveuses spinales quitte le sac dural, juste au-dessus du niveau de chaque foramen intervertébral. Elles pénètrent ainsi le sac dural dans une direction inférolatérale, en préservant un prolongement de la dure-mère et de l’arachnoïde appelé fourreau dural (voir figure 10.2). Ce fourreau renferme les racines nerveuses jusqu’au foramen intervertébral et au nerf spinal, où la dure-mère fusionne avec elle ou devient l’épinèvre du nerf spinal (voir figure 10.1). La pie-mère de chacune des racines nerveuses s’étend également jusqu’au nerf spinal, de même que le prolongement de l’espace sous-arachnoïdien (voir figure 10.1). Les racines nerveuses sont donc gainées par la pie-mère et baignent dans le liquide cérébrospinal jusqu’au nerf spinal.


Directement proximale à sa jonction avec le nerf spinal, la racine dorsale s’élargit pour former le ganglion de la racine dorsale qui contient les corps cellulaires des fibres sensorielles de la racine dorsale. Le ganglion repose à l’intérieur du fourreau dural des racines nerveuses et occupe la partie supérieure et médiane du foramen intervertébral, mais peut reposer plus distalement dans le foramen si le nerf spinal est court.


L’angle de sortie du sac dural de chaque paire de racines nerveuses varie de haut en bas. Les racines de L1 et de L2 quittent le sac dural avec un angle obtus, mais les fourreaux duraux des racines nerveuses inférieures forment des angles de plus en plus aigus par rapport aux bords latéraux du sac dural (voir figure 10.2). Les angles formés par les racines de L1 et de L2 sont d’environ 80° et 70° respectivement, alors que les angles de L3 et L4 sont chacun d’environ 60°, et celui de la racine de L5 de 45° [3].


Le niveau de l’origine des fourreaux de la racine nerveuse varie aussi de haut en bas. Les fourreaux émergent généralement en face de la partie postérieure de leurs corps vertébraux respectifs. Par conséquent, le fourreau de L1 émerge derrière le corps de L1 ; le fourreau de L2 émerge derrière le corps de L2 et ainsi de suite. Toutefois, les fourreaux inférieurs successifs émergent de plus en plus haut derrière leurs corps vertébraux, jusqu’aux fourreaux des racines nerveuses de L5 qui émergent derrière le disque intervertébral L4–L5 [3].



Rapports des racines nerveuses


Les rapports des racines nerveuses ont une importance primordiale dans la pathologie compressive de la racine nerveuse, car des lésions envahissantes de tissus étroitement liés ou même distants des racines nerveuses peuvent les affecter. À cet égard, la majorité des structures en relation avec les racines nerveuses ont déjà été décrites (voir chapitre 5), bien que l’anatomie des vaisseaux sanguins spinaux soit décrite en détail au chapitre 11.


Les méninges ont la relation la plus étroite avec les racines nerveuses. Les racines de la queue de cheval sont enfermées dans le sac dural et trempent dans le liquide cérébrospinal. Au-delà du sac dural, les paires de racines individuelles sont enveloppées par la pie-mère, l’arachnoïde et la dure-mère dans les fourreaux des racines nerveuses (figures 10.1 et 10.4). L’intérêt de ces relations vient du fait que des tumeurs ou des kystes de la dure-mère ou de l’arachnoïde peuvent parfois former des lésions envahissantes qui compriment les racines. Les artères radiculaires et les veines courent à l’intérieur des fourreaux des racines (voir chapitre 11). L’intérêt de ce rapport est décrit au chapitre 15.



Le sac dural repose globalement sur le plancher du canal vertébral (voir chapitre 5). Les relations antérieures du sac dural sont donc les parties postérieures des corps et des disques intervertébraux, le ligament longitudinal postérieur recouvrant ces structures (voir figure 10.4). Les artères antérieures du canal vertébral et les nerfs sinuvertébraux (voir plus loin) courent d’un côté à l’autre du plancher du canal vertébral (voir chapitre 11). Postérieurement, le sac dural est en relation avec le plafond du canal vertébral, des lames et des ligaments jaunes (voir chapitre 5).


Un espace appelé espace épidural sépare le sac dural des frontières ostéoligamentaires du canal vertébral. Cependant, cet espace est relativement étroit car le sac dural est en contact très étroit avec les frontières ostéoligamentaires du canal vertébral. Il est presque un « espace potentiel » et le terme « région épidurale » a été proposé comme terme de rechange pour éviter la connotation avec un grand espace vide [4] (voir figure 10.4).


