10: Grade des monoporées

10 Grade des monoporées


Cet ensemble est que nous appellerons ici54 « monoporées » est un grade qui forme la base des Angiospermes (fig. 9.18) ; le caractère le plus marquant des monoporées est justement un pollen monoaperturé, caractère primitif partagé aussi par les Gymnospermes qui les ont précédé au cours de l’évolution. Un autre caractère issu des Gymnospermes est l’hégémonie des espèces vivaces (les annuelles sont rares et apparaissent tardivement chez les monoporées). Parmi ces vivaces, nombreux sont les ligneux, du moins dans les premiers groupes de Monoporées. Quelques autres caractères primitifs comme la présence de bois homoxylé à ponctuations aréolées ou de trachéides scalariformes s’observent encore dans les groupes primitifs ligneux, avant de disparaître.



Grade des protoangiospermes


Les protoangiospermes, les plus archaïques des Angiospermes (fig. 9.18), ne comportent que 194 espèces de plantes aquatiques ou d’arbustes à bois primitif.


Les pièces du périanthe, appelés tépales55 ne sont pas encore différenciées en sépales et pétales. La fonction A qui, dans le modèle ABC (voir fig. 9.4), assure la différenciation des sépales n’est pas exprimée. Ces pièces sont spiralées et l’on passe progressivement des tépales aux étamines (fig. 10.2).


Le pollen est monoaperturé.


Le gynécée est formé de carpelles libres et, primitifs, ils sont en forme d’ascidie, c’est-à-dire de cornet dont la fermeture à la partie supérieure est assurée par une sécrétion et non par un vrai tissu épidermique.


Les protoangiospermes forment un ensemble paraphylétique dont les 3 groupes sont successivement frères du reste des Angiospermes.


Les Amborellacées sont le taxon-frère de tout le reste du groupe c’est-à-dire, ici des 266 800 autres espèces d’Angiospermes. La famille, la seule de l’ordre des Amborellales, n’est plus représentée que par un seul genre, Amborella (fig. 10.1) et une seule espèce, survivant sous la forme d’un arbuste en Nouvelle-Calédonie.



Les Nymphéacées (Nymphéales) (fig. 10.2), sont des plantes aquatiques cosmopolites (5 genres et 95 espèces). Les Nénuphars (genres Nuphar et Nymphaea), et les Victorias font la beauté des pièces d’eau. Les tépales, colorés et les étamines sont insérées en hélice ; les carpelles, cyclisés, se soudent en un ovaire pluriloculaire plus ou moins enfoncé dans la coupe florale (ovaire supère des Nuphars, semi-infère des Nymphéas et infère des Victoria). La pollinisation, de type primitif, est réalisée par des coléoptères broyeurs qui, tout en saccageant les fleurs, assurent la dispersion du pollen.



Les Austrobaileyales comprennent trois familles ligneuses dont la principale est celle des Schisandracées (73 espèces dont le Badianier de Chine encore appelé Anis étoilé ou Badanier vrai, arbuste aux fruits riches en essence d’anis) (fig. 10.3).




Magnoliidées


Les Magnoliidées sont un groupe monophylétique (fig. 10.4).



Les Chloranthales, réduites aux Chloranthacées (75 espèces tropicales herbacées ou ligneuses) sont le groupe-frère des Magnoliidées. Elles s’en distinguent par leurs feuilles opposées et leurs fleurs très réduites. Dans l’acception de l’APG3, elles ne font pas partie des Magnoliidées mais l’examen du cladogramme des Angiospermes montre un clade Magnoliidées + Chloranthales bien défini.


Les Magnoliidées rassemblent environ 9 000 espèces surtout ligneuses56 et essentiellement des régions chaudes. Les espèces sont réparties en quatre ordres : Magnoliales, Laurales, Canellales et Pipérales… Mis à part l’ordre des Canellales (80 espèces), les trois ordres principaux sont d’importance équivalente (environ 3 000 espèces chacun).


De nombreux caractères attestent de l’ancienneté du groupe au niveau de l’anatomie (présence de trachéides) ou de la structure florale (certaines espèces, comme les Degeneria (Dégéneriacées, 2 espèces relictuelles) possèdent des carpelles qui, à leur extrémité supérieure, sont fermés par des sécrétions mucilagineuses et non par un épiderme comme chez les Angiospermes plus évoluées).


Les feuilles sont généralement simples et sans stipules.


Un appareil sécréteur de dérivés aromatiques et terpéniques, toxiques pour les herbivores est fréquent dans cet ensemble riche en aromates ou en espèces odorantes.


