Chimiothérapie anticancéreuse
Principes généraux du traitement
Quelle qu’en soit la cause, le cancer est une maladie des cellules liée à une mutation génétique entraînant une prolifération cellulaire anormale qui échappe aux mécanismes de contrôle.
Chez l’homme, les décès dus au cancer bronchopulmonaire (16 % des décès par cancer) occupent la première place, suivis du cancer de l’estomac (12 % des décès par cancer).
Chez la femme, le cancer du sein (15 % des décès par cancer) occupe la première place, suivi du cancer du côlon (12 % des décès par cancer).
Les médicaments anticancéreux agissent en s’opposant à la multiplication cellulaire, que cette multiplication soit normale ou néoplasique.
Étiologie des cancers
On ne connaît pas encore la cause ou les cause(s) précise(s) du cancer, mais des facteurs (dont les effets s’additionnent probablement) ont été identifiés comme cancérogènes.
Facteurs de l’environnement
Un grand nombre de cancers humains sont attribués à l’existence dans l’environnement de substances mutagènes ou cancérogènes et à des facteurs physiques (rayonnements). La fréquence des leucémies est élevée chez les sujets soumis à des radiations (industrie atomique ou explosions atomiques), ou après radiothérapie. La catastrophe de Tchernobyl en 1986 a entraîné une forte augmentation des cancers thyroïdiens. Enfin, la fréquence des cancers de la peau (carcinomes et mélanomes) est élevée chez les sujets trop exposés aux radiations ultraviolettes du soleil.
Facteurs génétiques
Il existe une prédisposition génétique au cancer. Certains cancers sont héréditaires : 30 % des cas de rétinoblastomes, 10 % des cas de cancer rectocolique.
Facteurs chimiques
Les sujets manipulant des produits contenant de l’arsenic (mineurs, vignerons, pelletiers) ou travaillant au contact d’eaux riches en arsenic sont à risque de cancer de la peau. L’amiante entraîne des mésothéliomes.
Les cancers de la vessie sont assez fréquents chez les ouvriers manipulant des matières colorantes, riches en β-naphtylamine. Les cancers associés à l’usage du tabac ont des localisations diverses : cavité buccale, pharynx, larynx, œsophage, bronches et, de façon inattendue, la vessie (il existe dans l’urine des fumeurs des quantités élevées d’orthoaminophénol à propriétés cancérogènes).
Facteurs diététiques
Certains déséquilibres alimentaires augmentent la prévalence des cancers : le cancer de l’estomac est fréquent chez les patients atteints d’anémie de Biermer ; le cancer du foie s’observe dans les populations soumises à des déséquilibres nutritionnels.
La prise exagérée d’alcool favorise l’apparition de cancers des voies aérodigestives supérieures et de l’œsophage. Enfin, signalons les cancers du foie dus à une toxine sécrétée par un champignon (Aspergillus flavus) sur les arachides pendant le stockage.
Facteurs hormonaux
Les cancers du sein sont plus fréquents chez les femmes célibataires ou qui se sont mariées tard, chez les femmes qui ont eu peu d’enfants ou qui ne les ont pas allaités. Inversement, les cancers de l’utérus sont plus fréquents chez les femmes mariées jeunes et ayant de nombreux enfants.
Modalités de la chimiothérapie
La chimiothérapie a pour but de détruire les cellules tumorales afin d’obtenir une rémission de durée aussi longue que possible. Un traitement est efficace s’il permet une prolongation maximale de la survie du patient ; s’il n’entraîne aucune amélioration, le traitement doit être modifié.
La chimiothérapie ne détruit jamais 100 % des cellules tumorales : l’association de médicaments antinéoplasiques permet de meilleurs résultats, mais elle ne doit pas être faite de produits ayant des effets toxiques similaires qui s’additionneraient. On associe souvent à la chimiothérapie l’immunothérapie, la chirurgie et la radiothérapie.
La chimiothérapie est appelée :
• chimiothérapie adjuvante lorsqu’elle est pratiquée après un traitement radiochirurgical dans le but de traiter des métastases ou de compléter une exérèse incomplète ;
• chimiothérapie néoadjuvante lorsqu’elle est pratiquée avant le traitement locorégional du cancer dans le but de traiter les métastases ou de réduire la masse tumorale avant une intervention chirurgicale ;
• chimiothérapie palliative lorsque la maladie est avancée avec peu d’espoir de guérison : son but est d’augmenter la survie et d’améliorer la qualité de la vie du patient.