L’espace épidural est rempli principalement d’une fine couche de tissu conjonctif aréolaire variant d’une structure diaphane à une structure pseudomembraneuse [4]. Quelques chercheurs considèrent que cette structure est importante et l’ont appelée membrane épidurale [5]. La membrane entoure le sac dural et tapisse la surface profonde des lames et des pédicules. Ventralement, à l’opposé des corps vertébraux, la membrane tapisse l’arrière du corps vertébral et passe ensuite médialement en profondeur du ligament longitudinal postérieur, où elle s’attache sur la surface antérieure de la portion profonde du ligament [5]. La membrane ne recouvre pas la partie arrière de l’anulus fibrosus à cause du ligament longitudinal postérieur qui se prolonge latéralement sur la partie postérieure du disque. La membrane fusionne donc avec les bords supérieurs et inférieurs de l’anulus fibrosus, mais dans un plan exactement antérieur à celui du ligament longitudinal postérieur. En face du foramen intervertébral, la membrane s’allonge latéralement pour former une enveloppe périneurale autour du fourreau dural des racines nerveuses et du nerf spinal [5].


Les plexus veineux vertébraux internes antérieurs et postérieurs courent à l’intérieur du tissu aréolaire de la membrane épidurale (voir chapitre 11), à l’intérieur duquel se trouvent des amas de graisse. La graisse épidurale n’est pas située uniformément dans tout l’espace épidural, mais est concentrée autour des racines nerveuses, dans les foramens intervertébraux et dans des amas enveloppés de tissu aréolaire. Elle est logée dans l’échancrure médiane à chaque niveau segmentaire, entre les ligaments jaunes [4].


Les paires individuelles de racines nerveuses entourées de leurs fourreaux duraux courent en direction des foramens intervertébraux, le long des canaux radiculaires. Elles sont donc en relation latéralement avec le pédicule et traversent ventralement de haut en bas l’arrière du corps vertébral pour pénétrer dans la portion supérieure de leur foramen intervertébral. Elles sont recouvertes dorsalement par la lame et son ligament jaune qui séparent le fourreau de la racine des articulations zygapophysaires.


À l’intérieur du canal vertébral, le sac dural et les fourreaux des racines nerveuses sont attachés à la colonne vertébrale par des concentrations de fascia épidural qui portent le nom de ligaments duraux, ou ligaments méningovertébraux, ou encore ligaments de Hoffmann [4,68]. Bien que le premier terme soit le plus usuel, le deuxième offre une meilleure description, car le tissu n’est pas une extension durale, mais une union entre les méninges et la colonne vertébrale.


Les ligaments méningovertébraux ventraux passent de la surface durale ventrale au ligament longitudinal postérieur. Ils sont mieux mis en évidence lorsque la dure-mère est tirée vers l’arrière et que les ligaments sont tendus. Au repos, ils sont à peine discernables de la membrane épidurale. Lorsqu’ils sont tendus, ils forment un septum discontinu dans le plan médian et paramédian. Les ligaments individuels peuvent former des bandes uniques, des bandes à deux branches en forme de Y en direction du ligament longitudinal postérieur, ou des bandes paramédianes supérieures à plus de deux branches qui contournent le ligament longitudinal postérieur et s’insèrent au périoste des dépressions latérales [6,7]. Ces ligaments sont variablement développés au niveau de L1 à L4, mais bien développés sur L5 [8].


Les ligaments méningovertébraux partent de la surface latérale du sac dural pour fusionner avec le périoste des pédicules et avec la capsule de l’articulation zygapohysaire [6]. Postérieurement, le sac dural est attaché au plafond du canal vertébral par de rares et fragiles liaisons pseudoligamentaires [4] qui représentent les ligaments méningovertébraux dorsaux [6].


Les fourreaux des racines nerveuses sont attachés à la fois dans le canal vertébral et dans le foramen intervertébral. Sur l’extrémité proximale du fourreau de la racine, les ligaments méningovertébraux attachent la dure-mère au ligament longitudinal postérieur et au périoste du pédicule adjacent [8,9]. Dans le foramen intervertébral, le fourreau de la racine est entouré du feuillet périneural qui relie indirectement les racines nerveuses et le nerf spinal aux bordures du foramen, mais surtout à la capsule de l’articulation zygapophysaire dorsalement [8,9]. Sur le côté externe du foramen intervertébral, le nerf spinal peut être associé au ligament transforaminal quand il est présent (voir chapitre 4). D’une manière générale, le nerf spinal est situé sous la plupart des types de ligaments transforaminaux mais émerge au-dessus des ligaments transforaminaux inférieurs [10] (voir chapitre 4).