Les fleurs à tépale (T), parfois de grande taille (Magnolias) ont les pièces florales disposées en hélice sur un réceptacle allongé (fig. 10.5), ce qui rappelle le cône mâle des Conifères :




image



Chez les Magnoliales, la disposition hélicoïdale des pièces florales fait que leur nombre n’est pas fixe (l’hélice n’est pas une structure finie comme un cercle), que des termes de passage s’observent entre les pièces florales et que les carpelles sont indépendants.


Toutefois chez les espèces évoluées, l’hélice se rompt en verticilles, ce qui stabilise le nombre des pièces situées sur chaque verticille et entraîne au niveau des carpelles, leur soudure en un ovaire syncarpé ; parallèlement, le réceptacle floral s’aplatit.


La cyclisation de la fleur se fait alors sur un mode trimère et avec un grand nombre de verticilles. Par exemple, 7 chez le Cannelier : 3T, 3T, (3+3+3+3+3)E, 1C.


Le cloisonnement du pollen est généralement de type successif (cf. fig. 10.40, à gauche) et les grains de pollen sont monoaperturés.


Citons :



image chez les Magnoliales :



les Magnolias (Magnoliacées, 221 espèces) sont des arbres d’Amérique ou d’Asie qui présentent de nombreux caractères primitifs : les fibres du bois présentent des ponctuations aréolées ; celles des vaisseaux sont de type scalariforme. Les fleurs (fig. 10.5), de grande taille, comportent un réceptacle fortement convexe sur lequel s’insèrent en hélice les nombreuses pièces florales : tépales pétaloïdes, étamines lamellaires (c’est-à dire mal différenciées en filet et anthères), carpelles. Les fruits sont des follicules,


image chez les Laurales :




image chez les Canellales : les Canellacées, (13 espèces), ligneux tropicaux à propriétés aromatiques (ne pas confondre avec les Canneliers cf. ci-dessus) ;


image les Pipérales sont des plantes herbacées, des arbustes ou des lianes des régions chaudes.




Citons deux familles importantes :




Monocotylédones



Généralités


Comme les Magnoliidées, les Monocotylédones présentent des caractères archaïques (grain de pollen monoaperturé, fleur trimère à tépales, graine albuminée…). Leur singularité réside en une simplification de leur appareil végétatif :



Les Monocotylédones sont représentées par des plantes herbacées, vivaces pour la plupart.


Les raisons de cette évolution simplificatrice sont à rechercher dans l’influence d’un habitat aquatique sur les premières Monocotylédones. Par exemple, dans l’eau en raison de la poussée d’Archimède, les structures rigides, comme le bois, ne sont plus nécessaires ; les herbes, aquatiques, puis devenues terrestres, sont sélectionnées.


Les Monocotylédones, avec 62 500 espèces et 80 familles réparties en 12 ordres, sont une indiscutable réussite de l’évolution : nous y trouvons les familles peut-être les plus spécialisées et les plus cosmopolites du monde des Angiospermes : ainsi les Orchidacées et les Poacées


Nous étudierons successivement : l’embryon, l’appareil végétatif, l’appareil reproducteur, la classification.




Appareil végétatif




Tige


Les tiges feuillées sont de type herbacé : l’évolution simplificatrice a fait disparaître les méristèmes secondaires à l’origine du bois et du liège, lesquels assurent l’épaississement progressif des racines et des tiges chez les Angiospermes ligneuses et les Gymnospermes ; chez ces derniers les structures primaires y sont temporaires, vites remplacées par les tissus des méristèmes secondaires, lesquels assurent la rigidité des tiges et permettent la forme arbre avec « tronc » et « branches ».


Il n’en va pas de même chez les Monocotylédones où la structure primaire persiste ; par un mécanisme de compensation, les faisceaux ou « cordons » conducteurs de sève deviennent nombreux, répartis sur plusieurs cercles concentriques : ce sont eux qui assurent la rigidité des tiges.


Le caractère herbacé des Monocotylédones se retrouve même chez les espèces tropicales dont le port semble arborescent : Palmiers, Bambous. Chez ces espèces, la tige n’est nullement constituée comme le tronc des arbres véritables : c’est une véritable tige herbacée rendue rigide et épaisse par le nombre très élevé des faisceaux et par l’importante sclérification du parenchyme. De plus, si la tige peut dans ces cas atteindre un volume assez important, c’est que le méristème apical accroît progressivement sa circonférence jusqu’à ce qu’il ait atteint un diamètre définitif pour une espèce déterminée. Il en résulte que la tige a, sur une faible longueur, la forme d’un cône renversé dans sa partie la plus jeune, généralement enterrée et pourvue de nombreuses racines adventives, puis elle prend et conserve définitivement la forme d’un cylindre (fig. 10.8).