Les médicaments anticancéreux sont divisés en deux grands groupes :
• les agents cytotoxiques, qui entraînent la mort cellulaire par action sur l’ADN, l’ARN ou les protéines intervenant dans la division cellulaire ;
• les modulateurs de la réponse biologique, qui interviennent sur :
Trois modalités d’administration sont possibles selon les médicaments :
• administration continue à petites doses quotidiennes ;
• administration intermittente à fortes doses : les résultats obtenus sont meilleurs dans ce cas. Chaque administration ne doit être effectuée qu’après retour à la normale de la leucocytose ;
• administration modulée par des pompes programmables (chronothérapie).
Indications des antinéoplasiques
Les médicaments antinéoplasiques sont utilisés :
• dans le traitement des leucémies et d’autres cancers hématologiques : leucémies aiguës lymphoblastique et myéloblastique, leucémie aiguë monocytaire, leucémie lymphoïde chronique, leucémie myéloïde chronique, histiocytose X, myélome multiple des os, macroglobulinémie primaire de Waldenström ;
• dans le traitement des hématosarcomes : maladie de Hodgkin, réticulosarcomes, lymphosarcomes, maladie de Burkitt, maladie de Brill-Symmers ;
• dans le traitement des tumeurs : cancers de la prostate, du sein, de l’endomètre, du col utérin ; cancers des glandes endocrines (de l’ovaire, du testicule, de la corticosurrénale) ; cancers de l’appareil urinaire ; cancers de l’appareil digestif (cancers de l’estomac, du pancréas, des glandes salivaires, du côlon et du rectum, du foie) ; cancers des bronches et des poumons ; cancers des tissus nerveux ; cancers de la peau ; tumeurs osseuses (ostéosarcome, sarcome d’Ewing, métastases osseuses).
Toxicité des antinéoplasiques
Tous les antinéoplasiques inhibent les divisions cellulaires des cellules saines comme des cellules cancéreuses. Ils sont donc toxiques pour tous les tissus se renouvelant rapidement. Certaines de ces toxicités leur sont communes.
Atteinte hématologique
C’est la plus fréquente. Les trois lignées sanguines peuvent être atteintes (leucopénie, dont le risque est la survenue d’accidents infectieux, parfois agranulocytose, thrombopénie avec risque d’hémorragie, anémie d’origine centrale ou périphérique par hémolyse). On observe même parfois une aplasie médullaire globale.
Effet oncogène
Certains médicaments antinéoplasiques (Alkéran, Chloraminophène, Endoxan, Amétycine…) sont susceptibles par eux-mêmes, en raison de leur très grande toxicité, d’induire chez le patient une maladie maligne, par exemple une leucémie secondaire. On dit qu’ils sont oncogènes ou leucémogènes.
Immunosuppression
C’est une manifestation presque constante de la chimiothérapie anticancéreuse qui favorise le risque d’infections bactériennes, mycosiques et virales.
Atteinte des tissus reproducteurs
Elle entraîne oligospermie, azoospermie, aménorrhée. Un effet tératogène a été montré avec les agents alkylants et le méthotrexate, lorsqu’ils sont administrés en début de grossesse.
Effet hyperuricémiant
Il est observé lors d’administration d’allopurinol et d’urate oxydase, en cas de traitements à fortes doses.
Effet émétisant
Il peut s’observer avec tous les dérivés nitrés mais surtout le cyclophosphamide, les nitroso-urées, le cisplatine.
Alopécie
Elle est fréquente, a de fortes répercussions psychologiques, mais est toujours réversible. Elle s’observe surtout avec Adriamycine, Taxol, Vincristine.
Inflammation des muqueuses (stomatite, mucite)
Elle peut être observée également au niveau des muqueuses génitales ou au niveau de l’œil lors de l’utilisation du docétaxel, paclitaxel, melphalan…
Réactions cutanées d’hypersensibilité
Elles sont fréquentes avec les anticorps monoclonaux, l’interféron et l’interleukine.
Risques du personnel lors de la manipulation des anticancéreux
La manipulation des médicaments anticancéreux par le personnel (infirmière, aide-soignante, préparateur en pharmacie) est à risque, ce qui les a fait classer officiellement dans la catégorie des produits CMR c’est-à-dire cancérigènes, mutagènes, toxiques pour la reproduction. Le personnel peut être contaminé par voie cutanée, par l’inhalation d’un aérosol produit lors de la préparation injectable et par voie digestive accidentellement.
Le plus souvent, les anticancéreux sont préparés dans des unités centralisées pharmaceutiques par un personnel formé à cet effet, pour éviter leur dissémination.
La protection des personnels est réalisée grâce :
• au port d’habits protecteurs et de dispositifs médicaux spécifiques ;
• au respect des bonnes pratiques de manipulation et d’évacuation des déchets contaminés ;
• au respect des mesures à prendre en cas d’exposition accidentelle.

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