La taille relative du nerf spinal et des racines nerveuses à l’intérieur du foramen vertébral varie d’un niveau à l’autre. Elle est importante pour ce qui est du risque de compression du nerf spinal et de la racine nerveuse. Selon une règle approximative, la surface transversale du foramen intervertébral augmente de L1–L2 à L4–L5, mais le foramen de L5–S1 est nettement plus petit que le reste [11]. Paradoxalement, le nerf spinal L5 est le plus gros nerf lombal [11]. Le nerf spinal L5 occupe donc environ 25–30 % de la surface disponible du foramen intervertébral, alors que les autres nerfs lombaux en occupent entre 7 et 22 %, ce qui prédispose ainsi davantage le nerf L5 à une sténose foraminale.



Anomalies des racines nerveuses


Les anomalies les plus cliniquement significatives des racines nerveuses lombales sont les trajets nerveux anormaux et les anastomoses entre racines nerveuses [1218]. La morphologie de ces anomalies est résumée sur la figure 10.5.



Les anomalies de type 1 sont des trajectoires anormales. Deux paires de racines nerveuses peuvent émerger d’un seul fourreau dural (type 1A), ou un fourreau dural peut émerger de la partie basse du sac dural (type 1B). Les anomalies de type 2 sont celles dans lesquelles le nombre de racines dans un foramen intervertébral varie. Un foramen peut être sans nerf (type 2A) ; dans ce cas, les foramens au-dessus ou au-dessous contiennent deux séries de racines, mais un foramen peut aussi contenir une série de racines surnuméraires (type 2B). Les anomalies de type 3 sont des anastomoses extradurales entre les racines sur lesquelles un faisceau de fibres nerveuses quitte un fourreau dural pour en rejoindre un autre adjacent. Ce type d’anomalie peut être surimposé à une anomalie de type 2.


Ces anomalies en elles-mêmes ne produisent aucun symptôme. Les patients avec des nerfs anormaux ou unis peuvent ne développer aucun symptôme durant leur vie entière. Cependant, les doubles racines nerveuses occupent bien plus d’espace dans le canal radiculaire du foramen intervertébral qu’une racine unique. La croissance d’une lésion envahissante a donc plus de chance de comprimer une double racine nerveuse et de produire des symptômes plus tôt que si une seule racine normale était présente. Par conséquent, bien que les patients ayant des anomalies de racines ne soient pas plus susceptibles de développer des troubles du rachis lombal, la présence de lésions envahissantes les rend plus susceptibles de développer des symptômes.


L’autre intérêt clinique des anomalies de racines se rapporte à l’interprétation des signes cliniques. L’examen clinique peut révéler la compression d’une racine nerveuse particulière, mais si celle-ci a une trajectoire anormale, la lésion structurelle créant la compression peut ne pas être localisée à l’endroit attendu. Par exemple, les signes de compression d’une racine nerveuse L4 font penser le plus souvent à une compression dans le canal radiculaire de L4 ou dans le foramen intervertébral de L4–L5 ; mais dans le cas d’une compression de racine anormale de L4, la lésion pourrait être au niveau de L3, ou peut-être au niveau vertébral de L5, selon le type d’anomalie. Par ailleurs, dans le cas de racines nerveuses doubles, une seule lésion compressive peut produire des signes laissant penser que deux lésions compriment deux racines nerveuses successives.


Les anomalies de racines nerveuses symptomatiques ne sont heureusement pas fréquentes et des examens aussi déroutants ne compliquent pas souvent la pratique clinique. La fréquence des anomalies est estimée à environ 8,5 % [19], mais lorsqu’elles sont symptomatiques, les principaux types sont facilement identifiés par myélogramme [2]. Les anomalies des racines nerveuses devraient cependant être présentes à l’esprit et considérées comme une éventualité chez les patients présentant une distribution inhabituelle ou des signes neurologiques.


L’intérêt chirurgical des anomalies des racines nerveuses se rapporte à la mobilité des racines nerveuses anormales, à la prudence nécessaire lors d’opérations à proximité et aux types de procédures pouvant être mises en œuvre pour les décompresser. Ces questions sont explorées dans la littérature chirurgicale [2,16].


Les anastomoses intrathécales sont une autre particularité des racines nerveuses qui ne sont pas des anomalies mais plutôt des variations. À l’intérieur du sac dural, des faisceaux de fibres nerveuses peuvent passer d’une racine nerveuse à l’autre. Ces connexions ont une fréquence de 11 à 30 % [20]. Elles se produisent généralement près de la moelle spinale et leur taille peut varier de petits filaments à d’importants faisceaux [20]. Ces anastomoses n’ont pas d’importance pour le diagnostic clinique car elles se rencontrent proximalement aux régions où les racines nerveuses risquent d’être comprimées, mais elles ont un intérêt pour les neurochirurgiens opérant sur les extrémités proximales des racines nerveuses [20,21].

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Apr 24, 2017 | Posted by in RADIOLOGIE | Comments Off on 10: Nerfs du rachis lombal

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