Pourtant, chez quelques espèces tropicales (Dragonniers, fig. 10.8, Yuccas), le tronc s’accroît en diamètre, mais c’est par un mécanisme tout à fait différent de celui qui s’observe chez les arbres véritables : les cellules les plus externes du cylindre central se dédifférencient en un tissu dans lequel de nouveaux faisceaux conducteurs de sèves apparaissent.


Les tiges feuillées ne se ramifient pas, sauf exception (Dragonnier). C’est encore une conséquence de l’absence de méristèmes secondaires : une ramification aérienne, pour être rigide, impose l’épaississement des axes les plus anciens.


L’absence de liège, donc d’une écorce protectrice (p. 25), cantonne de nombreuses Monocotylédones, notamment celles de grande taille (Palmiers, Bananiers, Aloès…), aux régions chaudes. Pour s’adapter aux zones froides, celles-ci ont différencié des organes souterrains qui leur permettent de passer la mauvaise saison, les bulbes et les rhizomes ; leur appareil végétatif aérien, de dimension réduite, ne se développe qu’à la belle saison et meurt chaque année.




Bulbe

C’est, à sa base, une tige feuillée modifiée, mais, contrairement au rhizome, extrêmement courte et d’orientation verticale, elle est appelée plateau du bulbe en raison de sa forme (fig. 10.16). Les feuilles, dépourvues de chlorophylle, dilatées et généralement réduites à la gaine, sont emboîtées les unes dans les autres. Les plus externes, donc les plus âgées, mortes, amincies et desséchées, ont un rôle protecteur. Les autres sont, au contraire, épaisses, charnues, gorgées de réserves. On les appelle des écailles (Lis, fig. 10.16) si leur insertion sur le plateau du bulbe n’est qu’un croissant ; des tuniques (Tulipe, fig. 10.15 et Jacinthe, fig. 10.28), si c’est un anneau, les bords latéraux étant réunis l’un à l’autre comme chez l’Ail ou le Poireau.



Feuilles


Les feuilles sont simples et sans stipules, comme chez les Magnoliidées. Elles ont perdu secondairement (voir plus haut, l’évolution simplificatrice) leur limbe et sont réduites au pétiole élargi en gaine à la base et en faux-limbe au sommet : il en résulte une nervation parallèle (fig. 10.9). Cette interprétation est prouvée par la physiologie ; le limbe et le pétiole d’une feuille ont besoin pour croître de substances de croissance différentes, cytokinine pour le limbe, auxine pour le pétiole. Les feuilles de Monocotylédones ne réagissent qu’à l’auxine.






Protomonocotylédones


Ce nom s’applique au grade de Monocotylédones le plus primitif. Certaines espèces possèdent encore des trachéides à ponctuations scalariformes et des pièces florales disposées en hélice avec carpelles indépendants57


À part quelques genres comme la Sagittaire, aux fleurs à trois tépales très voyants (cf. fig 10.11.B), ce grade est constitué d’espèces à fleurs généralement petites et peu colorées et liées à un habitat souvent humide voire aquatique.





Alismatales


Les Alismatales comprennent 3 700 espèces réparties en 14 familles. Cet ensemble comprend une importante famille surtout terrestre, les Aracées et de nombreuses familles liées à l’eau comme les Potamogétonacées (Potamots, du grec Potamos, fleuve).


La Posidonie (Posidoniacées, fig. 10.11) colonise une niche écologique très précise, les bords côtiers, peu profonds de la Méditerranée où elle forme de véritables « herbiers » marins abritant une faune marine très riche. La Posidonie est menacée actuellement par les mouillages trop nombreux des bateaux de plaisance et par la concurrence d’une algue verte invasive, la Caulerpe .


L’Élodée du Canada (cf. p. 275) et la Vallisnérie, plantes utilisées en aquarium, se rangent dans la famille des Hydrocharitacées (120 espèces).


La Sagittaire (Alismatacées, 100 espèces) est remarquable par son trimorphisme foliaire : les feuilles immergées sont rubannées ; les feuilles flottantes ont un limbe ovale et les feuilles aériennes un limbe hasté (en forme de flèche, fig. 10.11).


Les Aracées (3 250 espèces) sont des plantes herbacées généralement tropicales, parfois grimpantes ou épiphytes (du grec epi, sur), à bractée foliacée appelée spathe (du grec spathë, large feuille) protégeant l’inflorescence en épi, le spadice (fig. 10.12).



Certaines Aracées se sont adaptées aux régions tempérées grâce à des rhizomes, comme les Arums (fig. 10.12). Beaucoup d’Aracées sont toxiques ; certaines sont alimentaires : le Taro est même la plante la plus anciennement cultivée (depuis près de 10 000 ans) chez les Papous.



Les Monsteras, Philodendrons sont cultivés en appartement comme plantes décoratives (fig. 10.13).



En pharmacie, on propose de la poudre de rhizome d’Amorphophallus (fig. 10.13) konjac comme coupe-faim mécanique : en effet, additionnée d’eau, cette poudre gonfle de plus de cent fois son volume en une sorte de gel. Une autre espèce de ce genre asiatique (A. titanum) est la fierté des jardins botaniques qui parviennent à faire fleurir sa spectaculaire inflorescence, la plus haute chez une plante herbacée.


Les Lentilles d’eau (fig. 10.13) sont réduites à une lame verte portant quelques racines (aucune chez les Wolffia). L’inflorescence ne comprend que trois fleurs (deux mâles réduites à une étamine, une femelle réduite à un carpelle) entourées d’une spathe. Ce sont les plus petites plantes à fleurs : elles dérivent par néoténie (fig. 8.13) des Pistia, Aracées flottantes plus connues sous le nom de Laitues d’eau.





Grade des liliidées


Les liliidées sont un grade composé de deux ordres : les Liliales et les Asparagales ; elles forment le groupe central des Monocotylédones avec environ 31 000 espèces et 24 familles dont les Liliacées, les Asparagacées et les Orchidacées ; ces dernières comprennent à elles seules 22 500 espèces.



Liliales


Les Liliales réunissent des famillles de Monocotylédones des plus typiques comme les Liliacées (cf. ci-dessous), présentées souvent pour décrire les Monocotylédones. Elles réunissent des plantes herbacées vivaces portant souvent de grandes fleurs sur des inflorescences simples, à fleurs régulières et à ovaire supère donnant une capsule.



Liliacées


Les Liliacées58 regroupent les Tulipes (fig. 10.15), les Lis (fig. 10.16) et les Fritillaires ; la famille comprend 600 espèces essentiellement réparties dans l’hémisphère Nord.




Les Liliacées sont des plantes herbacées vivaces par un bulbe (fig. 10.16).


Les tiges, annuelles, portent des feuilles engainantes et parallélinerves.


Les bulbes (fig. 10.16) sont formés, tout comme les rhizomes (fig. 10.27) de plusieurs pousses annuelles successives mais très courtes et emboîtées les unes dans les autres : chacune d’elles est représentée par une partie du plateau et les écailles qu’elle porte. Bien que la croissance au cours des années se fasse en hauteur, les bulbes ne sortent pas progressivement du sol. En effet, d’une part, les parties les plus anciennes du bulbe se désorganisent (chez le Lis, les pousses bulbeuses correspondent à 2 ou 3 ans ; chez la Tulipe (fig. 10.15), il y a destruction rapide des pousses précédentes et le bulbe est limité à une seule pousse bulbeuse) et, d’autre part, les jeunes racines ont la particularité de se contracter et de renfoncer le bulbe en terre. Souvent à l’aisselle des écailles ou tuniques des bulbes, quelques bourgeons axillaires (généralement un à deux) se développent en une jeune pousse bulbeuse : c’est un caïeu. Les parties les plus anciennes du bulbe père se détruisant peu à peu, les caïeux deviennent indépendants et donnent naissance à de nouveaux individus.


L’inflorescence, en grappe, est parfois réduite à une fleur solitaire et terminale (Tulipe).


La fleur, typiquement complète, est souvent prise en exemple pour décrire les Monocotylédones (fig. 10.15) :



image





Colchicacées et Mélanthiacées


Les Colchicacées (225 espèces) et Mélanthiacées (120 espèces) sont la famille de la Colchique et du Vérâtre (fig. 10.18) respectivement. Chez la Colchique, le bulbe type, décrit précédemment, se transforme en bulbe plein : les feuilles, au lieu de constituer des organes de réserves, se réduisent à des bractées protectrices, tandis que le plateau, au lieu de n’être que le réceptacle des écailles ou des tuniques, se développe en une masse volumineuse dans laquelle les réserves s’accumulent (ex. : Colchique, fig. 10.17). Chez le Vérâtre (Mélanthiacées), on peut observer le passage du bulbe au rhizome : dans ce cas, on ne sait pas très bien si l’on est en présence d’un bulbe solide ou d’un rhizome à course plus ou moins oblique. Les styles sont encore libres (soudés chez les Liliacées) et la capsule est à déhiscence septicide (loculicide chez les Liliacées). On note aussi parfois une évolution de la trimérie vers la tétramérie chez la Parisette [(4+4)T, (4+4)E, 4C] qui est une Mélanthiacée.


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Jun 29, 2017 | Posted by in GÉNÉRAL | Comments Off on 10: Grade des monoporées

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